L’ancien ministre de l’Intérieur et actuel député national, Daniel Aselo, semble être pris à son propre jeu. Alors que la Justice et les services de sécurité font état, avec des preuves accablantes, d’actes criminels perpétrés par des hommes sous son ordre dans le territoire de Lodja (Sankuru), il s’est fendu d’une correspondance accusant auprès du procureur général près la Cour de cassation, le procureur général du parquet général près la Cour d’appel du Sankuru, Samy Bunduki Baobolia, de jeter le discrédit sur l’appareil judiciaire en harcelant ses partisans «membres de l’UDPS». Cité dans cette correspondance dont la presse s’est fait l’écho, l’homme d’affaires Daniel Edjenge Kokombo a promptement répliqué, en dénonçant «des allégations mensongères et diffamatoires».
Est ainsi pris qui croyait prendre. Daniel Aselo, avocat de son état et ancien vice-premier ministre en charge de l’Intérieur, n’a manifestement pas mesuré les conséquences de sa «dénonciation». Ce que l’on conçoit bien s’énonce aisément, dit-on.
Ainsi, Aselo a affirmé que le procureur général Bunduki de la Cour d’appel du Sankuru serait «pris en charge par un petit commerçant, installé à Kinshasa, Edjenge Kokombo Daniel, candidat malheureux sur la liste de la CCU aux élections législatives nationales de décembre 2023» et que ses prétendus bienfaiteurs l’utiliseraient pour «tracasser, violenter, faire arrêter et emprisonner les natifs du secteur de Lukfungu qui ont vomi la CCU et son leader».
Problème : un haut magistrat du niveau de Bunduki
peut-il vraiment être pris en charge par un «petit commerçant», alors qu’il émarge du budget de l’État?
Deuxième couac : Daniel Aselo prétend avoir été l’objet d’une tentative d’assassinat en octobre 2023 et accuse le PG Bunduki d’avoir libéré ses agresseurs présumés. Du mensonge tant il est connu de tous à Lodja que c’est plutôt lui-même Aselo, alors candidat député national, qui a terrorisé ses adversaires, faisant tabasser leurs partisans en privatisant des villages entiers à Lodja lors des dernières législatives nationales.
On en veut pour preuve que jusqu’à ce jour, des motos arborant ses effigies en lieu et place d’une plaque d’immatriculation circulent encore à Lodja.
Pire, Aselo a encore prétendu que son nom était «préssenti probable ministre de la Justice dans le gouvernement Judith Suminwa» (sic !), insinuant que le PG Bunduki qui voyait mal les perspectives de devoir lui faire allégeance. Bunduki aurait alors tout fait pour le salir et l’empêcher d’être élevé à cette fonction.
Quand le ridicule ne tue pas
Au mépris des principes constitutionnels de la séparation des pouvoirs et de l’indépendance de la justice, Daniel Aselo recommande au PG près la Cour de cassation de procéder à la mutation de ce magistrat qu’il considère comme une menace pour ses intérêts politiques.
Mise au point de Daniel Edjenge Kokombo
En réaction aux accusations de Daniel Aselo, Daniel Edjenge Kokombo a, dans une lettre adressée au PG près la Cour de cassation, démonté méthodiquement les allégations de Daniel Aselo. «Le secteur de Lukfungu, dont l’honorable Daniel Aselo et moi-même sommes ressortissants, a toujours vécu en paix, jusqu’à la nomination de ce dernier au gouvernement de la République en qualité de vice-premier ministre, ministre de l’Intérieur en 2021. Depuis lors, usant de cette élévation pour imposer son ‘pouvoir’ par la terreur, il avait créé un groupe de gros bras dirigés par ses proches dénommés Papy Dimandja, Ohomo Ewala Dovel et Tshimanga sous la supervision de sieur Wasase Odunda Joseph qu’il nomma chef dudit secteur. Ces malfrats qui insécurisent les habitants ayant soutenu les concurrents de monsieur Aselo Okito aussi bien avant, pendant qu’après la campagne des élections législatives de fin 2023 ont notamment assassiné pour ce motif le chef coutumier Adalbert Lomana Kasongo (groupement Dolo) le 13 juillet 2023, bien longtemps avant l’affectation au Sankuru du procureur général Bunduki Baobolia Samy sur lequel il déverse aussi sa rage», a-t-il révélé sans oublier d’autres actes criminels perpétrés selon lui par les partisans de Daniel Aselo. «Ses efforts décousus pour lier ce haut magistrat à des personnalités comme l’honorable Lambert Mende Omalanga, élu sur la liste de AE (et non de CCU) qui du reste n’a jamais eu à rencontrer le magistrat Bunduki Baobolia Samy, de même que sa curieuse requête exigeant la mutation de ce dernier confirment à mon avis qu’il est bien l’auteur intellectuel des actes criminels susmentionnés qu’il tente ainsi de couvrir par un ignoble trafic d’influence et qu’il est un des vecteurs de la haine et de la division dans la province du Sankuru et dans l’Union sacrée de la nation du chef de l’État Félix Tshisekedi», a encore lâché Daniel Edjenge Kokombo.
Réponse du berger à la bergère
De son côté, le magistrat incriminé, Samy Bunduki Baobolia s’est posé la question de savoir si Daniel Aselo avait le plein contrôle de ses facultés intellectuelles au moment où il écrivait sa lettre au PG près la Cour de cassation.
« Au sujet des arrestations dont question, vous n’avez pas renseigné dans votre correspondance que ces criminels arrêtés et ceux recherchés ont commis les meurtres de deux personnes et incendié tout un village. Ceux qui sont arrêtés, sont aux aveux et parmi les fugitifs, l’un est votre propre petit frère et l’autre votre cousin et qu’ils ont été arrêtés dans votre résidence privée où ils sont allés se réfugier et que vous êtes personnellement intervenu pour solliciter leur libération», a-til rappelé à Aselo avant d’ajouter sarcastique : «je suis persuadé que les autorités qui vous ont lu, ont compris votre désarroi».
CP