Capitulation est le mot qui désigne un engagement écrit établi par deux nations belligérantes en vue de la reddition de la partie vaincue. Dans le cas de l’accord rwando-congolais en gestation à Washington DC, la capitulation de Paul Kagame, homme fort de la principauté militaire qui règne sans partage sur le Rwanda depuis 1994 ne fait l’objet d’aucun doute. Elle intervient en l’absence des renégats congolais du M23/AFC qui lui servent de supplétifs et restent ‘’wanted’’ en RDC, dans l’Union européenne et aux USA car personne n’entend laisser impunis les nombreux crimes de guerre et contre l’humanité qu’ils ont commis au Nord et au Sud-Kivu.
C’est l’administration américaine du président Donald J. Trump qui, par le secrétaire d’État Marco Rubio, a pris le 25 avril 2025, l’initiative de la signature de cet acte sur pied de la résolution 2773 du Conseil de sécurité des Nations-Unies dont les Etats-Unis sont un des big five. Premier contributeur au budget de la Monusco, l’Oncle Sam entend ainsi récupérer sa position de principal investisseur étranger en République démocratique du Congo que la Chine lui a ravie au cours de ces dernières années.
Conscient des conséquences néfastes de la mauvaise gouvernance des technostructures sécuritaires par les régimes qui l’ont précédé, le président de la République Félix Antoine Tshisekedi a pris la résolution de ne plus admettre les pis-aller que furent le mixage et le brassage des groupes armés irréguliers au sein des forces de défense et de sécurité qui ont facilité l’infiltration en leur sein de renégats et criminels sans foi ni lois.
L’universitaire congolais Godé Mpoy Kadima applaudit des deux mains cet accord RDC-Rwanda, qui, à son avis « relève de l’économie politique internationale et ne devrait pas être l’objet de polémiques. Suite à la crise actuelle de la mondialisation, un nouvel ordre global est en gestation alliant ‘hard power’, ‘soft power’ et ‘smart power’. Il est normal que, confronté à un sérieux déficit de la balance de paiement face à la Chine et à l’Europe, le président Trump soit en quête de ressources naturelles supplémentaires. Le deal USA-RDC apparaît dans ce contexte comme une rencontre d’intérêts selon le poids de chacun des protagonistes. C’est une voie idoine pour faire échec à l’agression rwandaise. Ceux qui crachent là–dessus en brandissant l’allusion à la chaîne des valeurs ont tort car ils confondent ce concept à un partage des richesses». Ce brillant économiste recommande seulement que Kinshasa insiste sur le respect des résolutions relatives au retrait sans conditions de l’armée rwandaise des provinces orientales congolaises.
Au nom du gouvernement congolais, la Cheffe de la diplomatie Thérèse Kayikwamba Wagner a bûcheronné sur les exigences de Kinshasa, notamment : le respect de l’intégrité territoriale de la RDC et le retrait inconditionnel de l’armée rwandaise des provinces de l’Est (Nord-Kivu et Sud-Kivu). Elle estime que cet accord n’est qu’une étape nécessaire vers la paix et appelle à une mise en œuvre fondée sur la responsabilité et des actions concrètes. «Aujourd’hui ne marque pas une fin, mais un commencement. C’est une étape qui revêt un poids particulier pour la République démocratique du Congo à Goma, à Bukavu et au-delà où la réalité du déplacement, de l’insécurité et de la souffrance persiste. L’urgence de cette initiative n’est pas théorique. Elle est humaine. Dans la région des Grands Lacs, la paix doit venir en premier, suivie de la reconstruction de la confiance, puis la réouverture prudente d’un chemin vers une coopération bilatérale significative, uniquement lorsque les conditions seront réunies (car) l’échec d’efforts passés a été causé par le non-respect de l’ordre des étapes et l’ignorance de la redevabilité. Les bonnes intentions ne suffisent pas. Il faut de la responsabilité, des engagements clairs, des échéances mesurables et des conséquences en cas de non-respect», a-t-elle précisé.
Elle a salué le leadership des États-Unis d’Amérique et exprimé sa gratitude à Marco Rubio et au conseiller principal du président Trump, Massad Boulos, dont les consultations régionales ont, selon elle, «apporté de la nuance, de la profondeur et une dimension humaine à ce processus». Avant de souligner que la RDC appréciait «les initiatives soutenues par les États-Unis qui promeuvent des chaînes de valeur des minerais sécurisées et une croissance économique inclusive car la paix et la prospérité sont indissociables. Chaque pas vers la stabilité est un pas vers la dignité, vers l’emploi et vers l’éducation».
Aux Congolais, notamment ceux de l’Est, Thérèse Kayikwamba Wagner a dit comprendre leur scepticisme : «Nous savons que vous suivez ce moment avec inquiétude, avec espoir, et oui, avec scepticisme. Et vous avez raison d’attendre plus que des promesses. Vous avez droit à des actions à la hauteur des souffrances endurées. Notre souveraineté et notre territoire ne sont pas négociables. Les frontières que nous avons héritées, telles que confirmées par l’Union africaine, sont permanentes et ne changeront jamais. Mais au-delà de ces lignes, il y a des histoires partagées, des familles et des communautés qui nous lient. La paix n’est pas une faiblesse, c’est une force. Nous sommes déterminés à aller de l’avant, en nous appuyant sur les leçons du passé».
La déclaration de principes signée par Kinshasa et Kigali met en avant le processus de paix, la préservation de la souveraineté nationale et de l’intégrité territoriale de la RDC, la stimulation du développement local et l’appui aux efforts de stabilisation de la Monusco. En l’acceptant, l’homme fort de Kigali reconnaît avoir échoué dans ses stratégies hégémonistes et prédatrices qui ont mis à feu et à sang toute la région des Grands Lacs au cours de ces trente dernières années.
Une capitulation que l’on doit à la persévérance et à l’opiniâtreté de Félix Antoine Tshisekedi Tshilombo.
Jacques Ntshula
Avec Le Maximum