Les choses vont vite depuis l’annonce de la proclamation de l’état de siège au Nord-Kivu et en Ituri, le week-end dernier. Mardi 4 mai 2021, des ordonnances présidentielles lues sur les antennes de la RTNC ont révélé les noms des 4 officiers généraux des FARDC et de la Police Nationale Congolaise appelés à diriger les deux provinces martyres de l’Est et du Nord de la RDC. Les habituels sons de cloche pessimistes et discordants n’ont pas manqué autour de la décision présidentielle mais il semble qu’elle soit reçue avec soulagement par une grande partie de l’opinion publique.
Ainsi que l’écrit le ministre honoraire de l’Industrie Katomba Kambinga dans un tweet, «la gravité de la situation est telle que la RDC ne peut se permettre des économies d’initiatives et le jugement politique en cette matière ne peut être qu’à posteriori. A priori, il serait prétentieux de se faire grand clerc sur un sujet aussi complexe».
Pour juguler l’insécurité et l’absence de l’autorité de l’Etat dans les territoires de l’Est et du Nord de la RDC, Félix-Antoine Tshisekedi a porté son choix sur les lieutenants-généraux Constant Ndima Kongba et Johnny Luboya Nkashama pour diriger les provinces de l’Ituri et du Nord-Kivu. Ils seront secondés par les commissaires divisionnaires de la police nationale Ekuka Lupopo et Benjamin Alongaboni, respectivement vice-gouverneurs de l’Ituri et du Nord-Kivu.
Anciens rebelles
Chef d’état-major adjoint chargé de l’administration et de la logistique avant sa nomination, Constant Ndima, un ancien de la Division spéciale présidentielle (DSP) sous Mobutu, avait auparavant dirigé la troisième zone de défense FARDC comprenant les provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri, entre autres. Un peu plus connu de l’opinion que son collègue du Nord-Kivu, le gouverneur militaire de l’Ituri a été également membre de la branche armée du Mouvement de libération du Congo (MLC) de Jean-Pierre Bemba Gombo.
Johnny Luboya Nkashama était jusqu’avant sa nomination commandant de la 1ère zone de défense FARDC dans la province de l’Equateur. Il est, lui aussi, connu pour avoir fait partie de la branche armée du Rassemblement congolais pour la démocratie (RCD), mouvement politique pro-Kigali qui avait administré la quasi-totalité de l’ex-Kivu, à l’exception des terres Nande de Beni-Butembo.
Les objecteurs de conscience qui pullulent en RDC n’ont pas raté l’occasion de passer au crible de la critique, le plus souvent négative, des choix opérés par le président de la République. Il est ainsi relevé le fait que les deux gouverneurs militaires ont fait leurs armes au sein des rébellions qui ont écumé le pays lors de la bien nommée 1ère guerre mondiale africaine. De mauvaises langues les accusent donc d’avoir des relations plus ou moins douteuses avec leurs anciens parrains politiques, ce qui reste à prouver.
Habitués des théâtres des opérations
Du général Johnny Luboya, on prétend qu’il continuerait d’entretenir des relations particulières avec la haute hiérarchie militaire rwandaise tandis que l’on rappelle le passé de Constant Ndima à la tête de l’Armée de libération du Congo (ALC) lorsqu’il partait à l’assaut de cette rébellion dans la rébellion que fut le RCD-K-ML d’Antipas Mbusa Nyamwisi dans le cadre de la tristement célèbre opération «Effacez le tableau» au cours de laquelle les éléments ALC furent accusés d’atrocités contre les pygmées et de pillages réccurents.
Cela ne devrait pour autant pas occulter l’autre face de la médaille. En confiant les deux provinces perturbées de l’Est et du Nord à Constant Ndima et Johnny Luboya, le président Tshisekedi a placé les deux officiers généraux rompus aux combats et maîtrisant bien les espaces territoriaux dont la gouvernance leur revient depuis jeudi 6 mai 2021 devant leurs responsabilités.
A.M