Dans la guerre imposée à la RDC au Nord-Kivu par le Rwanda et ses affidés, le tempo n’est plus le même ces dernières semaines. Non seulement la coalition RDF-M23 ne réussit aucune percée sur le terrain des affrontements, mais aussi, elle accumule les déboires, selon des sources dans la région.
A Kitchanga, la journée de lundi 16 octobre 2023 s’est ainsi avérée relativement calme après que la cité eût été transie de peur en raisons d’affrontements opposant les résistants de l’auto-défense locale Wazalendo (patriotes) aux terroristes dans la périphérie de cette localité stratégique. Les assaillants sont revenus à la charge mardi 17 octobre en tentant de contourner les positions des Wazalendo à Bishusha, à 17 km de Kitchanga, sans succès. Jusque mercredi 18 octobre, Bishusha demeurait entre les mains des résistants Wazalendo.
Dimanche 15 octobre, à l’issue d’âpres combats dans la périphérie de Bwiza, les phalanges de Paul Kagame avaient perdu deux de leurs positions, les campements de Tabi et de Tanzani en groupement de Tongo (Rutshuru). Mis en déroute par les Wazalendo conduits par un certain Mike Mahoro, la coalition RDF-M23 se dirigeait vers Tongo en début de journée afin de se reconstituer.
Samedi 14 octobre, c’est à Rugari dans le même territoire de Rutshuru qu’ont été signalés d’intenses affrontements entre terroristes et forces d’auto-défense, provoquant un déplacement massif de populations civiles. En provenance du parc des Virunga, les Wazalendo avaient tenté une percée à Rugari depuis les premières heures de la journée et les affrontements se sont poursuivis jusqu’à Kahungu, Kibututu, et Tongo.
A partir des localités sous occupation rwandaise, à Kiwanja et Rutshuru-centre, étaient rapportées des informations faisant état d’un mouvement de panique parmi les forces d’occupation et d’une psychose dans la population civile. Au Nord-Ouest de Kiwanja, les RDF-M23 ont multiplié les menaces contre quiconque serait soupçonné de collaborer avec les forces d’auto-défense. «A Kinyandonyi, ils ont promis l’enfer à quiconque se rendra coupable de collaboration avec les Wazalendo. Ils ont coupé la route Goma-Rutshuru-Kanyabayonga depuis 5 jours. Ce qui plonge tout Rutshuru dans une situation sociale très compliquée», a rapporté un témoin.
Dans un message officiel adressé à l’administrateur du territoire de Masisi, le général Peter Cirimwami, gouverneur militaire a.i. du Nord-Kivu, a instruit les cadres territoriaux et les responsables des services étatiques et paraétatiques de «rejoindre sans délais leurs postes d’attaches en vue de restaurer l’autorité de l’Etat sur toute l’étendue du territoire de Masisi libérée des envahisseurs RDF/M23 ».
Progression fulgurante
La progression manifestement fulgurante des Wazalendo, après qu’ils eurent «anéanti et humilié» la coalition RDF-M23, aurait été stoppée par les contingents kényans, ougandais et sud-soudanais de l’EAC, à en croire la société civile locale, impatiente de voir les FARDC prendre le relais de la résistance pour «foncer sur Tshanzu. Si les FARDC décident d’engager une guerre, dans une semaine seulement, elles vont atteindre Tshanzu et contrôler Runyoni», a déclaré dans les médias, Mamba Kawaya, un activiste de la société civile, le 14 octobre.
Dans les villages de Kiyenje en groupement Tongo, des accrochages opposant Wazalendo aux RDF-M23 avaient été signalés le 13 octobre sans modifier la configuration des forces en présence : Kiyenje est resté sous le contrôle des Wazalendo et sous leur pression, les assaillants ont déplacé leur QG de Rutshuru vers Bunagana.
Jeudi 12 octobre, Peter Mathuki, secrétaire général de l’EAC, a publié un communiqué réfutant toute collaboration entre la force de l’EAC et la coalition RDF-M23, et dénoncé la propagande négative dirigée contre certains de ses contingents. «L’EACRF se consacre à travailler en collaboration avec le gouvernement de la RDC et d’autres parties prenantes en mettant l’accent sur la facilitation de l’ouverture des principales routes d’approvisionnement (MSR), permettant le retour en toute sécurité des déplacés dans leurs foyers et améliorant la protection globale des civils», assure ce communiqué. Selon l’EAC, les contingents déployés dans la région respectent strictement le code de conduite et les procédures établies par l’Accord sur le statut des forces et dans le droit international, qui incluent, notamment, la protection des civils.
L’EAC dément toute compromission
Mathuki a également condamné les offensives déclenchées par les patriotes résistants Wazalendo qui «contrastent avec la résolution pacifique envisagée du conflit par le biais du processus de Nairobi»
Vendredi 13 octobre à Goma, le lieutenant-général Otavio Rodrigues, commandant de la Monusco au Nord-Kivu, le général de division Aphaxard Kiugu, chef de la force de l’EAC, ont attribué la détérioration de la situation sécuritaire dans la région aux affrontements entre M23 et Wazalendo. Le commandant de l’EACRF a souligné en la circonstance la nécessité d’engagements stratégiques opportuns entre les dirigeants de cette force sous-régionale, de la MONUSCO et ceux des FARDC, notamment, sur des plans conjoints visant à remédier à la situation sécuritaire dans les territoires de Masisi, Nyiragongo et Rutshuru.
Il reste que la relative accalmie observée sur les lignes de front a été perçue comme le résultat de l’intervention des contingents kényans et ougandais empêchant la progression des forces d’auto-défense, et plutôt mal appréciée. «Les Wazalendo ont été obligés de retourner à leurs positions à Ngwenda, et jeudi, les RDF- M23 ont réoccupé la localité de Kinyandoni. Ce sont les contingents ougandais et kényans qui travaillent pour le compte du M23, parce que quand les rebelles avancent, ils les laissent faire. Mais quand les Wazalendo avancent, la force EAC s’interpose», s’était ainsi plaint, le 12 octobre, Jean-Claude Bambaze, activiste de la société civile de Rutshuru.
Le positionnement des forces en présence, le 12 octobre, faisait état de l’occupation de la route Kalengera jusqu’à Chumba en passant par Kisangani, Kanaba, Mulimbi, Rusekera par la coaliton RDF-M23, tandis que les Wazalendo tenaient Bambo, Butare, Kabizo, Busenene, Kihonga, Hohe, Marangara, Kazaroho jusqu’à Kirumba. La coalition RDF-M23 ayant néanmoins érigé une position à Tongo à quelques mètres du contingent de l’EAC accusé par les populations locales de lui servir d’appui pour le passage de ses renforts en provenance de Rutshuru-Centre, Chanzu jusqu’à Mulimbi ou Buiza (Tazama Info).
Terroristes délogés de Masisi
Mercredi 11 octobre, les miliciens Wazalendo ont un coup d’éclat en récupérant le groupement de Bwiza, dernière position stratégique du RDF-M23 en territoire de Masisi, obligeant les assaillants à opérer un retrait précipité vers Bwito. Auparavant, les résistants Wazalendo avaient délogé les terroristes de la cité de Kitchanga et ses environs, lundi 9 octobre.
Une semaine auparavant, les Wazalendo avaient déjà occupé Kitchanga, avant de décrocher 24 heures après l’occupation de la cité, ainsi reconquise sans combats, selon des sources. Les rebelles ayant déserté les lieux pour renforcer leurs positions sur l’axe Tongo.
J.N. AVEC LE MAXIMUM