Dans la région de Kanyabayonga au Nord-Kivu, les combats qui opposent la coalition RDF-M23 aux forces de défense de la RDC soutenues par les Wazalendo durent depuis le 28 mai 2024. Et tardent à tourner à l’avantage des assaillants qui visent cette commune rurale du territoire de Lubero, très stratégique pour la suite de la guerre du Nord-Kivu.
Kanyabayonga se situe à la limite entre le Grand Nord-Kivu, qui couvre la région de Beni-Butembo et Lubero, et le territoire de Rutshuru sous occupation de la coalition RDF-M23. La commune rurale, juchée sur une colline, offre une vue panoramique de la partie Sud du parc des Virunga. Elle ouvre la voie vers la Rwindi, également sous occupation des assaillants, à une dizaine de km de là et à son aérodrome et permet de contrôler trois importants axes routiers : Rwindi – Mabenga, Kiwanja, Mabenga – Vitshumbi, et Rwindi – Kibirizi, côté Sud.
Au Nord, Kanyabayonga s’ouvre sur une route qui mène vers les agglomérations de Kirumba et Kayina ainsi que les grandes villes de Butembo et de Beni. D’où l’enjeu de l’attaque lancée par les terroristes M23-RDF : contrôler Kanyabayonga permettrait d’avancer leur dispositif militaire offensif vers le grand Nord et le petit Nord Kivu, tout en protégeant au mieux leurs arrières. Mais la résilience des forces de défense rd congolaises n’a pas permis la réalisation de ce dessein. Pas encore, jusqu’au moment où nous mettions sous presse.
Trois lignes de front pour faire tomber la cité
Pourtant, il s’en était fallu de peu, le 2 juin, 5 jours après le déclenchement de l’offensive sur Kanyabayonga. Sur trois lignes de front, la coalition RDF-M23 avait lancé des attaques vers l’entrée Sud-Ouest, de la commune rurale à Kilambo, sur la route Kanyabayonga-Nyanzale-Mweso sur la Nationale 2 Goma-Butembo ; ainsi que du côté de Burangiza. Grâce aux renforts reçus de Kigali et de Kampala, selon des sources locales, les assaillants avaient réussi à se rapprocher de Kanyabayonga, situé à quelques 2 km du front. Et à provoquer un début de déplacement des populations craignant les bombes habituellement larguées par les terroristes et leurs alliés sur des cibles civiles. Des détonations d’armes lourdes et légères se faisaient entendre en effet, dans cette bourgade densément peuplée du territoire de Lubero.
Lundi 3 juin, les affrontements se poursuivaient encore autour de Kanyabayonga assiégé mais demeuré sous contrôle des FARDC soutenus par les Wazalendo. Bien plus, les forces loyalistes avaient gagné du terrain, réussissant à éloigner le front sur certains axes. Notamment, sur l’axe Rwindi, où la position avancée des assaillants fut repoussée de 5 à 10 km; sur l’axe Lusoha également, les terroristes M23-RDF furent contraints de reculer de 6 à 9 km, selon des sources locales.
Au 4 juin, les affrontements à l’arme lourde se concentraient à Kabasha, Kinyamuyaza et Buchi bwa Nyama, des collines situées au Sud-Est de Kanyabayonga. Tandis qu’au Sud-Ouest, la positon avancée des assaillants se situait à 6 km de Kanyabayonga, à Kilambo.
Bombardement des cibles civiles
C’est à ce tournant marqué par la résistance de plus en plus farouche des forces loyalistes, et même de sérieuses velléités de contre-offensive, que les terroristes optèrent pour le bombardement de Kanyabayonga, faute de pouvoir progresser. Des bombes tombèrent à quelques mètres de la base de la Monusco, qui avait annoncé quelques jours auparavant son soutien aux forces de défense rd congolaises. Tandis qu’une autre frappait la base de troupes de la SADC et une autre encore, en pleine cité de Kanyabayonga.
Il reste qu’au 10ème jour, malgré le déclenchement de l’offensive par la coaliton RDF-M23, la commune rurale demeurait sous contrôle FARDC.
Galvanisés, les forces de défense rd congolaise reprenaient des positions aux assaillants, le 8 juin. Mirangi, Lusuli, Kyaghala et Yobora, à plus ou moins 35 km au Sud-Ouest de Kanyabayonga furent reconquis. Ce qui empêchait désormais tout soutien aux terroristes. Tandis que ces derniers maintenaient leur emprise sur les villages de Lusogha et Bulindi, situés entre les trois villages repris par les FARDC. Adoptant la tactique de débordement des assaillants, les forces de défense rd congolaises avaient réussi à désarticuler les colonnes des terroristes en progression vers la commune rurale.
Repoussés à 10 km de Kanyabayonga
Le 8 juin, l’évolution de la situation sur le terrain des affrontements s’avérait suffisamment rassurante. En témoigne, le retour progressif des populations civiles à Kanyabayonga, rapporté par la société civile locale. Au moins 8 quartiers de la partie Kanyabayonga du territoire de Lubero étaient concernés par ce mouvement de retour des populations. Et un peu moins dans la partie Bwito de la même commune rurale. «Le retour concerne au moins 50 % de la population. Ce mouvement est le résultat des opérations militaires menées dans cette zone, où aucun combat n’a été signalé ces dernières 48 heures», confiait Daniel Kamwanga, président de la société civile de Kanyabayonga, le 10 juin 2024.
Jeudi 13 juin 2024, les terroristes M23-RDF ont attaqué les positions FARDC-Wazalendo au village de Butalongola (Rutshuru), à une dizaine de km de Kanyabayonga. Des sources locales assurent que l’attaque a été repoussée et les affrontements s’éloignent davantage de la cité tout en se poursuivant dans le secteur. Les mêmes sources renseignent que le soutien de l’UPDF aux terroristes est de moins en moins discret.
Jusque-là, Kanyabayonga refuse de plier. Pourvu que ça dure.
J.N. AVEC LE MAXIMUM