Samedi 22 juillet 2017, les parties prenantes signataires de l’Accord dit de la Saint Sylvestre ont franchi un pas supplémentaire vers la mise en place du CNSA (Comité National de Suivi de l’Accord et du Processus Electoral). La Majorité Présidentielle, l’opposition politique radicale réunie sous la bannière du Rassemblement des forces politiques et sociales acquises au changement (Rassop) aile Kasavubu et une partie de la société civile ont désigné Joseph Olenghankoy Mukundji des Fonus (Forces Novatrices de l’Union Sacrée de l’opposition) président d’un directoire composé également de Adolphe Lumanu (MP, 1er vice-président), Vital Kamerhe (Opposition de l’accord de la cité de l’OUA, 2ème vice-président). Au Front pour le Respect de la Constitution (le MLC de Jean-Pierre Bemba, en fait) a été réservé le poste de 3ème vice-président. Le rapporteur et le questeur de ce bureau du CNSA, des postes réservés à la Société Civile et au Rassop, seront connus au courant de la semaine. Comme l’ont d’ores et déjà été 23 sur les 28 membres de la plénière qui ont vu leurs mandats validés samedi dernier.
Joseph Olenghankoy à la tête de la nouvelle institution d’appui à la démocratie chargée de veiller à l’application de l’accord politique du Centre interdiocésain et au monitoring du processus électoral, cela n’a pas beaucoup surpris à Kinshasa. Le président du comité des sages du Rassop Kasavubu, à ce titre successeur d’Etienne Tshisekedi de l’UDPS décédé début février dernier à Bruxelles, ne pouvait qu’hériter de la fonction dès lors que Bruno Tshibala, un membre du parti du défunt président de l’UDPS et du Rassop, avait été désigné chef du gouvernement d’union nationale pour le compte de l’opposition. « Agir autrement aurait discrédité totalement aussi bien le Rassop/Kasavubu que le gouvernement issu de l’accord du 31 décembre », explique ce député membre de la MP. C’est également le point de vue de Lambert Mende, le ministre de la communication et médias et porte-parole du gouvernement, qui avait pris part aux travaux du centre interdiocésain en qualité de négociateur pour le compte de la MP : «C’est une très bonne chose, et le principe de l’accord a été respecté sauf pour ceux qui ont tenté de le piéger au bénéfice de schémas individuels », a-t-il déclaré à la presse à Kinshasa le week-end dernier.
Aller de l’avant
La mise en place du bureau du CNSA atteste de la volonté de la grande majorité des parties prenantes au dialogue du centre interdiocésain de Kinshasa d’aller de l’avant. En RD Congo, la situation politique s’est beaucoup alourdie de ce que les scrutins électoraux ne pourront se tenir avant fin décembre 2017 comme projeté, même si le processus à largement évolué depuis le lancement des opérations pré-électorales il y a un an. Et le CNSA doit impérativement statuer sur la question, de concert avec la CENI et le gouvernement de la République. La mise sur pied du bureau de la nouvelle institution d’appui à la démocratie, le vote de son règlement intérieur ainsi que le vote de la loi organique portant sur son fonctionnement par le parlement étaient donc plus qu’attendus. Et le seront sans doute un peu plus.
Parce que l’aboutissement consacré samedi dernier au Palais du Peuple de Kinshasa a été l’occasion de nouvelles polémiques dont la classe politique congolaise semble ne plus pouvoir se passer. Aussitôt désigné, le président du bureau du CNSA a été immédiatement contesté par certains membres des parties prenantes au dialogue de la Cenco et au gouvernement d’union nationale. L’UNC de Vital Kamerhe, qui a décliné l’offre d’une vice-présidence du CNSA, estime que la désignation du patron des Fonus s’est faite en violation de l’Accord du 31 décembre 2017 en ce que les présidents des chambres parlementaires « n’étaient pas les personnes habilitées à procéder à l’installation du bureau du CNSA ». Mais on le savait depuis des semaines, Vital Kamerhe, revendiquait la présidence du CNSA et menaçait de saborder l’ouvrage si cet honneur ne lui était pas accordé. Tel n’a pas été le cas, samedi dernier au Palais du Peuple. « Il ne pouvait être question d’attribuer un poste destiné expressis verbis au Rassop par l’Accord au représentant de l’opposition politique signataire de l’accord de la cité de l’OUA », a expliqué au Maximum une source parlementaire, dimanche 23 juillet dans la soirée.
Deux des trois postes de vice-président du CNSA restent donc à pourvoir, le Front pour le respect de la constitution et le MLC, qui convoitaient eux aussi le perchoir du CNSA, ayant quasiment décliné l’offre du week-end dernier. « Le FRC a rejeté le consensus autour de Joseph Olenghankoy », a déclaré Alexis Lenga, cadre du MLC à Top Congo FM. Tout autant que la Coalition des Amis de Tshisekedi (CAT) de Jean-Pierre Lisanga Bonganga qui n’est pas membre du CNSA car il fait partie du gouvernement d’union nationale dirigé par le président du même Rassop Kasavubu qui a jeté son dévolu sur Olenghankoy.
Les catholiques et les radicaux
La première réunion du bureau sous la houlette de Joseph Olenghankoy devrait permettre d’apprécier l’évolution d’incontournables négociations autour de ces nouveaux écueils dans la mise sur pied du bureau du CNSA. Si jamais elle se tenait.
A ces obstacles à la mise sur pied du CNSA, il faut ajouter le rejet de cette mise en œuvre de l’accord de la Saint Sylvestre par ceux-là même qui en avaient fait leur cheval de bataille : le Rassop/Limete dans toutes ses composantes, en ce compris l’église catholique dont un groupe d’évêques avait modéré les travaux du centre interdiocésain. La position de la Conférence Episcopale Nationale du Congo (CENCO), qui considère que l’accord du 31 décembre dernier n’a pas été respecté parce que les radicaux de l’opposition n’ont pas accédé au pouvoir, est connue depuis juin dernier. On voit mal ces princes de l’église catholique, qui ont appelé les rd congolais à manifester contre l’ordre politique en place, intégrer le CNSA. Ni, encore moins, les amis du duo Félix Tshilombo Tshisekedi – Pierre Lumbi Okongo réunis sous la bannière du Rassop Limete. Au terme de leur second conclave clôturé samedi dernier, ils ont annoncé l’organisation de la désobéissance civile pour « contraindre le Président Joseph Kabila à quitter le pouvoir si les élections n’étaient pas organisées en décembre prochain ». Ce qui constitue une forme d’appel à tout renégocier, selon des observateurs.
J.N.