Un nouveau rapport de l’ONG américaine Human Right Watch (HRW), publié le 14 juin 2023, fait état de la découverte de nouvelles fosses communes à Kishishe (Nord-Kivu). «Les preuves de crimes de guerre manifestes commis à Kishishe devraient être préservées», recommande l’ONG, définitivement écœurée par l’ampleur de ces crimes de guerre perpétrés par la coalition RDF-M23 en RDC. Des dizaines de corps ont, en effet été enfouis dans des fosses communes à Kishishe, ceux de villageois, mais aussi de miliciens capturés par les terroristes, exécutés entre novembre 2022 et avril 2023, selon HRW. Qui exhorte le gouvernement congolais a demander l’appui des Nations Unies, de l’Union africaine (UA) et des gouvernements partenaires pour procéder à des exhumations de manière appropriée, restituer les corps aux familles et exiger que les responsables de ces crimes rendent des comptes. «Le Conseil de sécurité de l’ONU devrait ajouter les dirigeants du M23, ainsi que les responsables rwandais qui soutiennent le groupe à sa liste de sanctions existante», a déclaré Clémentine de Montjoye, chercheuse à la division Afrique de HRW. Ce n’est pas trop tôt.
L’enfer de l’Est
Dans l’Est de la RDC, l’enfer dure depuis les lendemains immédiats du tristement célèbre génocide rwandais, en 1996, lorsqu’au moins trois pays voisins entreprirent une guerre d’agression déguisée en rébellion interne (la guerre de l’Afdl) qui culmina, en mai 1997, par la fuite du défunt Maréchal Mobutu et des tentatives d’installation à Kinshasa d’hommes-liges aux ordres de Kigali. Dans la région écumée depuis lors par des mouvements rebelles nationaux et étrangers, la paix n’est jamais revenue et on estime aujourd’hui à quelques dizaines de milliers le nombre de personnes mortes directement ou indirectement du fait des affres de la guerre introduite dans l’ancien Zaïre dans une indifférence totale de la bienpensante communauté internationale. Certes, une impressionnante mission onusienne, la plus grande et la plus coûteuse de tous les temps, a été déployée en RDC, essentiellement pour «protéger les populations civiles». Mais on le sait aujourd’hui plus qu’hier : les casques bleus entretenus financièrement à coups de centaines de milliards USD, c’était pour préserver un statu quo sécuritaire qui permettait au Grand capital occidental de tirer le maximum de profits des pillages en règle des ressources naturelles dont regorge la RDC. Par le Rwanda de Paul Kagame et l’Ouganda de Yoweri Museveni interposés. Dans la plus grande et souveraine impunité.
Ça n’a donc jamais été qu’un secret de polichinelle. L’insécurité chronique dans les territoires de l’Est de la RDC avait pour parrain direct Paul Kagame qui n’a eu de cesse d’y déverser son armée et ses milices déguisées en rebelles congolais : l’AFDL, le RCD/Goma, le CNDP puis le M23, le tout dernier.
Preuves irréfutables
Les preuves documentées par HRW sur les derniers crimes de guerre commis par les hommes de Paul Kagame, basées sur des témoignages, des analyses d’images satellite, photographies et vidéos, sont sans appels. Outre les exécutions des civils, les terroristes du M23 ont incendié au moins une maison contenant des corps, utilisant des écoles comme bases militaires, parfois avant de les incendier pour effacer toutes les traces des crimes commis sur les lieux.
On apprend ainsi qu’après le retrait des terroristes du M23 de Kishishe en avril 2023, des rescapés des massacres ont révélé l’existence d’au moins 14 fosses communes pouvant contenir jusqu’à 20 corps chacune. Sans compter les tombes creusées par les habitants eux-mêmes, pour enterrer les corps des leurs découverts après le départ des terroristes. «J’ai vu quatre cadavres de voisins à côté de ma maison. … Un peu plus loin dans le village, ils ont tué un homme de la tribu Shi et ont recouvert son corps avec une couverture pour le cacher. À côté, quand nous sommes arrivés au marché, j’ai vu un voisin ainsi que sa femme et son fils. Ils ont tué les deux hommes et laissé la femme. Ils ont continué et ont trouvé une maison avec trois hommes cachés à l’intérieur. Ils les ont tués avec leurs houes. Ensuite, nous sommes arrivés à l’église [adventiste], ils ont fait sortir tout le monde et les ont exécutés. Il y avait peut-être une vingtaine de personnes tuées», a rapporté aux enquêteurs de HRW un rescapé des massacres de Kishishe.
Les horreurs, rapportés par des témoins
Un autre rescapé, 22 ans, a témoigné qu’après la prise de Kishishe par la coalition RDF-M23, il a été enrôlé de force par ces terroristes pour aller combattre les FDLR, lui avaient-il dit. «Nous n’avons pas trouvé de FDLR mais plutôt des agriculteurs qui travaillaient dans leurs champs. Tous ceux qu’ils ont trouvés sur leur chemin, ils les ont tués en disant qu’ils étaient des FDLR». Rentré à Kishishe, l’infortuné y a trouvé les corps de son père et de son petit frère : «Regardez ces Maï-Maï que nous avons tués», lui ont expliqué les terroristes.
De manière générale, les fosses communes ont été creusées près des positions du M23, d’une église, où partout où des personnes apeurées avaient pu tenter de chercher refuge.
Selon HRW, des enquêtes indépendantes supplémentaires permettront aussi bien d’en savoir davantage sur l’identité des victimes que de découvrir de possibles nouvelles fosses communes dans la région.
J.N. AVEC LE MAXIMUM