La discrète diplomatie qatarie, discrète mais efficace, marque un coup dans les négociations entamées entre la RDC et les rebelles du M23/AFC soutenus par le Rwanda. Mercredi 23 avril 2025 dans l’après-midi, Kinshasa et les renégats, conduits par Lawrence Kanyuka, se sont engagés à œuvrer en faveur d’une cessation immédiate des hostilités. «Dans un esprit de compréhension mutuelle et de volonté commune de résoudre le conflit par des moyens pacifiques», selon le communiqué du M23/AFC lu sur les antennes de la Télévision nationale. L’opinion n’en attendait pas tant. Pas quelques heures seulement après que les supplétifs de l’armée de Kagame eurent annoncé et relancé une offensive dans la région de Walikale, récemment libérée.
Doha aura donc, au finish, été le lieu de «discussions franches et constructives» au terme desquelles les parties ont convenu de «travailler pour œuvrer à la conclusion d’une trêve devant permettre l’instauration d’un cessez-le-feu effectif», selon ce communiqué. Le texte publié par les rebelles indique que les deux parties se sont engagées «en faveur d’une cessation immédiate des hostilités, le rejet catégorique de tout discours de haine et d’intimidation et appellent toutes les communautés locales à respecter ces engagements». Le respect de ces engagements de Doha devrait permettre la tenue d’un dialogue constructif pour rétablir une paix durable en RDC et dans la région. «Ce dialogue portera sur les causes profondes de la crise en cours ainsi que les modalités pour mettre fin au conflit dans les territoires de l’Est de la République Démocratique du Congo», du point de vue du M23/AFC.
Déclaration conjointe
Quoique cette «déclaration conjointe de la République Démocratique du Congo et de l’Alliance fleuve Congo/Mouvement du 23 mars», unilatéralement signée par Lawrence Kanyuka du M23, et Papy Mbuyi Kanguvu, chef de la délégation gouvernementale, transpire encore les revendications longtemps ressassées par Kigali, relatives aux «causes profondes du conflit et aux modalités pour y mettre fin», on est loin des hostilités et des menaces annoncées sur le terrain des affrontements, quelques heures plus tôt.
Selon des informations diffusées par des sources proches de la rébellion, trois semaines de négociations à Doha avaient accouché d’une souris, la délégation de l’AFC/M23 ayant même regagné le maquis rebelle dans les territoires sous occupation de l’Est de la RDC. En cause, de nombreux points de frictions portant, notamment, sur l’exigence par Kinshasa d’un engagement commun autour du désarmement de tous les groupes armés ; le retrait des FARDC et des Wazalendo de Walikale, exigé par les rebelles ; ainsi que les préalables posés par la partie rebelle, qui n’avaient reçu aucune réponse de la partie gouvernementale.
Mardi 22 avril, les mêmes sources avaient révélé que sur une liste de plus de 700 détenus et prisonniers de guerre proposée à la libération par l’AFC/M23 en échange de son retrait de Walikale, Kinshasa n’en avait effectivement libéré que 5, qui, selon les rebelles, ne faisaient pas partie de ses troupes. Suffisant pour que les bruits des canons, qui s’étaient estompés sur la ligne de front de Walikale, notamment, reprennent de plus belle.
Reprise des hostilités
Selon des témoins, les rebelles avaient repris l’initiative des affrontements en allant à l’assaut des positions des FARDC et des Wazalendo dans le village de Mikumbi, très tôt, mardi 22 avril 2025. Repoussés, ils se sont repliés à Kibati, sur l’axe Walikale-Masisi avant de relancer les hostilités à Kashebere et à Kibati dans l’après-midi.
Mercredi 23 avril, des rumeurs d’occupation de Walikale-Centre ont abondamment circulé, particulièrement dans les réseaux sociaux des rebelles, avant d’être formellement démenties par les FARDC. Des sources citant le général Muhondosi, commandant de la 34ème région militaire basé à Walikale ont fait état de la détermination des troupes loyalistes soutenues par les Wazalendo à ne plus se laisser déborder sur ce verrou stratégique qui ouvre la voie à Kisangani, la troisième ville de la RDC. Au milieu de la journée, des sources indépendantes locales ont indiqué que les affrontements se déroulaient à Kibati, une localité sous contrôle des rebelles et leurs mentors de l’armée rwandaise.
L’évolution des négociations de Doha sous l’égide du Qatar n’a pas tardé à être saluée par la communauté internationale. Dès mercredi 23 avril, Maxime Prévot, ministre belge des Affaires étrangères, a salué cet accord qu’il présente comme «une étape cruciale pour faire cesser les violences».
Selon certains observateurs, le Qatar devrait désormais gérer le délicat dossier des négociations directes entre la rébellion AFC/M23 et Kinshasa. Le président togolais Faure Gnassinbé Eyadema, médiateur désigné par l’Union africaine, se chargeant des pourparlers entre la RDC et le Rwanda.
J.N.