La manifestation organisée mardi 18 janvier 2022 à Lubumbashi par l’AFBC de l’ex-AFDC Nene Nkulu et la «Communauté Katangaise», interdite par la Mairie et dispersée par la police, occasionnant plusieurs blessés suscite encore des réactions en sens divers.
Du côté du gouvernement, le ministre de l’Intérieur a suspendu, lundi 24 janvier, le Maire de la ville de Lubumbashi à qui il reproche des tergiversations ayant mis à mal l’intervention des forces de police et entraîné les incidents déplorés à Lubumbashi.
En effet, le maire de la capitale du cuivre Ghislain-Robert Lubaba Buluma avait d’abord autorisé la marche programmée par l’Alliance des Forces pour le Bien-être des Congolais (AFBC) et la Communauté Katangaise avant de se raviser et de l’interdire, sans en informer les organisateurs, selon l’ACAJ.
Dénonciations
Du côté des organisations de la société civile, outre l’ACAJ, qui condamne ce mouvement de yo-yo du maire, on conteste le nombre de blessés avancé par les organisateurs et on conseille au révérend Ngoy Mulunda d’adresser une demande de grâce en bonne et due forme au président de la République.
Le Conseil de l’Apostolat des Laïcs Catholiques du Congo (CALCC) s’est invité dans le débat le 26 janvier. Son président Me Jean-Bosco Lalo a condamné «la barbarie» qui a caractérisé, selon lui, la répression de la marche du 18 janvier «contre des Congolais qui ont pacifiquement manifesté à Lubumbashi pour la libération du pasteur Ngoy Mulunda». Lalo demande également au chef de l’Etat «d’étendre sa mesure discrétionnaire d’amnistie en faveur du Pasteur Ngoy Mulunda, détenu en prison il y a une année pour délit d’opinion».
Ce n’est pas l’avis de ce professeur de droit pénal de l’université protestante du Congo qui trouve «inconvenant que Jean-Bosco Lalo, un avocat considère le sermon coupe-gorge du révérend Daniel Ngoy Mulunda le 16 janvier 2021 assaisonné d’exhortations à chasser les baluba du Katanga et à faire sécession comme une banale liberté d’opinion».
L’universitaire rappelle que des leaders katangais comme feu Gabriel Kyungu wa Kumwanza, auteur de propos analogues qui avaient provoqué le pogrom contre les kasaïens au début des années ’90 au Katanga, les avait fermement condamnés.
Légèreté ?
La réaction du CALCC, jugée partisane et empreinte de légèreté par nombre d’observateurs, n’est guère éloignée de celle de Mgr Fulgence Muteba, archevêque métropolitain de Lubumbashi que l’on dit très proche de Moïse Katumbi. Dans un communiqué publié le 19 janvier, le prélat a en effet condamné «l’usage intentionnel, délibérément disproportionné, de la force répressive ». Mgr Muteba a assuré également que «dans un Etat qui s’auto-prolamme de droit, il est notoire que le droit de manifester pacifiquement n’est pas une faveur attribuable au gré des humeurs de ceux qui gèrent la chose publique». Comme si, pour cet homme de Dieu, manifester, même pacifiquement, devrait être «attribuable au gré des humeurs des manifestants», selon son contradicteur de l’UPC.
Séparatisme
La manifestation organisée en faveur de la libération de l’ancien président de la CENI semble avoir pris des proportions tribales et séparatistes. Moïse Katumbi Chapwe, ancien gouverneur du Katanga a à son tour condamné avec virulence la répression de la marche du 18 janvier à Lubumbashi. Malgré le fait que lui-même et ses regroupements politiques à l’Assemblée nationale font partie de l’Union Sacrée de la Nation, et donc participent au pouvoir en place. Ce parti pris du patron de Ensemble pour la République, candidat à la candidature à la présidentielle 2023, en faveur des organisateurs d’une manifestation aux relents séparatistes pose problème. Le pasteur Ngoy Mulunda Nyanga a été condamné pour son appel à «chasser les balubas du Katanga et à faire sécession», lequel n’a jamais été nié par quiconque, tout le monde l’ayant entendu les proférer. Les leaders politiques du grand Katanga feraient oeuvre utile à éviter tous propos ou attitudes susceptibles d’être assimilés à un soutien au séparatisme comme le suggère un autre leader katangais, l’avocat et ancien ministre Muyambo Kassa, qui en a appelé à l’unité katangaise dans le dossier Ngoy Mulunda en souhaitant une réconciliation entre Katumbi et Joseph Kabila pour parfaire cette unité. C’était déjà le credo embrayé par le pasteur méthodiste, qui lui a valu d’être condamné par un tribunal de Lubumbashi à 3 ans de prison fermes.
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