Le Chef de l’Etat, Félix-Antoine Tshisekedi, est attendu à Matadi, pour lancer les travaux du premier forum énergétique de la RDC.
Quelle nouveauté apportera ce forum sur le chapelet des recommandations des colloques, séminaires et ateliers sur l’électricité, proposées au gouvernement ces 15 dernières années? L’électricité incarnée en RDC par la SNEL, rappelle un apophtegme de Conrad sur le futur Congo-belge, «le cœur des ténèbres». Tout est ténébreux, plutôt en clair-obscur, pour les moins pessimistes des analystes de la gestion du secteur de l’énergie électrique rd congolais. Que des questionnements ! Que valent les experts recrutés à prix d’or pour relancer la SNEL ? Quid des recettes réalisées par cette entreprise d’autant plus que tous ses investissements à Kinshasa et Inga sont financés par la Banque africaine de développement (BAD), la Banque Mondiale, la Banque européenne d’investissement ou la banque allemande KFW.
La RDC est devenue depuis quelques années importatrice de courant électrique auprès des pays auxquels elle en fournissait, notamment la Zambie et le Congo B. La RDC recherche derechef les financements pour Inga III, notamment auprès de la BAD et des USA, alors que quelques semaines avant les élections de décembre 2018, les deux firmes espagnole et chinoise retenues pour la construction de la centrale de 4.8000 MW avaient signé un document commun aussitôt transmis en haut lieu.
18 ans après Kabila
Les experts rappellent, en effet, que quelques semaines seulement après sa prise de fonction de président de la République après la mort tragique de son père, Joseph Kabila avait initié un séminaire-atelier (23-25 mai 2001) sur la réforme du sous-secteur de l’électricité. Un comité de suivi de cette réforme composé notamment des ministres et délégués de diverses institutions avait été mise en place. Résultat : les Congolais ont découvert le phénomène de délestage qui aura plus tard un pendant, l’étiage. Dix-huit ans plus tard, fin mai 2019, le nouveau chef de l’Etat, Félix Antoine Tshisekedi, a reçu un groupe d’investisseurs prêt à injecter quelques 120 millions USD dans le d’électricité. Selon l’Ir. Jean-Bosco Kayombo, DG de la SNEL, le centre des affaires, la commune de la Gombe, est singulièrement ciblé par cet investissement. Certaines grandes agglomérations de l’arrière-pays dont Mbandaka bénéficieront quant à elles de l’énergie solaire. Il sied de relever que la REGIDESO est également destinataire de l’investissement promis à Tshisekedi. Mais, de l’avis des analystes, le renforcement de la desserte électrique de la commune de la Gombe et de l’électrification des capitales provinciales par le solaire ont déjà fait l’objet de contrat de financement.
En effet, le gouvernement de la RDC, à travers son ministre des Finances Henri Yav Mulang et la BAD s’étaient accordés il y a près de 3 ans sur le Projet d’appui à la gouvernance et l’amélioration du secteur de l’électricité (PAGASE). Ce projet ciblait les 5 communes du centre de Kinshasa (Gombe, Barumbu, Kinshasa, Lingwala et Kasa-Vubu). Il consiste à améliorer la gouvernance du secteur de l’électricité, à répondre aux attentes de la clientèle SNEL ainsi qu’à anticiper les besoins d’électrification des ménages et des activités productives à moyen et long terme, avait fait comprendre M. Komate Ibrahim, chargé de projet énergie en Afrique centrale au sein de la BAD, lors de la signature du contrat. Le coût du projet, avait-il indiqué, était de 135 millions USD. Ce responsable en charge du programme de la région Afrique Centrale a ajouté que le projet devait contribuer également à l’implantation d’un dispositif de nouvelles ressources d’énergie fournies à la ville et permettre aux réseaux de distribution des communes sélectionnées d’être totalement assainis.
Ribambelle de projets sans lendemain
Près de trois ans après, la desserte en courant électrique ne s’est guère améliorée, même à Gombe où la Primature s’est retrouvée plus d’une fois privée de courant électrique. Sur les avenues commerçantes, Marais, Commerce, Ecole…-, des vrombissements des groupes électrogènes sont devenus fait courant. Que sont donc devenus les 135 millions USD de la BAD? Eric Mbala, le prédécesseur de Kayombo, avait été révoqué à cause de cette situation. Depuis lors, même la BAD ne fait plus écho de PAGASE dans ses rapports.
Il y a peu, à l’occasion d’un atelier sur les financements des institutions financières internationales en faveur de la RDC, des associations de la société civile ont rejeté un rapport de la Banque Mondiale qualifié de complaisant, notamment, en ce qui concerne le secteur de l’électricité.
Ces 20 dernières années, ce secteur a en effet connu une dizaine de projets avec des financements garantis dont le PMURR, EDIRA, PMEDE, SAPMP, etc., mais aucun n’a produit de résultat palpable alors que des fonds importants y ont été engloutis. Aucun audit sérieux ne semble avoir suivi et des documents y relatifs ont été officiellement déclarés perdus, à l’image du contrat conclu entre la SNEL et Mag Energy. Ces deux dernières années, au moins trois projets d’électrification des agglomérations de l’arrière-pays par le solaire ont été adoptés par le gouvernement.
Energie solaire
Juillet 2017, la firme Proton et la Primature avaient convenu d’électrifier 12 chefs-lieux de provinces au solaire. Un mois plutôt, le ministre sortant du Développement rural, Justin Bitakwira, avait engagé l’Etat dans un partenariat avec la firme BBOXX, « notre partenariat exclusif consiste à donner l’électricité à plus de 2,5 millions de congolais à travers la RDC d’ici 2020 », avait-il déclaré. Le projet s’est à ce jour limité à quelques foyers à Menkao, banlieue-Est de Kinshasa.
Novembre 2018, Weast Trading a signé une convention avec l’Etat pour alimenter, toujours au solaire, 10 villes de l’arrière-pays, dont Mbandaka. La singularité commune de tous ces projets est que le coût financier relève du secret d’Etat.
Après avoir pris part, fin avril 2018, à Abu Dhabi (Émirats Arabes Unis), au Forum international de l’Alliance solaire internationale, le ministre de l’Énergie et Ressources hydrauliques, Jean-Marie Ingele Ifoto, avait installé, fin mai, l’Institut national de l’énergie solaire (INES). Cette action s’inscrivait dans le cadre de la visée stratégique du gouvernement d’une exploitation généralisée de l’énergie solaire, avait-t-il indiqué. Une mission d’experts du gouvernement a été dépêchée en provinces pour identifier les sites des premières centrales solaires pour une production de 45 KW dans les six prochains mois, avait-il ajouté. Une année après, on n’a rien vu venir.
En 2016, l’État avait prévu 16.5 milliards FC pour électrifier le chef-lieu de l’Équateur, sans suite. Puis 3.5 milliards FC en 2017, toujours rien. L’électrification de Mbandaka n’a pas été prévue dans le budget 2018. En 2019, l’électrification de cette ville est reprise dans le budget de l’Etat. Plus de six mois après, le chantier n’a toujours pas démarré.
POLD LEVI MAWEJA