Ruptures de cessez-le-feu en guise d’appels du pied en direction de la médiation ? C’est l’avis partagé par certains observateurs de la situation sécuritaire à l’Est de la RDC, qui ne s’expliquent autrement comment les phalanges rwandaises AFC/M23 poursuivent affrontements et occupations des localités malgré les cessez-le-feu obtenus par les Etats-Unis et convenus à Luanda entre la RDC et le Rwanda.
Mercredi 7 août 2024, de violents affrontements ont ainsi repris tôt le matin entre les terroristes M23/AFC et les FARDC soutenus par les Wazalendo à Nyakakoma, dans le territoire de Rutshuru. L’enclave de pêche, également dernier village du territoire à la frontière avec l’Ouganda est rapidement passé sous contrôle des assaillants.
Samedi 3 août, quelques heures avant l’entrée en vigueur du cessez-le-feu conclu à Luanda entre Kinshasa et Kigali, les terroristes M23/AFC avaient pris possession, sans combats parce que les FARDC étaient absents de la région depuis des lustres, de la cité stratégique de Nyamilima. Un jour plus tard, dimanche 4 août (date d’entrée en vigueur du cessez-le-feu), la cité frontalière d’Ishasha (60 km de Rutshuru-Centre) était également occupée sans affrontements, mais avec force publicité. Des images vidéo larguées sur internet présentaient des troupes terroristes accompagnées de chars de combat (de l’armée ougandaise) entrée triomphalement dans la cité. C’est à peine si quelques escarmouches ont été rapportées, qui auraient opposé des combattants Wazalendo à peine armés, selon des sources locales, aux terroristes, notamment à Busanza.
Théâtralisation
Il y aura donc eu une théâtralisation de l’occupation de Nyamilima et d’Ishasha, selon nos confrères de Les Coulisses. Les FARDC s’étaient retirées de cette région depuis son occupation par la force de l’EAC (contingent ougandais !) en novembre 2022. Et la MONUSCO, qui entretenait une base à Nyamilima, l’avait fermée, permettant aux RDF de déloger les FDLR des localités voisines de Ngwenda, Kiseguru, Katwiguru, et Kiswaro. «C’est que la RDF vient de faire, c’est la réoccupation des positions de la Force régionale de l’EAC dans sa partie occupée par l’UPDF», écrit Les Coulisses. Selon nos confrères, la théâtralisation de Nyamilima vise, entre autres, à accréditer la thèse selon laquelle les conclusions de Luanda du 31 juillet 2024 ne concernent pas les phalanges rwandaises du M23/AFC, non signataires des accords qui ne les mentionnent même pas.
Avant l’expiration de la trêve humanitaire obtenue par les Etats-Unis, le 3 août 2024, des combats avaient ainsi été signalés vendredi 2 août sur la route Kiwanja-Ishasha dans la chefferie de Bwisha. La radio Okapi a rapporté l’occupation des villages de Ngwenda, Nyabanira, Kasave, Kiseguro, Katwiguru, et Kisharo. Même si diverses sources relativisent l’ampleur de ces affrontements dans une zone réputée abandonnée par les FARDC.
Transplantations
Parallèlement à ces opérations militaires, des sources dans la région font état de transplantations de populations dans les zones occupées par Kigali et ses supplétifs. De prétendus réfugiés congolais au Rwanda sont installées dans les zones occupées par les terroristes. Le premier groupe, composé en majorité de femmes et d’enfants, est arrivé samedi 3 août 2024 dans la cité de Kitshanga en territoire de Masisi. «Les leaders du M23 ont dit que toutes les maisons abandonnées soient habitées», a rapporté un habitant. «Ils ont dit qu’il y a des personnes qui sont à Bwiza qui doivent venir occuper ces maisons. Nous nous sommes rendus compte que ces personnes ne viennent pas de Bwiza, certains parmi eux sont des réfugiés qui ont quitté ici depuis plusieurs années. Nous voyons seulement des gens venir occuper des maisons et malheureusement nous ne pouvons rien dire à ce sujet», rapporte pour sa part, Nyamuremye Jean-Bosco, un autre habitant cité par Daniel Michombero, un confrère actif dans la région.
J.N. AVEC LE MAXIMUM