C’est samedi en mi-journée que le président de la République Félix-Antoine Tshisekedi a procédé à l’inauguration du musée national dans le site jouxtant le Palais du Peuple et le ministère de l’Intérieur à Kinshasa-Lingwala. L’imposante bâtisse dont la première pierre a été posée par son prédécesseur Joseph Kabila Kabange il y a quelques mois est le fruit d’une coopération exemplaire entre la Corée du Sud et la République Démocratique du Congo. La remise aux autorités congolaises de cette infrastructure moderne attendue par tous ceux que la grande diversité de la production culturelle congolaise intéresse a été l’occasion de raviver le vieux débat autour des biens culturels congolais emportés – pillés diraient certains – par des aventuriers, explorateurs et visiteurs indélicats pendant plusieurs décennies. Le cas des anciens colonisateurs belges de la République Démocratique du Congo qui ont mis en place un imposant musée royal de Tervuren en banlieue de Bruxelles dont les œuvres exposées sont constituées à plus de 85% de pièces puisées par fait du prince du patrimoine congolais est revenu à la surface. Plusieurs membres du gouvernement central présents à la cérémonie d’inauguration ont confié à nos reporters que le moment était arrivé pour envisager très sérieusement la restitution par l’ancienne métropole coloniale du patrimoine culturel du Congo-Kinshasa. « Compte tenu de la nature néocoloniale des relations entre la Belgique et le Congo-Zaïre, cette question n’était évoquée jusqu’à présent que de manière officieuse », a déclaré un professeur de l’Académie des beaux-arts qui a effectué un stage à Tervuren. « Même si les scientifiques comme moi ne sont pas autorisés à porter ce type de revendications qui relèvent de la sphère publique, nous n’avons eu de cesse de faire remarquer à nos amis Belges que le place de ces œuvres congolaises étaient au Congo, ce à quoi on nous opposait régulièrement d’une part l’absence d’infrastructures appropriées pour leur conservation et d’autre part le silence des différents gouvernements qui se sont succédés jusqu’aujourd’hui à la tête du pays et dont aucun n’a mis sur le tapis cette question », a-t-il ajouté. Maintenant que le pays dispose des infrastructures pouvant abriter ce patrimoine, nombreux sont les Congolais qui estiment qu’il est du devoir des autorités nationales de faire revenir les biens culturels expatriés. Selon les experts de l’Institut congolais des musées nationaux, le nouvel immeuble de leur institution inauguré samedi renferme 400 œuvres d’art congolais alors que 120.000 œuvres congolaises sont exposées dans le musée de Tervuren en Belgique. Prudent, Fatshi s’est limité à affirmer qu’il faudra bien qu’un jour ces œuvres d’arts congolais reviennent « mais il importe de bien préparer cette opération et le faire progressivement ». Le chef de l’Etat n’a pas élaboré sur la nature des préparatifs et des délais auxquels il faisait allusion mais une source proche du dossier indique qu’il aurait simplement décidé de botter en touche pour l’instant afin de ne pas effaroucher ses partenaires belges au risque de provoquer un effet boomerang susceptible de compromettre les démarches de normalisation qu’il a mis en œuvre après la glaciation provoquée par la fermeté de son prédécesseur Joseph Kabila dans certains dossiers sensibles comme celui relatif à la promulgation d’un nouveau code minier plus conforme aux intérêts nationaux congolais.
JN