C’est au Tribunal de Commerce de Kinshasa Gombe que la société de télécommunication Vodacom Congo est attraite pour manipulation illicite du compte m-pesa du capitaine Tuluka Mwanda, élément des Forces Armées de la République Démocratique du Congo (Fardc), décédé au front à Kisangani en juillet 2015. Au cours d’une audience publique au Tribunal de céans, les avocats des différentes parties ont étalé leurs moyens de défense. L’avis du Ministère public donné, l’affaire a été prise en délibéré pour un jugement dans les prochains jours, a-t-on appris.
Lutonda Tuluka Jean Serge, le père du militaire, vient dans cette action en qualité liquidateur de la succession Tuluka Mwanda. Ce dernier, après à sa mort, a laissé un compte m-pesa approvisionné de 3000 USD et 501.000 FC. La succession réunie pour trouver les voies et moyens d’accéder au compte du défunt constatera que le numéro était bloqué, et plusieurs retraits effectués après la mort du capitaine Tuluka Mwanda. En 5 jours, le compte avait été vidé. Une nouvelle carte-sim (une puce) sera établie à la demande de la succession. Mais jusqu’au jour du procès l’accès au compte s’avérait impossible. Nous avons contacté Vodacom Congo par voie de correspondance, un relevé de retraits nous a été remis, plusieurs retraits ont été effectués, mais la société de télécommunication a été incapable de nous fournir le numéro et l’identité du bénéficiaire, explique l’avocat de la partie demanderesse.
Si la succession n’a pas pu accéder au compte du défunt, c’est aussi parce qu’elle ignorait le mot de passe, que seul Vodacom pouvait débloquer et permettre d’y accéder. Mais elle ne l’a pas fait : il y a eu manipulation illicite du compte du défunt, a soutenu l’avocat. Que Vodacom soit condamnée au payement de dommages-intérêts et à la restitution des différentes sommes, puisqu’elle est la seule à connaitre le mot de passe du défunt, a conclu cet avocat-conseil.
Vodacom rejette toute responsabilité
Le conseil de la Société Vodacom Congo a pour sa part soulevé le défaut de qualité dans le chef de la personne qui este en justice contre sa cliente. Sieur Jean-Serge Lutonda Tuluka, le père du défunt, n’a pas apporté la preuve qu’il est propriétaire du numéro m-pesa. Il n’est pas lié par un contrat avec Vodacom. En plus du fait qu’il agit pour le compte de la succession sans apporter un Procès-Verbal de Conseil de famille. Le demandeur a apporté une attestation de composition de famille. Le De cujus a laissé 5 enfants vivants, et le demandeur ne se retrouve pas sur la liste de ces enfants, a encore avancé le conseil de Vodacom. Pour qui ce sont ces enfants qui sont les héritiers de la première catégorie et qui pourront un jour saisir la justice et revendiquer leur droit.
Le service m- pesa est sécurisé, il exige un numéro vodacom puis un code que seul le propriétaire détient. Ne peut accéder au compte que celui qui a ces deux éléments. Le demandeur ne conteste pas qu’on lui a remis le relevé des retraits du De cujus, le seul à disposer des différentes sommes. Dans un Procès-Verbal de restitution des biens, il a été remis même le code de son compte bancaire, ce qui n’exclut pas la possibilité qu’il ait confié son code secret m-pesa à une autre personne, a fait remarquer le conseil de Vodacom. Pour qui de tels retraits n’engagent en rien la société qui n’a fait que répondre aux besoins du client. Le retrait s’effectue sans présentation de quelque pièce d’identité que ce soit. Il faut tout simplement avoir le code secret, a-t-il expliqué.
Le demandeur a obtenu un jugement attestant de sa qualité de liquidateur de la succession pour faire condamner Vodacom, c’est une mauvaise foi manifeste, selon l’avocat de l’entreprise de communication. Pour qui l’action initiée est irrecevable. Si le Tribunal passe outre, il la dira non fondée. Que le Tribunal le condamne à 500.000 USD de dommages-intérêts pour procès téméraire et vexatoire, a-t-il conclu.
Dans ses moyens de réplique, le demandeur a fait savoir que le jugement de liquidateur qu’il a obtenu n’a fait l’objet d’aucune opposition. Après la mort du défunt, ses collègues ont répertorié ses différents biens et fait un rapport à la hiérarchie. Dans ce rapport, il a été mentionné la présence d’une carte sim avec compte m-pesa, dont les sommes contenues étaient non connues par manque de code secret. Même ses proches ne le connaissaient pas, a fait remarquer l’avocat de cette partie au procès.
Aussitôt Vodacom saisi du contentieux au mois de septembre 2015, la carte sim a été bloquée dans les 2 jours qui ont suivi. Au mois d’aout, il y avait eu des retraits sur demande et au bénéfice d’une personne que la famille ne connaît pas. Seul Vodacom pouvait aider à accéder à ce compte puisque les documents requis lui ont été présenté. Mais l’entreprise n’a pas accédé à la demande de la famille, a expliqué l’avocat. Pour lui, il n’est donc pas question de condamner son client puisqu’il a subi des préjudices dans cette affaire. Vodacom devra assumer ses responsabilités puisqu’elle a laissé quelqu’un faire des retraits post mortels, elle n’arrive pas à prouver l’innocence de ses agents, selon cet avocat.
Le conseil de la Société Vodacom a répliqué en arguant que l’entreprise ne peut pas donner le numéro du bénéficiaire des différentes sommes puisqu’elle n’a reçu aucun ordre du Parquet. Il n y a que ce dernier qui peut lui demander de livrer le nom du bénéficiaire, cela ne se fait pas à la demande d’une partie, a-t-il fait savoir. Dire irrecevable la présente action, si le Tribunal passait outre, la déclarer non fondée, a-t-il conclu.
RBV