Echec et mat sur toute la ligne. C’est le moins qu’on puisse dire de la marche annoncée par le présidium Lamuka et organisée en dépit de l’inter¬diction des autorités urbaines à Kinshasa par Martin Fayulu et quelques affidés. Dans les rues de la capitale rd congolaise, la marche prévue pour partir de toutes les 24 communes à la fois n’a pas eu lieu faute de manifestants. Ce ne fut pourtant pas faute d’avoir tenté. Pour réussir son coup, Fayulu s’était rendu dans les quartiers chauds de l’Est de Kinshasa, près du marché de la Liberté à Masina où des incidents violents éclatent habituellement en pareilles circonstances. Mais le 30 juin dernier, il a fait choux blanc. Seulement quelques dizaines de manifestants ont tenté de battre le pavé à ses côtés, avant d’être dispersés sans peine par les pandores du général Kasongo qui ont convaincu les leaders Lamuka de rentrer chez eux. Pas d’incident majeur donc, contrairement à l’objectif manifestement pour¬suivi par le candidat malheureux à la présidentielle 2018, qui est apparu particulièrement esseulé dimanche dernier. Ainsi que le confirment ses vociférations. Le communiqué rendu public quelques heures plus tard par le commissariat provincial de la PNC note à peine « quelques tentatives de troubles à l’ordre public de la part de certains responsables politiques de Lamuka, notamment dans un coin de la partie Est de la ville ». Le général Sylvano Kasongo, qui signe le communiqué, renseigne que « toutes les personnes interpellées ont été aussitôt relâchées. Un seul individu est toujours détenu pour avoir agressé et blessé grièvement un policier. Il sera remis aux autorités judiciaires pour répondre de son acte ».
Mensonges
Cela n’a pas empêché Martin Fayulu de monter au créneau pour se poser en victime. « Ils ont multiplié la violence par dix ». « C’est de la barbarie. La police a violenté la population. Ils ont réussi à étouffer la marche. Kabila impose à Tshisekedi ses méthodes », a-t-il notamment déclaré à qui voulait bien lui tendre un micro. Mais la sauce ne tient plus comme avant, lorsqu’il suffisait d’accuser pour être cru sur parole. « Aujourd’hui, l’opinion n’a plus besoin de paroles, une image suffit, qui fait aussitôt le tour des réseaux sociaux. S’il y avait eu la moindre bavure, on l’aurait su avant la fin de la jour¬née », explique un kinois bon teint attablé devant l’écran-TV diffusant le match des Léopards dans un bar-terrasse de Lemba. « Nous avons des citoyens qui ont été blessés, nous les avons emmenés dans les hôpitaux. Les policiers se sont donnés à coeur joie dans les actes illicites », ânonnait pourtant Fayulu, délaissant momentanément ses revendications sur la « vérité » des urnes. Parce qu’elles attiraient moins l’attention, même à Kinshasa où l’opinion était plus préoccupée du sort de la sélection nationale de football que du contenu virtuel des urnes lors des élections d’il y a 6 mois.
Lamuka Ouest ne doit pas le fiasco de dimanche dernier à la seule interdiction de l’Hôtel de Ville, du reste. C’est la dimension réelle de Fayulu et de son compère Adolphe Muzito qui ont crevé les yeux en réalité. Dans les quartiers chauds de Masina, comme un peu partout ailleurs dans les 24 communes de la ca¬pitale d’où devaient converger des grappes incontrôlables de militants Lamuka vers la Place de l’Echangeur de Limete, nul autre leader de la plateforme genevoise n’a été aperçu arpen¬tant le plus petit bout de trottoir. Devant le siège du MLC de Jean- Pierre Bemba à Kasavubu était pourtant postée une escouade de policiers baillant d’ennui, en l’absence des leaders du parti. Jean-Pierre Bemba en tête, ils avaient filé tôt vers Gemena où devait se tenir la commémora¬tion du décès de Bemba père, un jour plus tard.
Aucun leader Lamuka
Seul Chérubin Okende, porte-parole du porte-parole du présidium Lamuka a été entraperçu dimanche dernier avant de disparaître des écrans. Katumbiste, cet élu national dernière¬ment invalidé par un arrêt de la Cour constitutionnelle est connu pour sa loquacité mais pas pour drainer derrière lui des foules qui ne comprennent rien à son jargon, de toute façon. A Goma, le fief de Lamuka Est où Chérubin Okende aurait eu plus de chance de réussite, la marche organisée dimanche dernier consacrait les divergences des vues entre les tendances de la plateforme. Ici, nulle revendication de « vérité » des urnes. Les manifestants extrêmement violents, furieux de l’invalidation de députés élus sur les listes Lamuka et des problèmes consulaires de Salomon Idi, un proche collaborateur de Moïse Katumbi, s’en sont pris à du mobilier urbain. Ils ont été dispersés par la police qui a usé d’armes létales pour faire face « à des bandes armées qui se sont confondues aux manifestants », selon le général Nyembo. Après une fausse rumeur faisant état de la mort par balle d’un manifestant, on a appris que ces manifesta¬tions du 30 juin 2019 se sont en réalité soldées à Goma par un blessé par balles, un officier de police grièvement blessé et un minibus incendié. Mais ce ne fut pas pour la vérité des urnes.
J.N.