Bientôt deux mois depuis que le chef de l’Etat a prêté serment devant la cour constitutionnelle, le 24 janvier 2019. Mais l’installation des institutions de la République, et donc aussi leur fonctionnement adéquat, patine quelque peu.
Jusque jeudi 21 mars 2019 au moment où Le Maximum met¬tait sous presse, les rumeurs pourtant insistantes relatives à la nomination imminente d’un formateur de gouvernement n’étaient toujours pas confirmées. L’auraient-elles été que cela n’aurait servi à grand’chose dans l’immédiat. Sans bureau définitif de l’Assemblée nationale, le chef du gouvernement et l’équipe qu’il se sera constituée ne pourront entrer en fonction. Faute du quitus obligatoire de la chambre basse du parlement.
Après 3 jours d’intenses débats, ce n’est, en effet, que jeudi dans l’après-midi que l’ensemble du règlement intérieur de la chambre basse du parlement a été adopté. Ouvrant ainsi la voie à l’élection des membres de son bureau définitif, dernière des tâches dévolues au bureau provisoire en place jusque-là. Dans les meilleurs des cas, l’installation de ce bureau définitif sera acquise au courant de la dernière semaine de mars, permettant ainsi d’espérer la formation du gouvernement quelques jours plus tard.
Compléter le tableau de l’exécutif requiert d’installer les représentants du chef de l’Etat en provinces (gouver¬neurs). Leur entrée en fonction en remplacement d’anciens ou d’intérimaires est suspendue à la levée de la mesure de renvoi sine die des élections des gouverneurs de provinces, prise par le président Fatshi le 18 mars 2019, non sans malmener la constitution en vigueur.
Est également attendue dans la foulée de la poursuite du calendrier électoral, l’installation de la chambre haute du parlement (Sénat). Elle doit impérativement intervenir le 30 avril 2019, conformément à la constitution qui stipule que cette institution parlementaire se réunit de ‘‘plein droit’’ en session extraordinaire 15 jours après la proclamation des résultats provisoires par la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI). Ainsi que le souligne une analyse de notre confrère Omer Nsongo die Lema, le fonctionnement des exécutifs aux niveaux national et provincial a été négativement impacté par les retards enregistrés dans la mise en place des deux institutions législatives nationales. Que l’on doit à la programmation sui generis du processus électoral en cours, selon laquelle la présidentielle, les législatives nationales et provinciales se tiennent le même jour ; les sénatoriales un peu plus de deux mois plus tard, le 15 mars, et les élections des gouverneurs des provinces le 21 du même mois.
On doit cette sorte de tabula rasa qui se révèle problématique à la classe politique rd congolaise. Plus particulièrement, l’opposition politique qui, aveuglée par la rage de voir partir Joseph Kabila du pouvoir coûte que coûte, avait exigé la tenue des trois premiers scrutins le même jour. Par crainte de voir le désormais président de la République honoraire demeurer aux affaires après la présidentielle. C’était au cours du dialogue dit de la Cité de l’OUA, sous la modé¬ration du diplomate Togolais Edem Kodjo, mandaté par l’Union Africaine à la demande des mêmes opposants tenant mordicus à un arbitrage international.
On se souvient que c’est l’UNC Vital Kamerhe, actuelle éminence grise de Fatshi, qui conduisit la délégation de l’opposition à ces assises consacrées essentiellement au processus électoral. Les options décidées à la Cité de l’OUA ne furent pas modifiées par le dialogue arbitré quelques mois plus tard par les évêques de la Conférence Episcopale Nationale du Congo (CENCO) au Centre Interdiocésain de Kinshasa. Eux aussi exclusivement préoccupés de « dégager » Kabila. Le consensus dégagé en cette circonstance autour de la révision totale du fichier électoral obtenu, le différend né du fait que l’opposition exigeait que les séquences électorales commencent par la présidentielle, tandis que la majorité campait sur l’organisation préalable des législatives nationales et provinciales, fut réglé par la décision d’organiser de manière concomitante la présidentielle et les législatives. Et de ren¬voyer à plus tard les scrutins n’impliquant pas directement le président sortant (supposé déjà ‘‘dégagé’’ par ses adversaires !), les sénatoriales et tutti quanti …
C’est donc à l’élite politique congolaise elle-même que l’on doit les difficultés observées dans le fonctionnement des institutions de la République après le premier passage de flambeau civilisé au sommet de l’Etat dont se prévalent les uns et les autres.
J.N.