Jean-Pierre Bemba Gombo, le président du MLC, actuellement vice-premier ministre en charge des Transports, a créé la sensation lundi 9 juin 2025. Au cours de l’émission Face à Face de Top Congo FM, l’ancien chef rebelle et vice-président de la République entre 2003 et 2006, a accusé Joseph Kabila, Moïse Katumbi et des prélats catholiques de porter atteinte à la sécurité du pays et comploter contre le président Félix Tshisekedi. Une salve au vitriol.
Rien de bien original dans les dénonciations de l’ancien ministre de la Défense nationale. Ou presque. Beaucoup de déjà entendu, lu, qui se chuchote de bouche à oreille en RDC, sans que nul n’en apporte la preuve.
Jean-Pierre Bemba affirme au micro de Christian Lusakweno qui lui donne la réplique, nuance certaines affirmations et fait observer la gravité de ses accusations, qu’il possède les preuves de ses affirmations. «J’accuse Monsieur Hyppolite Kanambe alias «Joseph Kabila», M. Katumbi Moïse Soriano et certains acteurs de la CENCO d’être les auteurs d’une tentative de déstabilisation et d’atteinte à la sécurité de l’Etat en voulant éliminer le chef de l’Etat», déclare-t-il.
L’ex-président de la République est ainsi présenté comme un ancien soldat de l’armée rwandaise infiltré jusqu’au sommet de l’Etat congolais pour poursuivre la désarticulation des forces armées congolaises, le pillage des ressources, la balkanisation et la colonisation du pays par le Rwanda.
Complot contre Félix Tshisekedi
Quant à Moïse Katumbi, son rôle serait, selon Bemba, inextricablement lié à celui de certains animateurs de la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO). L’ancien gouverneur du Katanga pour le compte du PPRD est, à son avis, obsédé par l’idée de devenir président de la République. En 2023, il aurait monté avec un groupe de hackers russes une opération de piratage du site de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) afin de produire de faux listings électoraux et les faire diffuser par les soins de certains membres de la CENCO. «Le jour du vote, la CENI a été attaquée plus de 3.400 fois par des interférences qui essayaient de pénétrer pour modifier les informations», affirme-t-il.
JPB évoque également le dossier de construction (ou de réfection) par Katumbi de l’aérodrome de Mulinde, qui avait déjà fait couler encre et salive en RDC. «C’est un aéroport qui peut accueillir jusqu’à un C130 ou un antonov, capables de transporter 150 personnes», accuse l’ancien chef de guerre, insinuant par-là que Moïse Katumbi préparait une insurrection armée.
Au Cardinal Fridolin Ambongo et à Mgr Donatien Nshole, JPB reproche des homélies incitant au soulèvement, et surtout, l’idée du dialogue entre les Congolais. C’est «pour préparer l’élimination du président de la République», soutient-il. Les prélats catholiques seraient financés par Moïse Katumbi et Joseph Kabila, selon lui.
Levée de boucliers
Les dénonciations de JBP ont provoqué une véritable levée de boucliers. Dénonciations, démentis et contre-attaque de toutes sortes inondent les médias depuis lundi dernier. Il lui est reproché pêle-mêle d’avoir menti et calomnié, de compromettre la cohésion nationale, de torpiller les efforts de réconciliation du président de la République, etc.
En un peu plus d’une heure d’émission, lundi dernier, JPB et Christian Lusakweno ont abordé de nombreux sujets d’actualités, superbement ignorés par les contradicteurs du vice-premier ministre, ministre des Transports. Le patron du MLC s’était étendu durant près d’une heure sur ses réalisations à la tête du ministère de la Défense nationale, puis à celui des Transports. Sur ces sujets qui concernent la vie nationale, aucune réaction, ou presque, de la part de ses détracteurs.
Bemba avait ainsi annoncé qu’un nouvel aéroport international sera inauguré à Kinshasa en décembre 2027 par le président de la République. Les travaux de construction sur un espace de 42.000 m2 sont déjà en cours, qui feront sortir de terre un nouvel ouvrage architectural à deux niveaux, comprenant deux passerelles, et une nouvelle piste parallèle à la piste actuelle. La piste actuelle de l’aéroport de Ndjili sera réfectionnée, construite, un nouveau tarmac, un nouvel aérogare et un nouveau parking seront également érigés. L’ensemble des travaux à effectuer sur financement de l’Etat se chiffre à 500 millions USD.
Au chapitre du bilan à la tête du ministère des Transports, JPB énumère la construction de l’aéroport international de Kisangani-Banbgoka, récemment inauguré par le président de la République. Une inauguration suivie par celle de l’aéroport de Kolwezi, en attendant l’aéroport de la Luano à Lubumbashi, dont les travaux prendront fin dans les 20 prochains mois. Les aéroports de Kananga, Mbujimayi, et Bunia, seront eux aussi inaugurés prochainement. De même que quelque 53 aéroports disséminés à travers le territoire national seront entièrement balisés sous peu, la RVA ayant récemment réceptionnés 350 km de câbles pour ce faire.
Contre le dialogue politique
Sur tous ces sujets à caractère économique et social, aucun commentaire de la part des détracteurs de l’ancien chef rebelle. Comme s’il fallait étouffer ces sujets de préoccupation pour la majorité des congolais, moins importants que les images écornées de Joseph Kabila, Moïse Katumbi, le Cardinal Ambongo, ou encore Mgr Nshole.
En réalité, la sortie médiatique de JPB sur Top Congo FM fut une véritable déclaration de guerre contre les personnalités nommément citées lors de son intervention. Mais aussi et surtout contre le dialogue politique, un dialogue de plus en RDC, porté par les prélats catholiques et protestants. La plupart d’acteurs politiques de l’opposition, qui espèrent se refaire une santé politique après les fiascos des dernières élections s’en trouvent visés. A commencer par Martin Fayulu, un des candidats malheureux à la présidentielle de décembre 2023, qui a tôt fait d’accourir au portillon du Palais de la Nation à Kinshasa proposer la création d’un camp de la patrie. Pour dialoguer sous les auspices des évêques, avant de songer à faire face à l’agression. Plutôt que pour faire front commun contre l’agression avant d’envisager un dialogue entre acteurs politiques congolais.
J.N. AVEC LE MAXIMUM