selon un vieil adage, «l’habit ne fait le moine». Cela semble se vérifier au fil du temps au sein du parti politique de l’ex-gouverneur du grand Katanga et candidat déclaré à la prochaine présidentielle, Moïse Katumbi. Après avoir créé la sensation à Kikwit (Kwilu) avec l’inauguration en fanfare d’un bloc sanitaire réfectionné et livré dans le cadre d’une campagne d’adhésion menée tambour battant par Olivier Kamitatu, un natif de la région, le chairman du TP Mazembe a inauguré à Lubumbashi (Haut-Katanga) le siège national de son parti, un bloc de 4 bâtiments comprenant notamment 2 salles de conférences d’une capacité de 100 personnes et un grand parking pouvant abriter des meetings populaires. Ces immeubles construits en 7 mois, sont situés sur l’avenue Kamanyola, à quelques encablures du gouvernorat du Haut-Katanga.
Réalisations
Dimanche 20 février, les partisans de Ensemble pour la République ne tarissaient pas d’éloges sur les aptitudes de Moïse Katumbi à «reconstruire» et à «rebâtir». Pour Dieudonné Bolengetenge, secrétaire général du parti katumbiste, son président est «un homme de paix, digne de confiance, capable de contribuer à la transformation de la RDC». Mais cela, c’est de l’habillage, manifestement. Parce qu’en réalité, Ensemble pour la République est en train de se vider de ses cadres au fil des jours, une hémorragie qui remonte à plusieurs mois et révèle les vrais motifs du silence de mort de l’ancien gouverneur katangais autour de la question de son appartenance ou non à l’Union sacrée de la nation, la plateforme de Félix Tshisekedi dont il convoite le fauteuil présidentiel.
Fin janvier, les rangs de EPR ont été littéralement ravagés par la défection d’une quarantaine d’élus selon les termes de la déclaration lue devant les médias par le RCD-K-ML Grégoire Kiro Tsongo. 40 députés nationaux, cela fait beaucoup trop de défections à un an de la présidentielle. Quelles que soient les qualités intrinsèques du candidat déclaré et les réalisations inaugurées à grand renfort de publicité.
Défections
Les élus ne sont les seuls à quitter le navire. Au gouvernement, presque tous les ministres katumbistes ont fait publiquement ou discrètement allégeance à Félix Tshisekedi, le président de la République dont ils préfèrent la candidature à celle de leur mentor. Au moins 4 ministres se sont publiquement prononcés à ce sujet. A l’instar de Séraphine Kilubu Kutuna, vice-ministre à la Défense nationale qui s’était déjà illustrée auparavant en refusant de suivre Delly Sessanga, son chef de parti (Envol) qui avait pris ses distances avec l’Union sacrée de la nation. «Le chef de l’Etat est mon frère en Christ, je ne peux pas le quitter. Je suis appelée à le soutenir, ainsi que le gouvernement auquel j’appartiens», avait-elle déclaré.
Est venu ensuite le tour du ministre MSR/Lumbi des Affaires sociales, actions humanitaires et solidarité nationale, le kasaïen Modeste Mutinga Mutuishayi qui, au cours d’une manifestation de son parti, a déclaré sans ambages que «mon parti et moi-même sommes foncièrement convaincus qu’avec Félix-Anntoine Tshisekedi à l’issue des élections de 2023, la RDC notre pays connaîtra une embellie spectaculaire en Afrique et à travers le monde. D’où notre soutien à sa candidature».
Réalpolitik
Vice-premier ministre, ministre des Affaires Etrangères, l’ADP/MSDD Christophe Lutundula Apala a fait sensation dans une interview accordée à nos confrères de RFI en proclamant urbi et orbi son allégeance au président de la République. Pour des raisons relevant de la logique élémentaire, selon lui. «Je travaille aux côtés du président Tshisekedi, le bilan du gouvernement est aussi le mien. Le président Tshisekedi a eu un premier mandat, c’est un mandat de déminage car la situation dont il a hérité est tellement catastrophique Il doit continuer pour poursuivre ce travail mais surtout accomplir son projet après le déminage» s’était-il justifié. Sur la lancée de ses propos, ce technocrate dont on assure qu’il doit sa présence au gouvernement au choix personnel du président semble vouloir encore cacher son jeu. «Je suis dans Ensemble pour la République avec Moïse Katumbi. Il sait que je travaille aux côtés de Félix Tshisekedi. Je ne sais pas s’il sera candidat en 2023 mais je l’ai déjà dit : le président Félix Tshisekedi a droit à un second mandat, c’est constitutionnel», argue-t-il encore. C’est clair comme de l’eau de roche : Christophe Lutundula aurait voulu prier son mentor de taire ses ambitions présidentielles pour 2023 qu’il ne s’y serait pas pris autrement.
Restent trois autres membres du gouvernement issus des regroupements katumbistes, le Nord-Kivutien Muhindo Nzangi de l’Enseignement supérieur et universitaire, le katangais Christian Mwando Nsimba, du Plan et le Sankurois Chérubin Okende Senga des Transports et voies de communication qui se sont gardés de déclaration dans les médias jusque-là. Des sources crédibles renseignent néanmoins que ce n’est que partie remise pour Muhindo Nzangi en passe de créer son propre parti politique et Christian Mwando, qui pilote le stratégique programme de développement des 145 territoires de la RDC, dont on dit qu’il a quasiment déjà un pied hors du sérail katumbiste. On en veut pour preuve le fait que parmi les députés nationaux auteurs de la déclaration de défection de fin janvier dernier, figuraient plusieurs élus de son parti politique l’UNADEF. «Nous ne sommes pas tombés là par hasard», explique au Maximum un élu membre du groupe.
Pour affronter la prochaine présidentielle, Katumbi devra donc renouveler de fond en comble ses écuries. Une étape laborieuse en perspective pour le politicien et homme d’affaires katangais qui apprend ainsi à ses dépens que les adhésions politiques n’ont rien de semblable à des contrats commerciaux ou sportifs.
LE MAXIMUM