Enfin, le cabinet Ilunga Ilunkamba est là, à un quadrimestre de la fin de l’exercice 2019. Selon nos sources, le budget aurait déjà été entamé à plus de trois quart de ses prévisions. Mais, il n’est pas que les ministres du cabinet sortant qui en auraient fait à leur tête par des commandes de véhicules ou de divers autres matériels imprévus.
Des mandataires publics aussi se sont octroyés des salaires et avantages… de stars de foot, pour reprendre l’expression d’un syndicaliste. Déjà, lors de l’examen et du vote de la loi de finances publiques 2019, PCA et DG d’entreprises d’Etat ont fait pression sur la commission Ecofin de l’Assemblée nationale qui, révoltée, avait porté l’affaire devant la plénière en déplorant « l’attitude des institutions, ministères et services publics consistant à recourir à l’Assemblée nationale, à travers elle, pour solliciter des crédits additionnels ou des ouvertures de nouvelles lignes des crédits, alors que la préparation et l’élaboration du budget sont du domaine gouvernemental», peut-on lire dans le rapport de la commission transmis au bureau de l’Assemblée nationale.
Il y a encore quelques cinq mois, un leader syndical à la Direction générale des recettes administratives, judiciaires, domaniales et de participations (DGRAD) s’était levé avec fougue contre la gestion dans cette régie financière. Il a été mis en minorité par ses collègues. Comment pouvait-il en être autrement quand la direction générale a délibérément décidé de gonfler les salaires et autres avantages dont la prime de rétrocession des agents.
En 2018, la DGRAD comptait 7 huissiers De 6.093.983,66 FC (rétrocession + RAT), en 2017, chacun des huissiers a touché plus de 10 millions de FC, précisément 10.727.599,21 FC. ). En d’autres termes, l’huissier de la DGRAD gagne mieux que le chargé d’études à la Primature…
Recrutements à tours de bras
La régie financière qui engage à tour de bras compte à ce jour au moins 5.150 effectifs dont 1.520 agents au grade d’AGB1, (Agent de bureau) contre 1.474 en 2017. Et 1.688 agents AGB2, 920 ATB2, 172 ATB1, 416 CB, chefs de bureau, etc. L’AGB1 qui a touché, pour toute l’année 2015, 3.246.358,65FC de prime de rétrocession, soit 272.029,88 FC en moyenne, a touché 2.967.269,93 FC en 2016, soit une moyenne de 247.272,49 FC contre 4.831.531,68 FC en 2017 soit 402.627,64 FC le mois et 8.016.737, 55 FC en 2018, soit 668.061 FC mensuels.
Et en ce qui concerne la prime RAT, en 2015 un AGB1 a reçu en total 894.279,90FC, soit 74.523,28 FC par mois, en 2016 il a touché 1.418.023,08 FC, soit, un traitement mensuel de 118.168.59 FC, en 2017 il a reçu 2.607.723,91 FC, soit 217.310, 33 FC mensuel, et enfin en 2018 il a reçu un total de 4 .972.898, 13 FC soit 414.408,18 FC mensuel.
L’on saluerait volontiers, l’effort de l’employeur de relever chaque année la bourse des agents. Mais à y voir de près, la direction générale en profite aussi pour s’attribuer des salaires incompatibles avec la modicité du budget de l’Etat ou la capacité de mobilisation des recettes.
Nos sources attestent que le numéro un (DG) de la DGRAD en est à plus de 41.000 USD mensuels. Le document de la Régie portant sur la ventilation des effectifs globaux avec rétrocession et RAT pour 2018, renseigne que le DG perçoit 813.030.363,98 FC. Convertis en dollars au taux de 1.650 FC/USD, ces montants donnent 492.745,67 USD l’an. Les deux DGA en étaient, en 2018, à 609.592.773 FC chacun, soit 369.450,16 USD.
Par ailleurs, des limiers de la société civile ont déploré lors du Séminaire d’orientation budgétaire courant juin 2019, le fait que les recettes des services d’assiette dont des ministères et des entreprises d’Etat coiffées par le Portefeuille feraient l’objet d’arrangements, de conciliabules ténébreux et de conciliations avant leur publication.
Le prétexte du dépassement des assignations
« Le fait de dépasser les assignations n’est pas une licence à bouffer le surplus… Les assignations ne sont que des minima, à titre indicatif, s’est offusqué cet expert de la société civile. Qui rappelle qu’il a toujours été demandé au gouvernement de cesser avec cette pratique des assignations qui ne permet pas de faire une estimation on ne peut plus réelle du potentiel fiscal et parafiscal de la RDC », lit-on dans le rapport.
Les mêmes sources indiquent que la DGRAD est loin d’être un cas isolé. Le PCA de l’Observatoire de la dépense publique (ODEP), le professeur Muteba a dit son étonnement devant le charroi automobile de luxe des agents de la DGI. Des villas roulantes.
L’ex-Directeur général de la Société des transports et des ports, SCTP ex-Onatra, Daniel Mukoko Samba, a été viré par le chef de l’Etat alors que de fortes présomptions de détournements de quelque 400.000 USD pesaient sur lui. A l’origine du concept «Coulage des recettes », Mukoko Samba aurait notamment laissé deux contrats ombrageux : celui de l’évacuation de tous les bateaux échoués dans la concession fluviale de l’ex-Onatra ainsi que celui du renflouage et du découpage des unités fluviales coulées dans la rade du port de Kinshasa. Les deux marchés valaient plus de 185.000 USD mais n’ont connu aucun début d’exécution.
«Après la mise en place de son premier gouvernement, Félix Tshisekedi doit convier son Premier ministre à plafonner aussi les salaires des mandataires publics et à les rendre publics», confie cet activiste des droits de l’homme proche de l’UDPS. L’homme soutient détenir un faisceau d’informations selon lesquelles les rémunérations des mandataires de la Gécamines, PCA et DG, etc., ou encore de la Société nationale des chemins de fer (SNCC) « crèveraient le plafond!».
A la fin des années 80, précisément en 1989, du temps où il était premier Commissaire d’Etat, l’équivalent de premier ministre, Léon Kengo wa Dondo avait établi un plafond sur les rémunérations, le jeton de présence et les avantages des mandataires publics. Aucun salaire d’un mandataire public ne pouvait alors dépasser la barre de 100.000 Z. La date du lundi 20 mars 1989 est longtemps restée mémorable chez les Zaïrois de l’époque. Kengo y a fixé le deadline pour tout PDG ayant perçu auparavant des montants supérieurs à ce montant de les reverser au compte du Trésor, faute de quoi, des sanctions s’ensuivraient. Le régime de rigueur s’étendait même au personnel domestique, seuls le PDG et le DG-a avaient droit à un jardinier, une sentinelle et deux domestiques, en plus d’une seule voiture et d’un seul chauffeur, un second véhicule leur ayant été accordé pour des besoins familiaux, s’il y avait lieu.
Nous y reviendrons.
POLD LEVI MAWEJA