Rien ne va plus entre le député national, Iracan Unem Gratien de Saint-Nicolas, 46 ans, et Ensemble pour la République, le parti sur les listes duquel il a été élu en 2023. Mercredi 9 avril 2025, le parti politique a rendu publique une décision de radiation de l’élu de Bunia en Ituri. Mais le même jour, le concerné a réagi, déclarant sa joie d’avoir ainsi été radié, se vantant d’avoir piégé son désormais ancien parti politique.
«Suite à ma vidéo dénonçant la prise en otage de l’organisation de ma famille politique et l’incompétence de ceux qui se disent proches de Moïse Katumbi et décideurs du parti Ensemble pour la République, je viens de recevoir une excellente nouvelle, si cela se confirmait ! Ils sont tombés deux fois dans mon piège. C’est une très grande joie d’être définitivement exclu de Ensemble MK», écrit ce natif de Logo dans le territoire de Djugu (Ituri), un des rares élus katumbistes dans la région.
Dans la décision portant exclusion définitive d’un membre du parti, signée le 9 avril 2025 par le secrétaire général, Dieudonné Bolengetenge, Ensemble pour la République reproche à Gratien Iracan un «manquement grave à la discipline et (un) comportement attentatoire à l’image du parti». Mais l’élu iturien ne l’entend pas de cette oreille. «Quand on est aveuglé par la haine, la suite n’est que victoire du juste. Je serai enfin libre de mes ambitions prochaines, à savoir, candidat président de la République aux prochaines échéances électorales. Que vive la République Démocratique du Congo», réplique-t-il.
Il a franchi le Rubicon
En réalité, le député iturien, diplômé en sciences agronomiques d’une université de Bunia, avait franchi le Rubicon quelques jours plus tôt, de l’avis du parti katumbiste. Gratien Iracan avait répondu positivement à l’appel du président Félix Tshisekedi à la formation d’un gouvernement d’union nationale pour faire face à l’agression du pays par les rebelles du M23 soutenus par l’armée du Rwanda. Le 5 avril 2025, l’élu de Bunia a été reçu à cet effet par le conseiller spécial du président de la République, Eberande Kolongele, qui a conduit les consultations en vue de la formation de cette nouvelle équipe gouvernementale. «Elu sur la liste de Ensemble, j’ai répondu en tant que personnalité politique aux côtés de 11 autres cadres de l’opposition à l’invitation du conseiller spécial chargé de la sécurité au cabinet du président de la République. Nous l’avons écouté et répondu aux questions», s’était justifié, comme par anticipation, l’élu de Bunia.
Le dialogue vaut mieux que la politique de la chaise vide ou la politique de l’autruche, selon Gratien Iracan. «Ma participation à la consultation nationale est une conviction politique propre à moi, après un débat élargi avec ma base politique tant à l’intérieur que dans la capitale congolaise. Elle s’inscrit dans la continuité de mes échanges avec le chef de l’Etat congolais pour la paix et la stabilité de notre pays», argue encore l’élu de Bunia, qui promet de continuer à «échanger avec tous les membres des institutions de l’Etat en toute franchise en tant qu’opposant jusqu’à trouver les solutions aux problèmes qui rongent notre pays».
Suspension dénoncée
Vis-à-vis de son désormais ancien parti politique, Gratien Iracan n’est pas tendre et dénonce la suspension dont il fait l’objet depuis juillet 2024, pour avoir affiché «un comportement qui jette l’opprobre sur les camarades membres du parti». Il n’a jamais été entendu sur les griefs portés à sa charge, révèle-t-il. «J’ai été suspendu pour avoir publié une vidéo où j’appelais les membres du parti à accompagner la candidature de Salomon Kalonda au poste de Rapporteur-adjoint au bureau du Sénat», révèle-t-il encore à ce sujet. Dans une nouvelle vidéo postée après l’audience auprès du conseiller spécial de Félix Tshisekedi, l’honorable Gratien Iracan s’en est de nouveau pris à ceux de ses collègues d’Ensemble qu’il accuse de s’approprier le parti katumbiste. «J’attendais impatiemment l’enquête sur les tentatives d’assassinat que j’ai connues en pleine ville de Kinshasa début mai 2024. Je me suis toujours demandé pourquoi le parti n’avait jamais réagi ! Pas un communiqué du secrétaire général, ni un appel au téléphone, ni un SMS reçu et pas même une visite de consolation à domicile ! Les avisés avaient certainement compris pourquoi j’avais démissionné comme Haut-Représentant de l’Ituri», se plaint-il.
Mercredi 9 avril, Gratien Iracan a publié un message de remerciement à l’intention de ses camarades membres d’Ensemble pour la République. Pour le soutien et les encouragements reçus du fait d’avoir «porté haut ce que pense notre peuple à l’occasion de la consultation organisée par le président de la République». Selon le désormais ancien katumbiste, «nous avons besoin effectivement de la paix, de la stabilité, de l’unité, de la cohésion nationale et du respect des lois en vigueur. La guerre doit s’arrêter et les troupes étrangères doivent quitter le sol congolais». Le changement de cap, par rapport à un parti politique qui n’ose pas prendre position contre l’agression et l’agresseur rwandais, est clair et net.
J.N.