Déogratias Mutombo a sans doute pris la température de la Chambre basse à la suite de la question orale posée au Premier ministre Matata sur son plan quinquennal. Il sait à quoi s’attendre, le Gouv de la BCC. Le député Jean-Lucien Bussa, auteur d’une question orale sur la BIAC, ira des mazarinades en philippiques le jour J. A Aubin Minaku de le fixer. Mais dans l’entre-temps, la situation monétaire augure plutôt des «jours noirs».
Le taux change a franchi le seuil névralgique de 1 dollar pour 1.000 FC. L’injection, derechef, par la Banque centrale du Congo, BCC, d’une bagatelle somme de 10 millions de dollars pour juguler la descente aux enfers du FC a plutôt produit des effets contraires, jusque-là.
Sur les 10 millions de dollars largués sur le marché par la BCC, seulement six millions ont trouvé preneurs. Les banques commerciales, particulièrement, ne semblent guère trouver opportun de se mettre des dollars pleins les caisses. Le trop plein des Francs congolais sur le marché dont parle la Banque centrale pour justifier la dégringolade de la monnaie nationale face aux devises, laisse donc sceptiques plus d’un expert.
Michel Somwe, professeur d’économie, ancien DG de la Banque des crédits agricoles et ex-cadre de la Banque centrale du Congo en charge des banques commerciales en difficultés, se demande bien si la crise du dollar ne serait pas sciemment orchestrée les décideurs. L’on se souviendra que la Banque centrale avait précédemment injecté 50 millions de dollars sur le marché, sans pour autant parvenir à stabiliser le taux de change de FC face au dollar. Analyse d’experts, le taux de change en RDC relève plutôt d’une décision administrative, politique, que des données économiques et financières. Le gouvernement s’y est employé pratiquement ces cinq dernières années avec un taux de 920 FC/$. Et pourtant entre 2009 et 2011, différents budgets successifs votés au Parlement prévoyaient le taux de change à plus de 1.000 FC/$ à fin période.
Il sied de rappeler que le Fonds monétaire international avait plus d’une fois convié le gouvernement à opter pour un taux flottant. En vain. Le gouvernement s’est ravisé un peu trop tardivement en optant un taux de change à l’incertain…plutôt sous contrôle, notamment de la fameuse Troïka économique qui s’est réunie chaque lundi sous la houlette du Premier ministre, Matata Ponyo, en personne.
L’autonomie de la Banque centrale du Congo s’en trouve visiblement érodée. Michel Somwe évoque par exemple l’injonction faite par le gouvernement à la BCC de financer la BIAC. Mais le système bancaire a vu sa crédibilité s’écorner vis-à-vis de l’opinion publique. A ce jour, il ne faut pas nécessairement être expert ès finances pour constater qu’il s’est effondré tel un château de sable, le cadre macroéconomique cher à Matata Ponyo. Alors que le taux de change à fin 2016 était projeté à 939 FC/$, il est actuellement à plus de 980FC/ $. Le taux d’inflation moyen fixé à 3,4% se fonde en réalité sur 7 marchés de Kinshasa dont celui Gambela et de Matete. Sa crédibilité demeure donc sujette à caution. Les réserves de change de la RDC ne seraient plus que d’un petit 1.32 milliard de dollars couvrant 5 semaines d’importations des biens et services contre la moyenne SADC de 12 semaines. Parmi les faits qui fragilisent l’économie nationale, selon le récent rapport de la Banque mondiale, 86% des dépôts et 91% des crédits en dollars. Cette tendance laisse peu de marge à la Banque Centrale du Congo pour mettre en œuvre une politique monétaire efficace. Pourtant, il sied de le rappeler, le dollar a permis d’amortir et de surmonter la grave crise des liquidités apparue à la fin des années 1970-90, lorsque le phénomène de thésaurisation des billets de banque qui sous-tend cette dollarisation avait vu le jour. Depuis, le dollar a cours légal et régente le marché. Le dollar américain reste, en effet, la monnaie de référence sur le marché des changes : 87% des transactions se font, en effet, en dollar contre près de 13% en Franc congolais. En tout cas, l’attitude des banques commerciales- plutôt frileuses à racheter les dollars mis sur le marché par la BCC- laisse à croire qu’il n’ y a pas carence de dollars sur le marché ou qu’il y a trop des FC.
POLD K.M. LEVI