La réaction de Lambert Mende à l’imposition du lingala comme langue pour l’enseignement de base au Sankuru, en remplacement de l’Otetela a fait sortir de leurs tanières André Alain Atundu et Christian Bosembe, tous deux ressortissants de l’ex-Equateur où le Lingala est la langue de communication. Ils s’en sont pris à l’honorable Lambert Mende Omalanga, lui reprochant de défendre l’Otetela qui, pour lui, doit être la langue de l’enseignement de base dans sa province d’origine.
En effet, lundi 15 février 2021, en sa qualité d’élu (pour la troisième fois depuis 2006) de Lodja au Sankuru, l’ancien ministre de la communication et médias et porte-parole du Gouvernement a animé un point de presse pour dénoncer l’initiative conjointe du ministère de l’Enseignement Primaire, Secondaire et Technique et de la Banque Mondiale de substituer le Lingala à l’Otetela dans l’enseignement primaire au Sankuru, en dépit des textes légaux en vigueur qui prescrivent, à ce niveau du processus de formation, d’user des langues locales pour des raisons psycho-pédagogiques plus qu’évidentes.
Pour Lambert Mende, du fait que l’Otetela est parlé par 90% de la population du Sankuru, l’initiative du ministère de l’EPST et de la BM menace la survie socio-culturelle des Atetela. «En ma qualité d’élu direct du Sankuru au Parlement, je dénonce cette façon de faire qui menace la survie socioculturelle des populations de cette partie de la RDC. J’invite mes homologues députés nationaux et sénateurs du Sankuru à se saisir de cette question sur pied de l’article 202 alinéa 23 de la constitution qui aligne les matières exclusives du pouvoir central, l’établissement des normes d’enseignement applicables dans tous les territoires de la République », avait-il soutenu en substance. Estimant qu’«imposer dans cette province une langue qui n’est pas stabilisée dans sa structure, alors que l’Otetela l’est, est une insulte que personne au Sankuru ne tolérera. Il s’agit d’une question d’intérêt vital qui transcende les sempiternelles querelles de positionnement qui opposent les élites sankuroises entre elles ». Mais aussi, que «l’opportunité d’un tel projet en ce moment mérite aussi d’être questionnée. La remise en selle précipitée de ce programme simultanément avec le rapatriement annoncé des reliques du héros national Patrice Emery Lumumba et la mise en œuvre effective de Lumumbaville au Sankuru par le président de la République risque de diluer ce bel hommage de la Nation au père de l’indépendance et de dresser de larges couches des populations de cette province contre le chef de l’État et le nouveau gouvernement qu’il s’apprête à constituer».
Aussi surprenant que cela puisse paraître, c’est de Alain-André Atundu Liongo, président du Conseil d’administration de la SNEL et porte-parole du FCC, pourtant connu pour son degré d’érudition, ainsi qu’un certain Christian Bosembe, manifestement jailli de nulle part, que sont venues les premières agressions médiatiques contre l’élu sankurois. Pire qu’un cheveu dans la soupe. L’un et l’autre, se revendiquant de la qualité de «ressortissants de l’espace lingalaphone» du Grand Equateur et s’arrogent ainsi le droit de parler au nom de ces derniers, ont dénoncé ce qu’ils ont présenté comme une guerre déclarée contre la langue Lingala.
Dans les milieux Tetela de Kinshasa et du Sankuru où ce débat est suivi avec la plus grande attention, cette manie de faire feu de tout bois a plus qu’offusqué. D’autant plus qu’en leur qualité de descendants Mongo, les Atetela peuvent se revendiquer d’incontestables origines équatoriales sans pour autant se fondre dans un hybridisme culturel dont ils estiment qu’il n’y a pas lieu de se gausser outre mesure. «Il s’agit non pas d’interdire l’usage du Lingala par ailleurs répandu au Sankuru comme langue de l’administration, mais de préserver l’usage de l’Otetela comme langue de l’enseignement de base, comme cela s’est fait jusqu’à présent sans que nul ne s’en plaigne», explique-t-on.
Comme un éléphant dans un magasin porcelaine, Christian Bosembe qui ne semble pas avoir remarqué qu’aussi bien le ministère de l’EPST que la Banque Mondiale sont à l’origine de cette véritable bourde culturelle se gardent de mettre de l’huile sur le feu dans ce dossier plus que délicat, y est allé de son cru en déniant toute qualité de vecteur de cultures aux langues, allant jusqu’à contester à un élu du peuple de prendre la défense de la langue dans laquelle il a lui-même été forgé. Les relations langue-pensée-et culture sont pourtant évidentes pour quiconque a dépassé le niveau de l’enseignement … basique dans le cursus de formation. Pas besoin de réinventer la roue sur ces certitudes élémentaires, estiment d’aucuns sur le sujet. La langue est porteuse de culture. Et vouloir l’écraser en en imposant une à près de 90 % de locuteurs Tetela du Sankuru s’apparente à un crime.
Encore qu’on peut questionner la légitimité dont se targuent aussi bien André-Alain Atundu que Christian Bosembe de parler au nom des lingalaphones du Grand Equateur. Surtout si l’on tient à l’esprit que ni l’un ni l’autre n’a jamais réussi à obtenir le moindre mandat représentatif de leur province d’origine depuis l’instauration de la démocratie électorale en RDC. Ceci n’explique-t-il pas cela? Car, parmi les Tetela à Kinshasa ou ailleurs à travers la RDC, nul ne tient ce problème de langue d’enseignement basique pour une affaire de tribalisme. «Que l’on enseigne le Lingala et l’une ou l’autre des trois autres langues nationales aux enfants du Sankuru, oui. Mais que l’on impose aux premières années du primaire dans cette province à plus de 90 % tetelaphone une langue autre que l’Otetela comme langue de premier apprentissage, nous ne pouvons l’accepter car on en fera des zombis ou des idiots d’autant plus que 70% de parents et d’enseignants ne parlent pas une autre langue que l’Otetela», avait, en effet, clairement martelé Lambert Mende au cours du point de presse de la Paroisse Notre Dame de Fatima. Dans ces conditions, Atundu-Bosembe : «de quoi je me même» !
A.M
LINGALA AU LIEU DE L’OTETELA POUR LES ENFANTS DU PRIMAIRE AU SANKURU : Atundu-Bosembe : «de quoi je me mêle»
