La mise en œuvre de l’état de siège décrétée par le président de la République, fin mai dernier, dans les provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri fait de nouveau face à des pulsions démobilisatrices internes qui en avaient sérieusement compromis le succès il y a quelques mois.
Alors que l’Assemblée nationale et le Sénat venaient d’adopter une nouvelle prorogation de la mesure exceptionnelle prise pour tenter de ramener la paix dans cette partie du territoire nationale perturbée depuis plus deux décennies, cinq élus nationaux ont déposé mardi 19 avril au bureau de la chambre basse du parlement une proposition de loi mettant fin à l’état de siège dans les deux provinces. Les députés nationaux Musemo Daniel, Katembo Thadée, Ausse Jackson, Mumbere Remyxon et Kambale Alexandre assurent s’appuyer sur les articles 144 de la constitution et 163 du règlement intérieur de l’Assemblée nationale pour soutenir leur initiative. Une initiative qu’ils justifient également par la mutualisation des forces entre les armées congolaise et ougandaise qu’ils estiment suffisante pour régler l’équation sécuritaire dans cette partie du pays.
Le 20 avril 2022, même son de cloche à travers des médias locaux appelant au rétablissement du gouverneur civil du Nord-Kivu, Carly Nzanzu Kasivita, dans ses fonctions d’avant l’instauration de l’état de siège. Motif avancé, pêle-mêle : l’état de siège a montré ses limites dans la recherche de la paix au Nord-Kivu ; la résurgence de la rébellion du M23, la persistance des forces négatives en territoire de Masisi.
Cette réapparition des pulsions démobilisatrices contre l’état de siège survient moins d’une semaine après une mission d’évaluation conduite du 12 au 14 avril 2022 par le premier ministre Sama Lukonde sur recommandation, entre autres, de la commission Défense et sécurité de l’Assemblée nationale, dont on attend encore les conclusions. Mais aussi, alors que les forces conjointes FARDC-UPDF engagées au front dans la région de Beni et en Ituri multiplient les assauts contre les rebelles ADF et les milices locales. Non sans succès, au point d’amener les miliciens du groupe armé CODECO, par exemple, à exiger la fin de ces opérations à travers une prise d’otages des membres de la Task Force présidentielle pour l’Ituri qui a résolument tourné en eau de boudin il y a quelques jours.
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Depuis lundi 18 avril 2022, les FARDC et l’UPDF ont entamé le bombardement à l’aide de drones des derniers bastions de retranchement des ADF sur le Mont Oyo, non loin de la cité de Komanda en territoire d’Irumu (Ituri). En même temps que des offensives terrestres étaient engagées derrière les grottes de cette colline d’où sont planifiées les attaques contre les populations civiles.
Il est également rapporté qu’en séjour dans le chef-lieu de la province de l’Ituri depuis le début de la semaine, les chefs d’Etat-Majors des armées congolaises et ougandaises, les généraux Célestin Mbala et Wilson Mbandi, ont clôturé mardi 19 avril les travaux d’évaluation des opérations militaires engagées fin novembre dernier. Et ont convenu de la nécessité de renforts supplémentaires FARDC et UPDF pour enclencher la troisième phase des opérations shujaa, selon la Vanguard News Uganda.
Des sources officielles à l’ambassade française à Kinshasa révélant de leur côté que 50 militaires français sont déployés dans la région de Kinshasa où ils se chargent de la formation du 2ème bataillon jungle avant son engagement aux opérations à l’Est du pays.
On se perd donc en conjectures face à ce brusque retour des pulsions anti-état de siège au moment le plus crucial.
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