De la région de Beni au Nord-Kivu et de l’Ituri voisine où les FARDC appuyées par l’UPDF donnent la chasse aux rebelles ougandais de l’ADF et aux miliciens de la CODECO depuis le 9 décembre, les nouvelles sont plutôt bonnes. Même si ci et là, les forces négatives poursuivent leurs besognes macabres, enlevant et tuant sans âme de paisibles civils, leur désarroi est nettement perceptible. En Ituri, par exemple, le premier bilan rendu public au lendemain du déclenchement des bombardements et des pilonnages des positions rebelles, qui faisait état d’une trentaine de miliciens CODECO tués, et une dizaine d’autres miliciens capturée, appartient désormais au passé. Il faut y ajouter les défections et la débandade à vue d’œil dans les rangs de ces ennemis de la paix à l’Est du territoire de la RDC. Vendredi 10 décembre, les FARDC et l’UPDF ont publié un pré-bilan des opérations en cours, faisant état de 34 rebelles ADF capturés, 4 bivouacs détruits et 31 otages libérés.
Des sources dans la région rapportent que 35 combattants, 15 éléments CODECO et 20 ADF, se rendus lundi 13 décembre aux FARDC à Manzobe et Ndimo, des villages de la chefferie de Walese Vonkutu (Irumu). Selon Christophe Munyanderu de la Convention pour le Respect des Droits Humains (CRDH), les rebelles ont préféré déposer les armes et quitter la forêt devant la puissance de feu des forces conjointes FARDC-UPDF.
Diverses sources confirment cette débandade rebelle, dont l’administrateur du territoire d’Irumu, qui a également signalé les redditions de Manzole et Ndimo. Paul Babanu, un élu national d’Irumu a pour sa part signalé un mouvement des ADF vers l’Ituri, consécutif au pilonnage des positions ennemies dans le parc des Virunga. «Une colonne des ADF longe la route Walese-Vukutu avec l’intention manifeste de bloquer cette voie de circulation», a-t-il déclaré aux médias. « Lorsqu’on a commencé par ces plus grands bastions que sont Kamango, Mbau et d’autres au Nord-Kivu, nous nous attendions à ce que les rebelles fuient vers le territoire d’Irumu. C’est pourquoi nous avions demandé que les opérations militaires s’effectuent simultanément dans les territoires de Beni et d’Irumu », ajoute-t-il.
Nouveaux bombardements ciblés
Le début de la semaine en cours a, en effet, été marqué par le bombardement et le pilonnage des bastions ADF et CODECO hors du parc des Virunga. Dès lundi 13 décembre, des tirs à l’arme lourde ainsi que des bombardements ont été entendus dans la région de Beni. Les forces militaires coalisées UPDF-FARDC avaient lancé leur progression vers trois nouvelles positions rebelles, selon des sources militaires rapportées par la presse. Après que l’aviation UPDF eût déblayé le terrain grâce à ses bombardements aériens. Aux dernières informations, les ADF ont déplacé leurs bases vers les confins des provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri où ils occupent un certain nombre de villages riverains du parc des Virunga, notamment Mulango, Tondoli, Ibanda Semuliki et Batonga.
Par ailleurs, la destruction des sanctuaires ADF a livré d’importantes informations sur la nouvelle structure et le fonctionnement de ce groupe rebelle présent dans la région depuis plusieurs décennies. Ainsi que l’avaient déjà révélé de nombreux rapports, les rebelles ougandais auto-financent la guerre grâce au commerce du bois local avec l’Ouganda et le Kenya. Outre Musa Seka Baluku, déjà connu, le groupe est commandé par Nasser Abdu Hamid Djiru (opérations) depuis 2014. C’est le planificateur des différentes attaques ADF.
Secrets des sanctuaires rebelles
A également été formellement identifié, Elias Seguja, troisième personnalité du mouvement rebelle. Celui qui opère dans la région de Beni sous le sobriquet de « Fezza » est chargé du commandement des opérations sur le terrain. A ses côtés, Cheik Lumisa assure la formation idéologico-religieuse des recrues, tandis que Abdulrahman Waswa alias « PC Sentogo », chef de la police et responsable de la discipline et en même temps le juge suprême des ADF chargé de l’application des peines au sein du mouvement.
