Les opinions émises dans cette rubrique qui remplace désormais le courrier des lecteurs n’engagent que leurs auteurs
Quelques caciques du FPR emprisonnés, en résidence surveillée ou laissés pour compte.
C’est depuis 2021 que le président rwandais Paul Kagame a réitéré des menaces précises à l’encontre de ses anciens camarades de lutte qui ont osé fuir son régime dictatorial pour se réfugier à l’étranger en déclarant, pince sans rire que « même si les camarades qui restent dans le pays sont souvent emprisonnés et jetés dans la pauvreté, ils ne sont généralement pas assassinés comme le sont leurs homologues qui fuient le Rwanda ». Ces propos sur d’anciens compagnons d’armes qui, venus d’Ouganda avec lui, avaient consacré toute leur vie dans la lutte pour la conquête du pouvoir total par son régime totalitaire sont pour le moins troublants. « Ces camarades qui ont quitté le Rwanda sont mal lotis en exil. Il n’y a pas un seul parmi eux qui soit plus à l’aise là où il est que lorsqu’il vivait ici », avait-il déclaré.
Il est pourtant de notoriété publique que la plupart des anciens compagnons d’armes de l’homme fort de Kigali restés au Rwanda vivent eux aussi dans des conditions très misérables. Seule différence : ceux qui, pour échapper à l’emprisonnement ou à une indigence forcée, se sont résolus à prendre les chemins de l’exil ont été systématiquement pourchassés par des escadrons de la mort qui en ont assassiné beaucoup parmi eux.
Cette comparaison par un chef d’État entre le sort de ses compagnons d’armes qui sont restés au pays et leurs compatriotes qui ont fui a quelque chose de cynique et d’abominable car elle revient à amener l’intelligentsia de son pays à choisir entre la peste et le choléra.
On peut rappeler à ce sujet qu’à l’instar des pires despotes que l’histoire ait connu, Paul Kagame a liquidé la quasi-totalité des membres historiques du Front patriotique rwandais (FPR), fondé en terre ougandaise par le regretté général-major Fred Gisa Rwigema en 1990. Parmi les leaders historiques qui ont repris le flambeau après la mort au front de ce dernier figurent le Hutu Pasteur Bizimungu qui a non seulement été brutalement éjecté de ses fonctions de président de la République du Rwanda post génocide mais également embastillé pendant plusieurs années. D’autres leaders historiques du FPR tels que les ministres Patrick Mazimhaka, Protais Musoni, Tharcisse Karugarama et Joseph Karemera ont été mis au placard comme des kleenex usés par Kagame. Même le doyen Tito Rutaremara, un des chantres les plus vocaux du régime mono-ethnique installé à Kigali après le génocide de 1994 n’est plus que l’ombre de lui-même.
Tito Rutaremara, une ombre tutélaire.
Les chefs militaires issus de la longue lutte contre le régime du président Juvénal Habyarimana n’ont pas connu un sort plus enviable que celui de leurs homologues civils. Ancien chef d’état-major général de l’Armée Patriotique Rwandaise (actuellement Rwanda Defence Forces), le général Charles Kayonga, envoyé un moment comme ambassadeur en Chine, en a été rappelé plus tard pour rejoindre les rangs des chômeurs au Rwanda. Le sort du général Patrick Nyanvumba, un de ses successeurs à la tête de l’armée, reste inconnu son limogeage. Le général Emmanuel Ndahiro, confident du président Kagame et chef de la sécurité militaire a été placée en résidence surveillée à partir de 2011. Quant au général Frank Rusagara et au colon el Byabagamba, ils sont, depuis 2014 emprisonnés pour « incitation à l’insurrection et ternissement de l’image du gouvernement ».
Les anciens cadres du FPR qui ont voté avec leurs pieds en quittant le Rwanda sont en effet moins bien lotis que leurs homologues restés au pays. Seth Sendashonga, ancien ministre de l’Intérieur a été assassiné à Nairobi, au Kenya, de même que le colonel Théoneste Lizinde qui sauva de nombreuses vies de Tutsi pendant le génocide de 1994. L’ancien chef du renseignement Patrick Karegeya a été trouvé mort par étranglement dans un hôtel de Johannesburg, en Afrique du Sud. L’ancien ministre de la Réhabilitation et de l’Intégration sociale, Jacques Bihozagara, figure emblématique du FPR, plusieurs fois ministre et ambassadeur du régime Kagame à Paris et à Bruxelles a péri subitement dans des circonstances jamais élucidées à Bujumbura (Burundi) en 2016. Quant au général Kayumba Nyamwasa, ancien chef d’état-major de l’armée rwandaise, il a survécu à trois tentatives d’assassinat à Johannesburg, en Afrique du Sud.
