Le communiqué publié le 21 mai 2023 par la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO), structure faîtière de l’Eglise catholique romaine congolaise, sur les manifestations simultanées de l’opposition et du pouvoir du week-end dernier exsude à mille lieux la partialité de cette instance religieuse qui donne l’impression d’avoir rompu sa neutralité traditionnelle dans le débat politique. Au d’être l’église au milieu du village au service de la vérité et de la justice, les calottes sacrées qui se sont fendues de cette déclaration au vitriol confirment une posture manichéenne consistant ne voir le mal que dans le camp du pouvoir et le meilleur dans celui de l’opposition à laquelle elles sont manifestement liées.
D’aucuns à Kinshasa parelent d’une lecture ‘‘financièrement motivée’’ des incidents malheureux advenus lors de ces manifestations de la part de la CENCO.
Tout en dénonçant les bavures regrettables et condamnables de quelques éléments de la police nationale congolaise chargés de l’encadrement desdites marches, les évêques s’abstiennent ostensiblement de relever que plusieurs manifestants emmenés par quator Katumbi-Matata-Fayulu-Sesanga se sont délibérément écartés des itinéraires prescrits par l’autorité municipale de Kinshasa soucieuse d’éviter un choc aux conséquences désastreuses entre ces derniers et leurs adversaires de l’UDPS qui battaient eux aussi le pavé au même moment. On constate à ce sujet que les manifestants de l’opposition qui s’étaient conformés à l’itinéraire indiquant comme point de départ la place dite Sakombi ont pu s’exprimer sans aucun incident notable.
Par ailleurs, la CENCO garde un bien curieux mutisme sur la cynique instrumentalisation, par l’opposition, de jeunes adolescents, parfois des enfants, dont les images des ‘‘exploits’’ sont devenues virales sur la toile. Pas un mot sur le caractère insoutenable de ces mineurs que la loi et la morale tiennent à maintenir hors de tels débats politiques munis de pierres et d’armes blanches attaquer les forces de l’ordre, selon des directives de toute évidence préalablement données. On a, au contraire, entendu Mgr Donatien Nshole, secrétaire général et porte-parole de l’épiscopat se limiter à dénoncer et condamner uniquement la PNC dont la mission est pourtant le maintien de l’ordre public avant d’appeler le peuple (l’opposition) à «ne pas céder à la peur».
Sans la moindre preuve, ces princes de l’Eglise ont affirmé urbi et orbi, d’une part que ces violences relevaient d’une «stratégie de barbarie organisée par l’Etat pour intimider le peuple avec le concours d’une brigade spéciale de l’UDPS, Force du progrès» et, d’autre part que des véhicules des leaders de l’opposition avaient été ciblés par des tirs à balles réelles.
En écho, Augustin Matata Ponyo, l’ancien 1er ministre de Kabila qui vient de rejoindre l’opposition a brandi des douilles qu’il aurait ramassé dans sa voiture, ce qui a fait bondir un spécialiste de la balistique. «Une douille ne tombe qu’à l’endroit où un tir est effectué. Seule la balle proprement dite se retrouve dans le corps ou à proximité d’une victime. Matata en brandissant les douilles ramassées dans sa voiture avoue donc que c’est de celle-ci que des tirs ont été effectués. Les enquêteurs ne devraient pas négliger cet aspect».
Il appert donc assez clairement que certains évêques au sein de la CENCO font des pieds et des mains pour ‘‘mériter’’ les largesses financières leur accordées par certains opposants, mauvais gestionnaires d’hier sans se soucier outre mesure du bien-être de leurs ouailles. Lors de sa dernière visite pastorale en République Démocratique du Congo, le Pape François, chef de l’Eglise catholique universelle avait dénoncé cet «affairisme» de la plupart des membres du clergé qui souillent leurs soutanes en se laissant trop facilement corrompre.
Dans le quarteron qui a pris la tête des manifestations du week-end dernier se trouve au moins deux des pires prédateurs que la RDC ait connu et qui ont trouvé dans cet entrisme échevelé au sein des institutions politiques la voie la plus sûre pour ‘‘blanchir’’ le fruit de leurs rapines au détriment du peuple congolais.
Il est pour le moins consternant que des hommes de Dieu acceptent de dénaturer l’évangile dont ils sont théoriquement les hérauts en se laissant entretenir, toute honte bue, par le produit du sang et de la souffrance de leurs compatriotes consécutif à des détournements massifs de deniers publics et autres prévarications de la part de ceux qu’ils encensent et présentent contre toute évidence comme des gestionnaires modèles.
Il ne manque pas d’hommes et de femmes de bonne volonté dans le clergé catholique. C’est à eux qu’incombe le devoir de repenser et adapter la mission de cette grande confession religieuse aux Intérêts Nationaux bien compris de notre pays et de déployer un ministère de réconciliation, de vérité et de justice au service du bien commun universel.
Le mal reste le mal. Tout chrétien a l’obligation de le dénoncer d’où qu’il vienne au lieu de se complaire dans des analyses partisanes et intéréssées au service des causes qui sont aux antipodes du bien-être collectif.
Car, une piété religieuse qui ne génère pas l’amour, le juste, le vrai, la compassion et la solidarité est un obstacle à la mission de réaliser la volonté de Dieu sur la terre.
Le Maximum