En raison de l’indisponibilité manifeste de Moussa Seka Baluku, le chef ADF dont on est sans nouvelles depuis plusieurs mois, c’est un ancien imam de la mosquée de Katindo (Goma), Zakaria Amuli Banza Souleymane, qui aurait repris les rênes de la rébellion. Né à Munigi en août 1982, Zakaria Amuli Banza effectue des études de mécanique auto avant d’être nommé imam à Katindo et de parfaire sa formation coranique à Mombassa (Kenya). A son retour au pays, il intègre les ADF et se charge de la formation des jeunes au maniement des armes et à l’étude du Coran, révèle Nicaise Kibel Bel Oka, un confrère spécialiste des conflits armés de l’Est de la RDC. Interpellé puis arrêté par les FARDC il y a quelques années, l’imam Zakaria Amuli a été jugé et condamné par la cour militaire opérationnelle de Beni, avant de s’évader à la faveur d’une attaque des Mai-Mai contre la prison de Munzenze à Beni, selon la même source. Il a réapparu, une dizaine de jours après le déclenchement des attaques conjointes UPDF-FARDC, grâce à une vidéo qui le présente assurant le réarmement moral et religieux des troupes ADF.
Interdiction de bombarder les otages
Ce tableau plus ou moins reluisant sur la traque des rebelles ADF et des milices CODECO est néanmoins terni par la mission onusienne en RDC. En séjour à Bunia, mardi 14 décembre, Bintou Keita, le cheffe de la MONUSCO a relancé les débats sur la mutualisation des forces entre la RDC et l’Ouganda. Au cours d’un point de presse, la représentante spéciale du secrétaire général des Nations-Unies a déclaré que « pour nous, ce qui est important, c’est qu’il y ait une coordination tripartite entre la force onusienne, les FARDC et l’UPDF et c’est là où il y a vraiment notre intérêt. Parce qu’il va falloir faire en sorte que dans cette coordination, qu’il n’y ait pas des dommages collatéraux et que la question de la protection des civils qui est au cœur de notre mandat soit au premier plan de la gestion des risques ». Priorité à la protection des civils d’effets collatéraux des bombardements par rapport aux priorités de protection et de défense du territoire national semble donc être le mot d’ordre mis en œuvre par la MONUSCO. Où on ne se prive d’exercer une sorte de chantage sur les autorités Congolaises. Au cours du point de presse hebdomadaire de la mission, mercredi 15 décembre, A. Thioye, porte-parole onusien et directeur du BCNUDH, a ainsi soutenu que « les bombardements indiscriminés peuvent avoir causé des dommages collatéraux, c’est-à-dire, porter atteinte à la vie et à l’intégrité physique des personnes qui sont avec les ADF contre leur gré ». Avant d’annoncer que l’ONU va « documenter d’éventuels violations des droits de l’homme ». La MONUSCO exige quasiment que les personnes retenues par les ADF soient prévenues des pilonnages et des frappes à venir, autrement dit. Avec elles, leurs ravisseurs ADF.
« Il n’y a pas meilleure façon d’entretenir l’enlisement de la situation sécuritaire en RDC », s’indigne un cadre du RCD-K-ML, un ancien mouvement rebelle proche de Kampala qui gouverné la région au début des années ‘2000. Il n’est pas seul. Après de nombreux autres leaders d’opinion du Nord-Kivu et de l’Ituri, Antipas Mbusa Nyamwisi qui préside aux destinées de ce parti politique, a déclaré son soutien à la mutualisation des forces entre Kinshasa et Kampala. Mardi 14 décembre, à l’ouverture du 2ème congrès du RCD-K-ML qui se tient à Kinshasa, « Félix Tshisekedi tire le pays de l’enlisement et ouvre d’autres horizons dans la recherche des solutions durables au drame de l’Est ».
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