Parmi ceux qui vivent dans la peur à l’étranger figurent l’ancien procureur général du Rwanda, Gérald Gahima, et le Dr. Théogène Rudasingwa, ancien directeur de cabinet de Paul Kagame.
David Himbara
Lodja perd un siège au parlement : Une forfaiture signée Jules Lodi
«Mission accomplie !», doit s’être dit l’inénarrable gouverneur du Sankuru Jules Lodi en découvrant les statistiques des électeurs publiées en annexe du projet de loi de répartition des sièges qui établissent un affaissement de 5 à 4 du nombre des élus nationaux de Lodja, le territoire le plus peuplé de sa juridiction.
On sait que pour des raisons connues de lui-même, il s’était juré de réduire à néant le poids électoral des trois territoires dits «forestiers» ou ekonda (Lodja, Lomela et Kole). Pour ce faire, il avait fermé illégalement six radios communautaires ayant pignon sur rue dans ces entités qui servaient à la sensibilisation de la population dès le début de l’enrôlement en prétextant une ‘‘insécurité’’ créée par de banals propos polémiques, du reste non communautaires (sans s’en référer ni au CSAC, ni aux cours et tribunaux comme l’exige la loi).
Cette cabale ourdie par celui qui avait pris l’habitude de se pavaner comme le «bourreau de la communauté Ekonda» semblait poursuivre l’objectif non avoué de ‘‘favoriser’’ ceux de «la savane » (Eswe) dont il est originaire et qui, ceci explique-t-il cela ? s’en sort avec un siège supplémentaire.
Le député national de Lodja, Lambert Mende Omalanga avait tiré la sonnette d’alarme dès ces simagrées de haine intercommunautaire du gouverneur Lodi dont il avait pourtant soutenu l’élection. Conflictuel inné et arriviste, Lodi a craché sur ceux qui l’ont hissé sur le piédestal et incarne une véritable bacchanale qui n’est pas sans rappeler le tristement célèbre sécurocrate Jacques Omonombe qui, dans les mois qui suivirent l’assassinat du Héros National Patrice-Emery Lumumba avait mis le Sud Kasaï et le Sankuru forestier à feu et à sang pour «venger» ce dernier. Papa Lokeso, un paisible nonagénaire qui a bien connu Omonombe assure que Lodi est un véritable clone de ce dernier. Comme quoi, les époques changent mais les méthodes et les cibles restent les mêmes. Sous la férule du baroudeur Jacques Omonombe, plusieurs personnalités Ekonda du Sankuru dont l’administrateur Théodore Bokuma furent arrêtées à Lodja et transférées sans aucune procédure vers Stanleyville pour y être exécutées. Ils ne purent être relâchées en piteux état à l’étape de Lusambo que grâce au défunt abbé Athanase Ndjadi, d’heureuse mémoire. Lodi réédite l’exploit de son précurseur Omonombe 62 ans après en soustrayant systématiquement des leaders des jeunes Ekonda qualifiés sans jugement de ‘‘criminels’’ de leur juge naturel pour les déporter vers Lusambo où il les fait torturer par des policiers ripoux avant de les faire condamner par des juges aux ordres en violation de toutes les règles de procédure. Ce, malgré les remontrances du 1er président de la Cour d’appel et du président de l’Assemblée provinciale Benoit Olamba qu’il vient carrément de défénestrer en corrompant quelques députés provinciaux.
Il est triste que quelques acteurs politiques du Sankuru se soient laissés appâter par les promesses malicieuses de Jules Lodi qui ne cesse de leur faire prendre des vessies pour des lanternes. Certains, notamment ceux de Lodja n’ont plus que leurs yeux pour pleurer car l’action de sape de Lodi les pénalise tous aujourd’hui. Notre peuple n’est plus dupe. Il sait qui est qui, qui a fait quoi, quand et pourquoi. La conséquence de cette diminution des sièges au parlement n’augure rien de bon pour ces invertébrés qui ont moins de chance d’être élus après avoir sacrifié les intérêts de leur terroir.
Au président de la République et au gouvernement central de veiller à remettre cet électron libre qui flotte tantôt dans l’UDPS, tantôt dans l’opposition (Ensemble pour la République de Katumbi dont il a déroulé dernièrement le tapis rouge à deux émissaires, sieurs Laurent Onyemba et Mike Mukebayi) sur le chemin du strict respect des droits et des aspirations des Sankurois quels qu’ils soient.
Blaise Ekongola et Gustave Wamu
Analystes politiques.