Le président de la République honoraire, Joseph Kabila, annonce son retour sur la scène politique congolaise. L’ancien chef de l’Etat l’a déclaré, le 18 mars 2025 en Afrique du Sud, à l’issue d’une rencontre avec l’ancien président Thabo Mbeki.
En moins d’un mois, c’est la troisième sortie médiatique de celui que les congolais appelaient «Raïs», dont cette sortie malencontreuse qui l’avait vu soutenir que l’AFC/M23 défendait les intérêts du peuple congolais. La pilule a été mal ingurgitée par l’opinion en RDC. Joseph Kabila s’est quelque peu rattrapé, en signant un éditorial dans un quotidien d’Afrique australe puis en se livrant au jeu de questions-réponses avec des journalistes à la Fondation Thabo Mbeki, il y a 72 heures. «Nous avons l’intention de nous impliquer dans tout ce qui se passe en ce qui concerne la paix», déclare-t-il, sans indiquer clairement s’il fait allusion à la démarche des églises catholique et protestante qui disent œuvrer en faveur d’un pacte social pour le bien vivre ensemble (en RDC et dans la région !) ou à une initiative qui viendrait de lui-même. Car, interrogé sur les motivations de son retour sur la scène politique, le président de la République honoraire a déclaré qu’une réunion convoquée par sa famille politique aurait analysé la situation du pays et constaté que les Congolais ne parlaient pas de la situation de leur pays, qu’il fallait les réunir pour l’analyser …
Pour Joseph Kabila, la situation politique actuelle de la RDC est similaire à celle qu’elle traversait en 2002-2003, lorsqu’il avait suffi du départ des troupes étrangères pour enclencher une dynamique de retour à la paix. «On peut appliquer la même solution. Mais en considérant que le problème est beaucoup plus profond qu’on ne le croit». Donc, pas d’agression, pas d’agresseurs, il faut cesser de rejeter la faute sur les autres, estime l’ancien chef de l’État, qui semble ainsi dédouaner Kigali et les rebelles de l’AFC/M23.
Son analyse de la situation de la RDC, Joseph Kabila ne s’en cache pas. «Il faut revenir aux fondamentaux», à l’Accord de Sun City qui a «posé les bases de ce que nous pouvons appeler un processus de construction national», avance-t-il.
Comme en 2002-2003
Trop facile. Alors que les rapports et témoignages de plus en plus accablants sur l’implication militaires du Rwanda dans l’agression et l’occupation du Nord et du Sud-Kivu minier se multiplient. Et que les soupçons de collusion entre l’AFC/M23 de Corneille Nangaa et lui-même, maintes fois dénoncées par son successeur à la tête du pays et des membres de son gouvernement, peinent à être démenties. Le 18 mars en Afrique du Sud, Joseph Kabila a rejeté les accusations relatives à sa complicité avec les rebelles et assurant qu’il s’agissait d’accusations sans preuves. Mais, mardi 18 mars 2025, Africa Intelligence (la version électronique du Courrier d’Afrique, en fait) a publié des révélations faisant état de la présence du président de la République honoraire à Kampala, à la mi-mars 2025. Et de la présence dans la capitale ougandaise à la même date de Corneille Nangaa, l’ancien président de la CENI (Commission électorale nationale indépendante) qui a pris la tête de l’AFC (Alliance Fleuve Congo) avant de se rallier au M23.
Dans ces conditions, lorsque Joseph Kabila annonce que les conditions d’un dialogue entre les Congolais sont réunies, comme en 2002-2003, il n’y a qu’un pas, que beaucoup franchissent, qui l’accusent d’avoir réuni ses fameuses conditions. Les mêmes qui consistent à dialoguer le couteau sur la gorge et le revolver sur la tempe. Ce qui conduirait inexorablement à négocier le partage de la souveraineté du pays avec des voisins agresseurs.
La pax Kabila serait-elle une paix des guerriers ?
J.N. AVEC LE MAXIMUM