Au pouvoir au Rwanda depuis le génocide de 1994, le président Paul Kagame n’a sans doute jamais été aussi bousculé que depuis la dernière agression orchestrée contre son voisin rd congolais par ses sbires sous le couvert du M23. Il faut dire que la dernière aventure de l’homme fort de la principauté militaire de Kigali est très mal tombée, parce que survenue quelques mois seulement après l’accession à la magistrature suprême de Félix Tshisekedi, le fils du légendaire opposant à la dictature mobutiste. Qu’il fragilisa par les seules méthodes pacifiques, facilitant involontairement la première agression rwandaise du Congo en 1996.
Contre ce voisin atypique et décidé à ériger la prospérité de son pays sur une prédation éhontée au détriment de la RDC avec l’appui de complices véreux dans les puissances occidentales, le nouveau chef de l’Etat congolais a d’abord choisi de reccourrir aux mêmes méthodes qui firent leurs preuves sous la dictature de la 2ème République, quelques années plus tôt : la dénonciation à haute et intelligible voix. Félix Tshisekedi et son gouvernement exploitent toutes les tribunes qui leur sont offertes pour dénoncer le gangstérisme de Kigali en RDC depuis près de 30 ans en ramenant à la surface les massacres des populations civiles dans le cadre d’un projet visant manifestement à démembrer le sous-continent congolais afin de s’emparer des ressources économiques dont il regorge. En attendant les succès militaires sur le terrain des affrontements, il semble que cette stratégie commence à produire quelques résultats encourageants.
Agression unanimement condamnée
A défaut de condamnations et de sanctions formelles contre Kagame et ses gros bras, qui bénéficient encore de la complaisance de leurs mentors dans l’hémisphère Nord de la planète, l’agression du M23 fait de plus en plus l’objet d’une condamnation unanime aujourd’hui en dépit du déploiement de la machine diplomatique du Rwanda sous de fallacieux prétextes identitaires qui ne trompent plus grand monde dans la quasi-totalité des capitales occidentales, de New York à Paris.
Comme un diable dans bénitier, Kagame et les membres de son establishment donnent quotidiennement des signes de malaise face à l’avalanche des accusations contre leur pays.
On le sait aujourd’hui mieux qu’hier, en RDC, Kagame joue la survie de son régime de terreur assis économiquement sur l’exploitation et l’exportation illégales des minerais du voisin dont son pays dépend à plus de 50 %. Raison pour laquelle ils jouent leur va-tout pour sauver la face et ne tiennent plus en place. Ainsi, lundi 20 mars 2023, le chef d’Etat rwandais a atterri à Doha (Qatar) pour une visite de travail dont la durée n’a pas été précisée, quelques heures seulement après avoir accueilli la ministre britannique de l’Intérieur, Suella Baverman à Kigali. Mardi 21 mars, il a eu des entretiens avec Cheikh Tamin bin Hamad al Thani, l’Emir du Qatar. Les deux parties ont passé en revue «les relations bilatérales entre les deux pays et les moyens de les approfondir et de les renforcer dans divers domaines de coopération, en particulier dans l’économie et l’investissement», selon la presse locale. Il est cependant de notoriété publique que le président rwandais est sur des charbons ardents en raison d’engagements commerciaux pris avec ce pays du Golfe portant sur l’exportation de minerais aurifère … de la RDC, dont une usine de transformation devrait être installée dans la capitale rwandaise en accord avec Kinshasa. Et que l’agression de la RDC par la coalition RDF-M23 a totalement remis en cause : Kinshasa a tout suspendu et Kagame ne sait plus comment rembourser les avances consentis par les qataris dans le cadre de cette coopération.
