Au Nord-Kivu, la cité de Sake à 20 km de Goma constitue le dernier verrou érigé par les FARDC soutenues par les casques bleus de la Monusco et les patriotes résistants Wazalendo. Les troupes sudafricaines venues dans le cadre de la SADC étant positionnées entre la cité et la ville volcanique.
Les assaillants RDF-M23 (ainsi que l’UPDF ougandais, selon certaines sources dans la région) multiplient des stratagèmes pour conquérir la cité de Sake depuis plusieurs semaines. Sans succès.
A défaut de prendre cette agglomération, les terroristes ont entrepris de la pilonner à la roquette. Pour en faire fuir les habitants qui n’ont d’autres issues que la route vers Goma que la coalition pro rwandaise essaie ainsi d’asphyxier pour y rendre la situation humanitaire ingérable. Depuis quelques jours, Sake est donc une ville fantôme où ne circulent que quelques intrépides décidés à en découdre avec les terroristes aux côtés des patriotes résistants Wazalendo et des FARDC.
L’effet escompté par les assaillants en provoquant des déplacements massifs de populations est sans pareil : les plaintes fusent de partout à travers le monde et les projecteurs sont braqués sur Goma et la région (les territoires de Masisi et de Rutshuru). Les pressions se multiplient en faveur de l’arrêt de ces atrocités et une résolution du conflit par des voies diplomatiques.
Stratégie de la ruse
Cependant, force est de constater que comme toute stratégie, celle mise en œuvre par les RDF-M23 qui appellent de tous leurs vœux à des négociations avec Kinshasa tient aussi de la ruse cynique. Parce qu’après les derniers affrontements, ce sont moins de 10 % de la province du Nord-Kivu (deux fois la taille du Rwanda) qui sont sous occupation. Et rien n’indique qu’ils le demeureront encore longtemps, ce qui n’arrange ni les finances ni le moral des phalanges de Kagame habitués à conquérir par blitz krieg de vastes espaces territoriaux en RDC depuis 1996.
Dimanche 11 février 2024, six personnes (4 hommes et 2 femmes) avaient ainsi été blessées par les éclats d’un obus à Sake. Un jour plus tôt, samedi 10 février, un autre tire avait détruit deux habitations du quartier Bikali dans la même cité. Lundi 12 février, les terroristes ont remis le paquet en ciblant, cette fois-ci, un camp de déplacés sur la route Sake-Kitchanga, blessant grièvement plusieurs d’entre eux.
Sur le terrain des affrontements proprement dits avec les FARDC et les Wazalendo, la coalition terroriste RDF-M23 avait lancé tôt lundi 12 février 2024, des assauts autour de Sake, notamment vers Mitumbala et Nenero avec l’intention d’ouvrir un nouveau front vers Luhonga. Mais également le long de la route Mushaki et à Malehe, à environ 8 km de Sake. Vers 11h00, ils croyaient pouvoir occuper Sake après des affrontements à Kimoka. Mais la force aérienne congolaise venue à la rescousse a empêché leur progression sur cet axe.
2.900 soldats sudafricains
Le même lundi, on apprenait dans la soirée l’arrivée à Goma de nouveaux renforts en hommes et matériels de guerre.
Alors que dans un communiqué daté du même jour, la présidence sudafricaine annonçait l’envoi au Nord-Kivu de 2.900 militaires avec la mission de «contribuer à la lutte contre les groupes armés illégaux dans le cadre de la mission d’intervention de la SADC».
Ceci explique-t-il cela? Le 13 février 2024, un redéploiement massif des RDF-M23 en vue d’une nouvelle offensive sur Sake était annoncée par des sources locales. Des troupes en provenance de Kitchanga, ainsi que des véhicules de combat, notamment, qui rejoignaient celles qui avaient combattu la veille aux abords de la cité de Sake.
En milieu de journée, le repli des FARDC et des Wazalendo qui contrôlaient Kirotche sur Sake aux fins d’échapper à l’étreinte des terroristes ADF et se réorganiser avait aggravé la psychose et la panique parmi les populations civiles. C’est le moment choisi par les terroristes RDF-M23 pour publier un communiqué annonçant leur entrée imminente à Sake pour «protéger les populations contre les armes lourdes utilisées par les FARDC contre les populations civiles», selon un document signé par Lawrence Kanyuka. Pendant ce temps à Kinshasa, Bienvenu Matumo, un anarchiste qui passe pour un activiste des droits de l’homme annonçait l’Apocalypse. «Maintenant que l’agglomération de Sake vient de passer sous contrôle du M23/RDF depuis cet après-midi, l’Etat congolais ne déclare toujours pas la guerre au Rwanda? Une escarmouche de trop!», écrivait-il sur son compte X. En réalité, les combattants Wazalendo avaient été délogés des collines de Kabase et Ndumba qu’elles avaient réussi à occuper dans la mi-journée.
A quelques km de Sake
Seulement, Sake a sans doute failli céder ce 13 février, mais n’est pas tombé entre les mains des terroristes malgré d’âpres combats non loin de la cité. Arrivé à Goma le même jour, le vice-premier ministre, ministre de la Défense nationale et anciens combattants, Jean-Pierre Bemba Gombo, a tenu à rassurer les troupes et l’opinion. «Tout est mis en œuvre pour assurer la protection de Sake et ses environs», avait-il déclaré aux médias. «La ville de Goma ne tombera pas», avait encore déclaré Bemba.
Mercredi 14 février, il était certain que les FARDC et les Wazalendo avaient non seulement réussi à contenir les envahisseurs mais également à les repousser de nouveau vers les collines surplombant Sake à 3 km et vers Lutobogo sur la route Sake-Mushaki à 2 km de la cité. Jusqu’au moment où nous mettions sous presse, la cité de Sake demeurait donc contrôlée par les forces de défense et de sécurité de la RDC.
J.N. AVEC
LE MAXIMUM