Après les propos controversés de l’ambassadeur de France aux Nations Unies et chef de la délégation du Conseil de sécurité en RDC, Nicolas de Rivière, la Cellule de communication du ministère des Affaires étrangères a fait remonter à la surface le témoignage d’un des témoins privilégiés de la genèse de l’insécurité dans la partie Est du pays. Il s’agit de celui du premier ministre de l’ex- Zaïre au moment du génocide rwandais, Léon Kengo Wa Dondo.
Les propos à la Ponce Pilate du diplomate français ne passent pas dans l’opinion publique congolaise. Nicolas de Rivière a notamment déclaré que «les Nations Unies ne vont pas régler les problèmes {sécuritaires congolais} de manière magique ».
Au nom du gouvernement, le chef de la diplomatie congolaise, Christophe Lutundula Apala, s’est insurgé contre cette forme de cynisme de la communauté internationale.
Il a tenu à le rappeler au cours d’un briefing avec son collègue de la Communication et Médias consacré lundi dernier à la crise sécuritaire dans l’Est de la RDC en martelant que cette dernière «remonte à la demande onusienne faite au gouvernement congolais d’acceuillir les réfugiés rwandais». Et en notant qu’à l’époque des faits (6 juillet 1994 – 2 avril 1997), le 1er ministre en place, M. Léon Kengo Wa Dondo en fut un des témoins directs.
Dans une interview réalisée il y a quelques années, Léon Kengo Wa Dondo s’était longuement répandu à ce sujet sur ce qu’il considérait rien moins qu’un double jeu de la communauté internationale.
«Lorsque je décide avec mon gouvernement que tous les réfugiés devaient quitter le territoire de mon pays au plus tard le 31 décembre 1995 et que le président Mobutu me dit de prendre une position contraire, je reçois de la communauté internationale, le secrétaire général des Nations Unies, le sous-secrétaire d’Etat de l’administration américaine du président Georges Bush, ainsi que le directeur-Afrique des messages me pressant de suivre la voie indiquée par le président Mobutu. Tous me disent de pas m’opposer au président sur ce chapitre, alors que toute la population du Kivu avait mobilisé ses propres moyens de transport pour aider les réfugiés rwandais à rentrer chez eux», a-t-il témoigné.
Léon Kengo Wa Dondo est convaincu que «la vérité, c’est que la communauté internationale ne voulait pas, alors qu’elle avait elle-même par deux résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies voté le déploiement des forces multinationales qui devaient constituer le couloir de sécurité pour permettre aux réfugiés de rentrer dans leur pays dans la paix et la dignité, fait volte-face en revenant sur ces résolutions sans que ces dernières n’aient aient été anéanties par d’autres résolutions».
L’ancien 1er ministre du maréchal Mobutu a poursuivi son témoignage en déclarant que «le vrai problème se pose en ces termes ci: si les réfugiés étaient rentrés dans la paix et la dignité, que le secrétaire général des Nations Unies ne cessait de le répéter, ils allaient récupérer leurs biens, leurs maisons et aller exiger des élections et en vertu des dispositions de la Charte des Nations Unies, un homme une voix, les Hutus allaient revenir au pouvoir».
Avant de souligner que «la communauté internationale était d’accord avec Paul Kagame et son pouvoir qui ne voulaient pas de cela, car elle avait le génocide sur la conscience et devait s’en décharger d’une manière ou d’une autre».

Plus loin, Léon Kengo Wa Dondo a indiqué avoir fait de son mieux pour imposer le retour des réfugiés rwandais dans leur pays, mais qu’à chaque fois, la communauté internationale ne voulait rien entendre. «J’ai pris contact avec le secrétaire général de l’ONU par deux fois. Il avait été entendu que je devrais convaincre les membres permanents du conseil de paix et de sécurité pour qu’ils donnent de l’argent de façon à permettre que les réfugiés militaires et civils séparés puissent être installés loin de la frontière conformément à la Convention de Genève et la Convention de l’OUA. J’ai montré les sites à la Commission des Nations Unies qui a été dépêché auprès de mon gouvernement. La commission a visité les sites Lokandu, Irebu et Kongolo, mais lorsqu’elle a fait son devis du coût de l’opération, le secrétaire général a trouvé que c’était trop cher pour le faire et on n’a jamais séparé les militaires de civils comme exigé par mon gouvernement», a martelé celui qui, au soir de sa vie, ne se reproche rien, convaincu que la responsabilité de la crise sécuritaire dans l’Est de son pays incombe principalement à la Communauté internationale représentée par l’ONU.
JK