Par Lambert Mende Omalanga*
Peu après la chute du mur de Berlin en 1989 et le sommet France-Afrique de La Baule en 1990, les acteurs politiques congolais ont vécu une époque où il fallait hurler avec les loups de la bien-pensance occidentale pour attirer l’attention des dispensateurs de la crédibilité et des subsides. C’était l’époque de la dictature du parti unique. Quiconque voulait émerger dans le landerneau politique devait emboucher les trompettes de la diabolisation du Maréchal-Président Mobutu Sese Seko. Trois décennies plus tard, la démocratie a été instaurée dans ce pays. Il ne suffit plus de ruer dans les brancards des sentiers battus par les générations précédentes qui ont anéanti nos chances de tutoyer le développement et l’émergence pour se maintenir à flot. Les temps présents imposent de faire un usage modéré de l’hystérie qui conduit à multiplier les légendes infamantes contre un régime en place quoiqu’il fasse.
En cela, la dernière sortie de notre collègue, le député national Delly Sesanga, donnant à croire sans élaboration étiologiquement soutenable que l’État congolais est congénitalement et irrémédiablement voué à la faillite provoque plus de chaleur que de lumière. Pire, elle donne du grain à moudre aux officines racistes et suprématistes néolibérales occidentales, artisans décomplexés des théories de saucissonnage du Congo, décrété «État failli» et à leurs relais zélés dans la région. Sesanga s’est engouffré avec un aplomb excessif dans les fourches caudines de ceux qui, outre-Atlantique et outre Méditerranée, se sont jurés de rayer son pays de la carte dans ses frontières héritées de la colonisation en y déployant de funestes stratégies dont les stigmates s’affichent en termes d’agressions, de mutineries, de rébellions et de guerres civiles sanglantes. Seule la volonté inébranlable et incompressible du peuple congolais de rester uni a permis au Congo, ce «don béni des aïeux» d’échapper à une atomisation programmée par les précurseurs des suprématistes contemporains dès l’aube de l’indépendance en 1960 pour faire payer à nos aînés leur opiniâtreté à exiger l’indépendance. Patrice-Emery Lumumba le leader du mouvement indépendantiste s’était insurgé à bon escient contre ce projet de «balkanisation du Congo».
On se perd en conjectures sur les motivations réelles de ceux de nos concitoyens qui se complaisent dans un rôle de relais des légendes désobligeantes sur leur propre pays initiées par ces forces conservatrices extérieures. Insensibles à l’incidence de leurs discours pessimistes sur l’image, les intérêts et l’attractivité du Congo, ils s’évertuent à dépeindre ce pays comme l’enfer sur terre et ses dirigeants comme les pires de la planète. Si le fabuliste Georges Remi alias Hergé a entretenu des atavismes racistes avec sa bande dessinée ‘’Tintin au Congo’’, c’était de bonne guerre pour le Belge qu’il était, ces remugles étant plus ou moins conformes aux Intérêts Nationaux de son pays. On peut dès lors interroger les fins poursuivis par les fiers-à-bras comme Delly Sesanga qui s’enorgueillissent de ne faire connaître leur pays que par le prisme de ses réalités les plus affligeantes ?
Alors que la rébellion armée qui déstabilise la région sénégalaise de Casamance dont est originaire le célèbre footballeur international Sadio Mané n’est pas brandie à tout bout de champ par les acteurs politiques de ce pays africain où majorité et opposition se gardent bien de persifler à longueur de journées sur cette situation calamiteuse, quelques opposants congolais à l’instar de notre collègue Delly Sesanga ont fait de l’occupation de la bourgade de Bunagana aux confins du Nord-Kivu une sorte de fonds de commerce. On a beau concéder que ce député est l’un des plus brillants de cette législature, ses dérivations dans le Congo Bashing, un concept sur lequel François Soudan de Jeune Afrique a disserté talentueusement il y a quelques années en le définissant comme «la tendance à médire systématiquement sur le Congo et les Congolais» donnent de la consistance à l’axiome selon lequel tout ce qui brille n’est pas d’or.
Soixante ans après l’accession du pays à la souveraineté nationale et internationale, les Congolais ont tout à perdre avec cette pratique contre-nature qui ne se définit que par la proximité de leurs auteurs avec l’ancienne métropole coloniale et ses alliés.
Certes, le pouvoir n’a pas le monopole de la raison et l’existence d’une opposition reste indispensable au métabolisme de tout État démocratique qui se caractérise essentiellement par le pluralisme d’idées et d’opinions. Mais une opposition ne peut être socialement utile que si, et seulement si, elle est porteuse d’une alternative crédible et avouable pour le bien de la communauté nationale.
Il est heureux que le président Félix-Antoine Tshisekedi, ancien opposant arrivé au pouvoir fin 2018, ait conservé au plus profond de lui-même cette rare capacité qui le pousse à dénoncer à temps réel les tares et les dysfonctionnements qui entachent la gouvernance dont il a la responsabilité. C’est le cas des cartons jaunes qu’il a décerné à haute et intelligible voix à des technostructures comme les forces de défense dont il est le commandant suprême et à la justice à la tête de laquelle il trône en qualité de magistrat suprême. Il n’est pas juste de lui en faire grief ou d’en tirer prétexte pour une glose impertinente destinée à servir des agendas cabalistiques.
La saillie effrontée du député Delly Sesanga n’empêchera pas les aux Congolais de faire la part des choses entre une opposition républicaine qui tire la nation par le haut et les bourdes surannées de forces réactionnaires néo-colonisées enclines au ressassement des diatribes agréables aux oreilles de leurs mentors mais avilissantes pour la patrie. Malgré la crise sécuritaire et humanitaire provoquée par l’agression militaire du pays dans quelques territoires des deux provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri, partout ailleurs, les parents d’élèves de l’enseignement fondamental qui voient quotidiennement leurs bambins aller à l’école gratuitement, les fonctionnaires dont les conditions salariales ont été tant soit peu améliorées, les usagers de certaines voies publiques secondaires qui ont revêtu l’asphalte dans une ville comme Kinshasa, les fonctionnaires qui expérimentent la couverture santé universelle, les femmes qui commencent à accoucher gratuitement dans la capitale de même que les habitants de l’hinterland congolais qui bénéficient de plus de projets d’investissement grâce à la remarquable augmentation du budget des recettes de l’État etc. savent que la RDC avec Tshisekedi progresse dans la bonne direction. –
*Député National