A l’évidence, les radicaux de l’opposition et leurs affidés des mouvements dits citoyens ont essuyé, mercredi 15 novembre 2017, un des plus grands fiascos de l’histoire de ces invitations à battre le pavé. A Kinshasa surtout, mais également dans la plupart des grandes villes et agglomérations provinciales visés par les organisateurs, l’appel à manifester s’est muée en appel à ne pas manifester, ou, à la limite, à une sorte de ville morte. Les Congolais, manifestement lassés par les incessants et inutiles invitations à contester l’incontestable ont préféré vaquer à leurs occupations, ou demeurer chez eux, tranquille. Pour la bonne et simple raison que l’objet de l’invitation, protester contre le maintien de Joseph Kabila au pouvoir, s’est vidé de toute substance depuis la publication d’un chronogramme électoral le 5 novembre dernier. « Les opposants ne se sont pas aperçus que plus de 40 millions de leurs compatriotes avaient déjà choisi la voie des urnes pour régler cette question en se faisant enrôler sur les registres électoraux », explique au Maximum ce professeur de sociologie politique à l’université de Kinshasa. Il semble bien qu’il ait raison. Les expressions de soutien aux organisateurs, entonnés sur tous les tons par les radicaux de l’opposition et les médias locaux et étrangers qui les soutiennent lundi et mardi dernier n’y ont rien fait. Dans la capitale, les prétendus combattants des partis politiques de l’opposition ont préféré les rencontres de football, mardi (DCMP) et mercredi (V.Club), à une pérégrination politique risquée et peu sensée sur les artères de la capitale. C’est en chantant à tue-tête … à la gloire de leurs formations sportives respectives que ceux qui meublent habituellement les manifestations des radicaux s’en retournaient chez eux.
Démonstration de force nulle
Pourtant, ce n’est pas la détermination de ces opposants amèrement déçus par leurs mentors occidentaux qui a fait défaut. Depuis quelques jours, en effet, il n’était question que de démontrer aux Occidentaux la force du peuple. Elle était au football, cette force. Pas dans les états-majors désertés de Limete ou de l’Avenue de l’Enseignement dans la commune de Kasavubu, où s’agglutinent une bonne dizaine des partis politiques, toutes tendances confondues. Le bilan des manifestations livré par la police à Kinshasa est éloquent : seulement 25 personnes ont dû être interpellées sur l’ensemble du territoire national en marge des manifestations initiées par les mouvements dits citoyens et soutenues par l’UDPS/Limete et ses alliés. Le communiqué lu sur les antennes de la chaîne publique par le porte-parole de la police, le Colonel Pierrot Mwanamputu, ne prête pas vraiment à équivoque. A Kindu au Maniema, 3 personnes ont été interpellées qui jetaient des tracts non loin de la marie ; A Matadi, 6 poseurs de barricades de la commune de Mvuzi ont été appréhendés ; 8 individus ont été interpellés à Goma ; et 7 autres à Lubumbashi au Katanga. Rien à signaler à Kinshasa, selon la police nationale congolaise. Ce que confirme la police de la MONUSCO qui, après avoir tenté d’encourager les actes d’incivisme par un communiqué sibyllin, a estimé, au cours de son point de presse hebdomadaire du mercredi que « … aucun fait notable et digne d’intérêt n’est à noter … ».
Fake News alarmants
Ce qui met donc en doute les informations alarmantes diffusées dès les premières heures de la journée, faisant état de violences et de casses. « Elles sont à mettre sur le compte des stratégies d’incitation à manifester violemment en faisant croire que tout le monde en fait autant », analyse un expert en psychologie des foules de l’Université pédagogique nationale de Kinshasa. Dans les réseaux sociaux, le mouvement dit « citoyen » Lucha avait le plus officiellement du monde annoncé l’arrestation d’une dizaine de ces militants à Kasindi, à la frontière ougandaise dans la province du Nord Kivu. Mais n’avait pas prévu l’intervention d’un autre de ses membres qui s’était cru obligé, presqu’au même moment, de se réjouir de l’encadrement de la manifestation par la police locale, images à l’appui. A Goma, les mêmes agitateurs professionnels ont avancé le chiffre de 13 activistes interpellés, contre seulement 8 selon la police. Mais l’opinion a finalement peine à croire en « ces organisations qui ne dédaignent pas les grossissements des incidents », ainsi que les décrit un confrère du chef-lieu du Nord-Kivu, au sortir du stade Tata Raphaël de Kinshasa mercredi dans la soirée. De Lubumbashi et même de Kinshasa, il a été fait état de véhicules incendiés ou caillassés, sans prêter à davantage de foi. « Deux bus Transco ont été attaqués à Kinshasa », a cru pouvoir renseigner un confrère sur les réseaux sociaux, sans même se rendre compte qu’un bus attaqué cela ne signifie rien du tout. Encore que l’information n’a pas été confirmée par la plus petite source indépendante. Ceux qui réclamaient un calendrier électoral auquel ils sont les derniers à croire sont pris dans leur propre piège.
J.N.