Sur des charbons ardents
L’homme n’est pas encore au bout de ses peines, d’autant plus que depuis le 3 mars dernier, le député congolais Edouard Mwangachuchu, présenté comme le plus grand exportateur du coltan congolais vers Kigali, a été arrêté par la justice congolaise qui lui reproche la constitution de caches d’armes pour les terroristes du RDF-M23 dans ses concessions minières de Rubaya (Masisi, Nord-Kivu). En attendant la fin de son procès par la haute cour militaire à Kinshasa, les activités de son entreprise minière ont été purement et simplement suspendues par la ministre des Mines, Antoinette N’samba Kalambayi. C’est grâce à la Société minière de Bisunzu (SMB, Sarl), propriété de Mwangachuchu, que l’essentiel de la production de coltan de la RDC était exporté quasiment sans contrepartie vers le Rwanda, selon plusieurs sources. Quelques semaines auparavant, Paul Kagame avait rencontré un envoyé spécial de l’Emir du Qatar dans le cadre de négociations qui ont également conduit ce dernier au Kenya, au Burundi et en Angola, dans le dessein manifeste de faire revenir Kinshasa sur sa décision de ne plus faire raffiner son or à destination de Doha à Kigali.
Dimanche 19 mars 2023, le dictateur rwandais, se pliant aux obligations que lui impose son rôle de factotum des Occidentaux dans la région a reçu la ministre de l’Intérieur du Royaume Uni, Suella Braverman, dans le cadre d’un curieux partenariat daté d’avril 2022 consistant à déporter contre rétribution vers son minuscule pays de la région des grands lacs des demandeurs d’asile jugés ‘‘problématiques’’ par Londres. Selon cet accord, les migrants illégaux au Royaume Uni seront transférés et réinstallés au Rwanda, un pays à très forte densité de population plutôt qu’en Grande Bretagne et le gouvernement britannique a déjà versé la bagatelle de 140 millions de Livres Sterling pour cette opération. La ministre britannique a profité de son séjour rwandais pour lancer un projet de logement de 60 milliards de Francs rwandais pour la construction de quelque 1.500 logements, pour les demandeurs d’asile, entre autres. Samedi 18 mars, Suella Braverman et Vincent Biruta, ministre rwandais des Affaires étrangères, avaient signé un avenant au partenariat susmentionné pour en élargir la portée «à toutes les catégories de personnes qui traversent des pays sûrs et effectuent des voyages illégaux et dangereux vers le Royaume Uni».
Folies meurtrières et sportives
Pourtant, cet accord a été vivement critiqué en Grande-Bretagne même. Pour se rendre à Kigali, la ministre conservatrice avait dû imposer un embargo de fait à la presse de droite, interdite de couvrir un voyage financé par des fonds publics.
Une initiative qui a fait scandale, des organes de presse ayant pignon sur rue comme The Guardian, BBC, Mirror, Independent et i Newspaper ayant été frappé par cette mesure arbitraire.

Le sport a été également instrumentalisé pour couvrir les folies meurtrières de Kagame en faveur de ses maîtres occidentaux. On signale en effet le parrainage pour des millions USD du club anglais d’Arsenal en 2018, ainsi que l’accord de soutien du Paris Saint Germain en France et l’organisation d’événements comme le tournoi de la Ligue africaine de basket-ball en 2021, ou encore les championnats du monde de cyclisme sur route en 2025. Cette «blanchisserie sportive» de Kagame entraîne des dépenses exorbitantes à travers des «investissements ne répondant pas aux besoins immédiats de la grande majorité des Rwandais», assure l’opposante Victoire Ingabire qui s’insurge contre l’absence de tout retour sur investissement en l’espèce. Ce dont Paul Kagame n’a manifestement cure, puisqu’il s’est engagé dans la rénovation d’un stade de 25.000 places (c’est à peu près l’équivalent du stade vélodrome de Kintambo à Kinshasa), pour un coût estimé à 165 millions USD ; mais aussi la construction d’un parcours de golf de 18 trous conçu par le Sud-africain Gary Player (16 millions USD) ; un terrain de cricket, ce sport typiquement anglais (1,3 millions USD) ainsi qu’une arène de basket-ball de 10.000 places (104 millions USD). Il faut ranger dans cette véritable boulimie de dépenses sportives pour un pays quasiment sans sportifs la tenue à Kigali, il y a quelques semaines, du 73ème congrès de la FIFA qui a permis la réélection de Gianni Infantino, seul candidat au poste de président de l’instance faitière mondiale du football. Du vernis pour couvrir la puanteur criminelle.
J.N. AVEC LE MAXIMUM