La guerre qui sévit au Nord-Kivu aborde un tournant décisif avec l’implication, encore une fois, de plusieurs pays de la région. Plusieurs sources font état de la présence de soldats ougandais aux côtés de la coalition RDF-M23. Mardi 30 janvier 2024, le Conseil territorial de la jeunesse du territoire de Rutshuru, une structure de la société du Nord-Kivu, a rapporté «l’entrée massive sur le sol congolais d’éléments des forces armées ougandaises lourdement armés». Ces militaires ougandais se seraient introduits en RDC par la frontière de Kitagoma en groupement de Busanza, chefferie de Bwisha (Rutshuru) depuis la semaine dernière.
L’histoire dramatique que vit le pays de Félix Tshisekedi depuis près de 3 décennies est donc en passe de se répéter, puisqu’en 2018 avait eu lieu dans la même région martyre la désormais tristement célèbre «1ère guerre mondiale africaine» qui vit s’affronter les armées du Rwanda, du Burundi et de l’Ouganda et celle de la RDC, du Zimbabwe et du Malawi.
Si officiellement les autorités de la RDC n’ont pas encore dénoncé l’intervention de l’Ouganda aux côtés de l’agresseur rwandais, c’est sans doute pour ne pas s’en prendre à deux assaillants à la fois. Au Nord-Kivu, les faveurs de Kampala à l’endroit de Kigali sont un secret de polichinnelle.
Le 10 novembre 2023, le vice-premier ministre, ministre de l’Economie nationale, Vital Kamerhe était sorti de la réserve observée par le gouvernement sur la question en citant nommément Kampala parmi les agresseurs de la RDC. A l’occasion du sommet Arabie-Saoudite-Afrique à Riyad, le représentant du président Tshisekedi s’était, en effet, fendu d’un appel aux chefs d’Etat africains et aux leaders saoudiens, invités à user de leur influence auprès de ces deux pays voisins pour que la paix revienne à l’Est de la RDC.
Implication dans la prise de Bunagana
Quelques mois avant le plénipotentiaire congolais, un rapport du groupe d’experts onusiens avait fait état de l’implication de l’UPDF dans la prise de la bourgade frontalière (avec l’Ouganda) de Bunagana par les troupes du M23/RDF, le 13 juin 2022.
Les informations relatives à l’entrée en lice de l’UPDF aux côtés de la coalition RDF-M23 surviennent quelques jours après que les troupes de la SADC, nanties d’un mandat offensif et appelées à la rescousse par Kinshasa en remplacement de celles de l’EAC, aient entamé leur déploiement au Nord-Kivu. Mercredi 30 décembre 2023, les premiers éléments du contingent sud-africain, lourdement armés avaient gagné Goma, le chef-lieu du Nord-Kivu. Etaient attendus des éléments sud-africains supplémentaires ainsi que ceux des armées tanzaniennes et malawites. Arrivés à Goma depuis le 26 janvier 2024, les Tanzaniens devraient être déployés sur l’axe Sake-Masisi pour contrer toute attaque des RDF-M23, selon des sources.
Sur le terrain des affrontements, entre les résistants Wazalendo et RDF-M23 mais aussi entre FARDC et les mêmes assaillants, les combats font rage depuis près d’une semaine.
Au cours de la traditionnelle séance de vœux du corps diplomatique accrédité en RDC, le 30 janvier, le président Félix Tshisekedi a réaffirmé sa détermination à ne céder à aucun compromis tant que le Rwanda occuperait une portion du territoire national.
Poursuite des affrontements
Mercredi 31 janvier 2024, les FARDC ont pilonné les positions ennemies dans les zones de Karuba, Mushaki et Musekera, à une dizaine de km de Sake afin d’en déloger les rebelles qui les ont occupées et freiner leur progression.
Sur l’axe Mushaki-Karuba étaient signalés, un jour plus tôt, des affrontements qui duraient depuis 2 jours entre combattants Wazalendo et FARDC d’une part et, d’autre part, la coalition RDF -M23 sur plusieurs fronts (Karuba, Mushaki, Kingi en chefferie de Bahunde), Mweso, Butale, Kibanchiro (en chefferie des Bashali).
Manifestement en difficultés, les assaillants ont entrepris de larguer des bombes à l’aveuglette sur un certain nombre d’agglomérations habitées de la région. A Masisi, des obus sont tombés à Sake et Mubambiro, dimanche 28 et lundi 29 janvier 2024. Vers Bweremana, un autre de ces obus est tombé dans un champ sans exploser alors qu’à Sake une maison d’habitation avait été détruite, provoquant la mort d’une personne et en blessant 4 autres.
Le 29 janvier, les terroristes du M23 avaient rendu public un communiqué dénonçant l’intervention des troupes sud-africaines de la SADC aux côtés des FARDC. Mais aucune source indépendante n’a confirmé cette information.
Le 28 janvier, les assaillants avaient tenté sans succès de couper la route Sake-Minova au cours d’affrontements dont les détonations d’armes lourdes étaient audibles jusqu’à l’île de Chegeera dans le Lac Kivu (Sud-Kivu). Alors que sur la route Sake-Kitchanga se déroulaient des affrontements sur les collines de Karuba entre patriotes Wazalendo et RDF-M23. Depuis la veille, cette coalition avait lancé des attaques simultanées sur les positions des résistants Wazalendo à Karuba, Rushoga et Katana dans le territoiree de Masisi. Ainsi qu’à Mbuhi et Bukama et à Butare sur la colline Murambi et Busumba.
La bataille de Mweso
Cette vaste offensive faisait suite à la réoccupation de la cité de Mweso, le 27 janvier 2024, après près de 5 jours d’intenses affrontements avec les patriotes Wazalendo qui ont réussi à en déloger les assaillants.
La cité de Mweso, à 100 km au Nord de Goma, est une bourgade stratégique sur le plan économique et opérationnel. C’est un carrefour qui relie les territoires de Masisi, Rutshuru et Walikale. Celui qui contrôle Mweso a la mainmise sur plusieurs axes importants dans la région.
C’est en effet à partir de Mweso que les RDF-M23 se ravitaillent en hommes et en armes depuis le Rwanda en passant par Kalengera-Tongo-Bwiza, selon plusieurs sources dans la région.
Le 25 janvier alors que Mweso était occupé par les patriotes Wazalendo, les terroristes de la coalition RDF-M23 ont pilonné la cité habitée à coups de mortiers, tuant 19 personnes et en blessant 17 autres.
J.N. AVEC LE MAXIMUM