Ordures abandonnées sur la chaussée, trottoirs hideux, nids-de-poule, commerces sauvages … jamais la capitale Kinshasa n’a été aussi sale et bruyante. Bien que les responsables urbains nient la réalité.
Interpellé par la chambre haute du parlement, le gouverneur de la ville Gentiny Ngobila est accusé de faire la sourde oreille. La polémique au sujet de la saleté de Kinshasa s’est accentuée depuis ce début de saison pluvieuse.
En effet, après chaque pluie, la capitale congolaise est submergée par des inondations qui dégradent la chaussée. Sachets, bouteilles en plastique, bouchage des canalisations et des égoûts, la mégapole est méconnaissable après chaque averse. Ce qui pose problème pour une ville qui se veut moderne.
D’aucuns au Sénat accusent le gouvernement provincial de la capitale d’amateurisme et de bricolage. Les plus modérés parlent de tâtonnement de saupoudrage. Pour Gentiny Ngobila lui-même, le projet Kin-Bopeto qu’il a initié n’a pas échoué, quoiqu’en disent ses détracteurs.
Quoiqu’il en soit, il y a des sérieux dysfonctionnements, notamment dans la gestion des ordures. Devant les bureaux de l’hôtel de ville, un lac artificiel se crée chaque fois qu’il pleut abondamment. «S’il n’a pas le courage de nettoyer devant sa propre cour, peut-il le faire ailleurs», déclare un de ses opposants à l’Assemblée provinciale. Qui pointe en plus l’insuffisance de l’éclairage public. «Même lorsque les lampadaires ne fonctionnent plus, le gouverneur n’agit pas et n’ordonne pas à ses services de les remplacer. Une route peut être éclairée aujourd’hui et deux semaines après, se trouver plongée dans l’obscurité totale. Cela ne l’émeut pas», ajoute-t-il comme pour donner raison aux sénateurs pour qui Kinshasa apparaît comme un bien abandonné sans aucun tableau de bord.
Réquisitoire des kinois contre le gouverneur
Plusieurs kinois jugent que Kinshasa est trop sale et offre l’image d’une capitale défigurée le trop plein d’immondices. Tout le monde ici, y compris le président de la République, les députés nationaux et sénateurs, dénoncent cette insalubrité et les incivilités qui caractérisent cette mégapole de plus de 12 millions d’habitants.
Ainsi, le speaker du Sénat, Bahati Lukwebo, a déploré l’«insalubrité inouïe» qui caractérise la capitale. «Tout se résume en seul mot, l’impunité. Ce que nous vivons, c’est l’impunité. Tant qu’on ne punit pas, c’est-à-dire on ne met pas en exécution les règlements qui existent et bien, nous irons toujours en reculant. Le visage qu’offre notre capitale, surtout lorsqu’on rentre de l’extérieur, n’est pas du tout reluisant. Telles que les choses se présentent aujourd’hui, je peux dire sans me tromper que mon village Katana est plus propre que la ville de Kinshasa. Dans mon village natal, on respire de l’air frais, il y a de l’eau, de l’électricité, des routes et des espaces verts. En plus tout est urbanisé», a-t-il ajouté.
Quand les étrangers débarquent dans la ville, l’image de la commune de Kimbanseke, mitoyenne à l’emblématique boulevard Lumumba qui les accueille, est des plus pitoyables. C’est un véritable capharnaüm où les petits vendeurs à la sauvette étalent leurs produits à même la boue ou sur la chaussée même quand il pleut. Tout le monde voit cela mais la police et les autorités urbaines restent indifférentes et inactives.
L’opération Kin-Bopeto, lancée par le n°1 de la ville de Kinshasa semble n’être jamais passée par là, à moins qu’il ne sache pas que c’est à lui qu’il revient d’entreprendre, de mobiliser et de sensibiliser une population manifestemment peu réceptive aux règles élémentaire d’urbanisme.
“Kin-Bopeto”, “Gombe-Bopeto”, autant de projets qui prennent dans ces conditions les allures de slogans creux dans l’imaginaire collectif des usagers des emprises publiques dans la capitale.
Pas étonnant que les critiques fusent de partout contre les responsables de la police au sein du gouvernement et le gouverneur de cette ville-province destinée à servir de miroir de la RDC.
Des projets importants comme le réaménagement du grand marché (Zando) sont jusque-là à l’abandon au grand dam des kinois qui s’interrogent sur la date de leur livraison.
«Rien ne va dans cette ville. Nous ne savons pas ce que fait Ngobila, nous avons l’impression que c’est un figurant à l’hôtel de ville, car aucun de ses projets n’a réussi. Il nous a vendu du vent depuis son arrivée à la tête de la ville. Nous vivons dans les ordures, quand il pleut la capitale est méconnaissable, pas d’endroits où mettre le pied», vitupère un membre de la société civile habitant la commune de Ngaliema.
Le gouverneur de la ville de Kinshasa, mis ainsi sous une forte pression des oppositions locales et nationales qui le somment de réagir, fait porter la responsabilté de ces échecs sur ses bourgmestres qu’il accuse de n’avoir pas de plan de développement, chacun dans sa municipalité, alors qu’ils reçoivent une rétrocession du gouvernement provincial.
La plupart des bourgmestres rétorquent que les moyens qu’ils recoivent ne sont que purement symboliques et ne peuvent pas leur permettre de s’acquitter convenablement de leurs tâches.
Par ailleurs, la corruptibilité extrême des services de police a installé dans la mégapole kinoise une culture négative qui consacre une sorte de loi de la jungle et une impunité généralisée. Conséquence : la colère est lisible dans la capitale où la population qui est obligée de payer chaque fois l’impôt, est contrainte de vivre dans des conditions d’insalubrité inacceptables.
HO