C’est dans une véritable tentative d’interdire à la RD Congo de gouverner son propre territoire et d’en gérer les ressources naturelles que se sont lancées sans vergogne, dimanche 12 novembre 2017, un groupe d’organisations non gouvernementales internationales prétendument (mais surtout opportunément) vouées à la protection de l’environnement. Dans une déclaration signée à Bonn en Allemagne, Global Witness, Rainforest Foundation Norvège, Rainforest Foundation UK, Greenpeace et le Réseau des Ressources Naturelles s’attaquent à l’unisson à la perspective envisagée par les autorités congolaises de lever le moratoire à l’exploitation forestière annoncée la semaine dernière par le gouvernement. Motif : « Une expansion de l’exploitation industrielle en conséquence de la levée du moratoire provoquerait un raz de marée de destruction environnementale, d’abus sociaux et de corruption dans la deuxième plus grande forêt tropicale du monde. Cela entraînerait également une augmentation significative des émissions de carbone, y compris (celles) provenant d’importantes tourbières récemment découvertes, qui reposent sous de larges zones de la forêt de la RDC », selon ces organisations qui, ainsi, semblent se préoccuper du bonheur des Congolais plus que les Congolais eux-mêmes, et s’érigent en décideurs de la contribution du pays de Lumumba au bien-être de la planète en lieu et place des autorités légitimes de ce pays. Mais dissimulent difficilement leur volonté de régenter la gestion des ressources naturelles du pays, parce qu’un peu plus loin, Global Witness et cie s’inquiètent particulièrement « de voir le Ministère de l’Environnement et du Développement durable proposer la cession de droit portant sur deux millions d’hectares de forêt à Silvere, une société inconnue, en échange de son soutien financier à la levée du moratoire ». Comme si le gouvernement d’un Etat souverain avait l’obligation de cogérer ses ressources, naturelles ou autres, avec des ONG internationales dont on sait depuis peu en RD Congo, qu’elles elles-mêmes sont financées par de puissants groupes d’intérêts… financiers. C’est ici que le bât blesse.
Déni de gouverner
Selon les informations parvenues au Maximum, Global Witness et autres réagissent en fait à l’organisation d’un atelier de réflexion préparatoire à la levée du moratoire forestier en RD Congo, depuis vendredi 10 novembre dernier. Une levée qui vise, selon les explications du Dr. Amy Ambatobe, le ministre congolais de l’Environnement et du Développement durable, à garantir la gestion durable des ressources forestières et spécifiques, à collecter et analyser les données pertinentes sur les conditions de la levée du moratoire, à amorcer les consultations entre parties prenantes concernées et à évaluer les acquis déjà enregistrés. Le gouvernement avait suspendu l’octroi de nouvelles allocations forestières par un moratoire (arrêté ministériel du 14 mai 2002) en attendant des nouvelles règles d’adjudication en la matière. Un Décret présidentiel pris le 24 octobre 2005 fixe les modalités de conversion des anciens titres forestiers en contrats de concession forestière, a expliqué le ministre.
Néanmoins, la levée du moratoire reste suspendue à trois conditions : la publication des résultats définitifs du processus de conversion des titres, la résiliation effective des titres non convertis, ainsi que l’adoption d’une programmation géographique des futures allocations. Les deux premières conditions étant réalisées, ne reste donc plus que l’adoption d’une programmation géographique des futures allocations, à laquelle des organisations non gouvernementales se sont attaquées avec une rare véhémence à Bonn dimanche 12 novembre dernier.
Avantages économiques
Le Gouvernement rd congolais estime, en effet, que la levée du moratoire présente des avantages considérables pour le pays, notamment, en permettant d’accorder les superficies forestières au plus offrant avec comme corollaire la création de plus d’emplois et d’unités de transformation plus poussée du bois, susceptible d’apporter une plus-value aux produits issus de l’exploitation forestière par les entreprises industrielles du pays.
La politique gouvernementale en cette matière est soutenue par la Fédération des entreprises du Congo (FEC), qui plaide en faveur de la levée de ce moratoire qui a entraîné une exploitation illégale et incontrôlée de l’espace forestier jusque dans les régions comme le Katanga, le Nord-Kivu, le Maniema, et le Sud Kivu, pourtant dépourvues de concessions forestières dignes de ce nom.
Le développement industriel ambitionné par la RD Congo devrait donc selon ces entités particulières occidentales cornaquées par des intérêts mercantilistes interlopes être subordonné à la volonté de ceux-ci de maintenir les forêts nationales en l’état, au nom de principes par ailleurs très discutables parce que d’observation unilatérale. Tout se passe comme si l’Afrique en général, et la RD Congo en particulier, devraient demeurer ces terres sauvages où les nations industrialisées d’occident continueraient à s’approvisionner en ressources de toutes sortes, y compris environnementales, sans contrepartie. Ce qui n’est pas sans rappeler les raids esclavagistes motivés par les nécessités de développement d’économies occidentales. Ou encore les colonisations au nom des œuvres missionnaires « civilisatrices » qui ont appauvri le continent exploité de manière éhontée par la même communauté occidentale.
Terres sauvages à la disposition régalienne de puissances financières
Les ONG réunies à Bonn le week-end dernier n’y vont pas avec le dos de la cuillère dans ce dossier, et se croient fondées de donner au gouvernement de la RD Congo des injonctions, qu’elles n’osent guère formuler à l’égard des plus grands pollueurs de l’univers, qui se recrutent parmi leurs pays d’origine. « Nous appelons le gouvernement de la RDC à renoncer à son projet de lever le moratoire sur l’exploitation industrielle des forêts, à déclarer le maintien du moratoire et à annuler et publier les informations relatives à tout accord passé avec la société Silvere. Nous encourageons la communauté internationale à soutenir le gouvernement de la RDC pour l’annulation immédiate des cinq millions d’hectares de concessions forestières qui opèrent actuellement dans le pays sans plan de gestion, et sont donc en situation d’illégalité », écrivent-elles. Mais en RD Congo, la pilule ne passe pas. Plus comme avant, depuis que l’opinion sait de quoi il retourne avec ces prétendues ONG derrière lesquelles, de plus en plus, se dissimulent de puissants intérêts financiers, voire stratégiques. « Ce sont les anciens colonisateurs qui dictent ainsi leur volonté au reste du monde », explique ce professeur de droit international qui rappelle que s’agissant de la RD Congo, il y a à peine quelques années, de millions de réfugiés Hutus rwandais protégés par la communauté avaient irrémédiablement détruit l’écosystème des provinces du Kivu sans qu’aucun de ces donneurs de leçons de moralité environnementale ne lève le plus petit doigt pour appeler à la fin du saccage. De l’imposture.
J.N.