Avec un bel ensemble, l’opposition radicale rd congolaise s’est jetée sur ce qui ressemble bien à un prétexte de plus pour jeter le discrédit sur les élections prévues le 23 décembre prochain. En récusant sans nuances la machine à voter que la CENI a fait fabriquer par une entreprise Sud-Coréenne, Mirus Systems. Tous sans distinction y vont de leurs critiques contre cette ingénierie, qu’ils accusent à l’avance de pouvoir faciliter la tricherie. En ce compris les évêques catholiques qui, ce n’est plus qu’un secret de polichinelle, se rangent depuis plusieurs mois aux premières loges dans les travées de l’opposition politique. Le 12 avril 2018, les évêques de la Conférence Episcopale du Congo ont profité de l’assemblée générale d’une oeuvre économique catholique, l’Institution Financière pour les Œuvres du Développement, pour se prononcer sur le processus électoral. Et dire leur inquiétude « … du fait qu’un consensus ne soit pas encore trouvé pour l’utilisation de la machine à voter proposée par la CENI ». « Bien au contraire, les voix discordantes se multiplient jusque dans le pays de fabrication et de provenance de ces machines. La CENCO réitère sa demande de la certification de ces machines à voter par des experts nationaux et internationaux afin de trouver un consensus capable de rassurer toutes les parties prenantes sur le volet technique et sur le volet juridique », écrivent les prélats dans un communiqué lu par l’Abbé Donatien Nshole. Un jour après, le 13 avril 2018, le bureau politique de « Ensemble pour le changement », récemment mis sur pied par Moïse Katumbi Chapwe, se fendait lui aussi d’un communiqué récusant la machine à voter. Et ce, plus ou moins une semaine après que l’UDPS/Limete le MLC de Jean-Pierre Bemba et l’UNC de Vital Kamerhe se furent, eux aussi, prononcés contre l’ingénierie Sud-Coréenne.
Les récusations de la machine à voter ont en commun leur caractère exclusivement politique : aucune observation technique ou technologique objective n’est faite contre cette imprimante de bulletins de vote. Ce qui fragilise le prétexte des opposants rd congolais que les observateurs soupçonnent de tenter de retarder les échéances électorales en multipliant des stratagèmes. Mais peu, y compris dans la communauté internationale devant laquelle tous sont prêts à prosterner ici, y croient. Machine à voter ou pas, les élections de décembre prochain se tiendront, et puisque les trois scrutins prévus pour se tenir le même jour ne peuvent l’être sans la machine à voter, l’utilisation de l’ingénierie Sud-Coréenne semble devoir s’imposer.
Les élections coûte que coûte aux dates convenues dans l’Accord dit de la Saint Sylvestre, c’est ce que recommandent les Etats-Unis d’Amérique qui se sont de nouveau prononcés sans ambages sur la question le 13 avril à l’occasion de la conférence des donateurs sur la crise humanitaire en RD Congo. «La RDC est à un tournant critique, avec la possibilité d’un premier transfert de pouvoir pacifique et démocratique. Même si les élections ne suffiront pas à relever les nombreux défis de la RDC, un processus électoral crédible conduisant à un transfert démocratique du pouvoir sans violence est essentiel pour assurer un avenir plus prospère et pacifique à la RDC et à ses habitants”, lit-on dans communiqué du Département d’Etat rendu public le même jour.
C’est le même son de cloche que l’on entend des Britanniques dont la ministre pour l’Afrique a récemment séjourné à Kinshasa. Au cours d’une conférence de presse, Harriet Baldwin a déclaré que « … derrière la situation économique et sécuritaire (ndlr de la RD Congo) se dresse l’impasse politique actuelle. Il est essentiel que des élections crédibles, constitutionnelles et inclusives se tiennent en décembre 2018 ». Mais la représentante du secrétaire générale des Nations-Unies et patronne de l’ONU en RD Congo, Leila Zerrougui qui se prononce sans détour sur les obstructions politiques contre l’utilisation de la machine à voter en invitant les acteurs politiques à trouver un consensus, et non pas à renoncer à la machine en tant que telle. « Mon rôle c’est de dire au gouvernement, faites les concessions et faites en sorte que l’opposition se sente en confiance et travaille avec vous. Sur les questions qui mettent des doutes, vous avez parlé de la machine à voter, il faut arriver à un consensus. Je ne peux pas dire à la RDC de ne pas utiliser la machine à voter, ce n’est pas mon rôle. C’est un outil que vous allez utiliser pour la première fois, assurez-vous, dans un contexte de suspicion, dans un contexte où l’opposition pense que c’est un moyen de fraude, donc il faut rétablir la confiance, entendez-vous et il faut toujours avoir un plan B et donc si jamais quelque chose ne marche pas on peut utiliser le plan B », a-t-elle déclaré vendredi 13 avril 2018.
Sur la machine récusée aussi, il semble bien que les opposants doivent déchanter, tôt ou tard.
J.N.