«Si c’est ça la lutte de l’UDPS pour toutes les années passées dans l’opposition, c’est vraiment du gâchis », s’étrangle Timothée Mbuya, président de Justicia Asbl, une ONG de promotion des Droits de l’Homme. Dans une déclaration à la presse vendredi dernier, ce juriste s’est exprimé sur les questions relatives à l’effectivité de l’Etat de droit en RDC, après la publication d’une lettre des sénateurs américains et au phénomène dit ‘‘bilanga’’ qui occasionne la fraude douanière à Kasumbalesa (Haut-Katanga).
Pour Me Mbuya, l’Etat de droit en RDC risque de n’être qu’une utopie. Ce défenseur des Droits de l’homme basé à Lubumbashi explique son scepticisme par le morcellement des postes dans la fonction publique entre les seuls vainqueurs aux dernières élections. Il regrette que «chacun ne se préoccupe que de la satisfaction des intérêts de son courant politique ou son autorité morale».
S’agissant de la lettre des sénateurs américains au président Félix Tshisekedi saluant les avancées dans la lutte contre la corruption, le président national de Justicia Asbl estime qu’«on peut tout dire mais il faut savoir que nous sommes au Congo et les affaires congolaises concernent d’abord les congolais. Il me semble déplacé que ce soient les sénateurs d’un autre pays qui se prononcent sur les questions internes d’un autre État, même si cela peut les intéresser».
Justicia Asbl commente également ce qui se passe à Kasumbalesa avec le phénomène dit ‘‘bilanga’’. «On ne peut pas narguer l’autorité de l’État de manière aussi délibérée et rester impuni», a-t-il déclaré. Timothée Mbuya dit ne pas comprendre pourquoi dans cette zone dite ‘‘bilanga’’, il existe des gens qui font pratiquement des appels à la violence et lancent quotidiennement des bordées d’injures envers l’autorité provinciale du Haut-Katanga. «Pourquoi toutes ces personnes qui se rendent coupables de faits infractionnels aussi manifestes ne sont pas poursuivies ?», s’interroge-t-il. Et il interpelle la hiérarchie de l’UDPS. «Ce qui se passe à Kasumbalesa est inacceptable et intolérable. Nul ne peut se substituer à l’Etat, percevoir des taxes, organiser des cachots dans lesquels ils détiennent des gens», dénonce Mbuya qui est revenu sur la vidéo montrant un capitaine des FARDC en train de signer une décharge sous les huées d’une foule de combattants pour faire libérer un de ses éléments séquestré par ces derniers. Il invite les autorités provinciales et nationales à mettre fin à ce qu’il qualifie de non État observé à Kasumbalesa avec ce fameux phénomène ‘‘bilanga’’.
Député national de l’opposition Lamuka, Christian Mwando Nsimba s’indigne de cette chienlit sur son compte tweetter : «Trop c’est trop. Des militaires délogés, des taxes instaurées à la frontière de Kasumbalesa. Maintenant il faut s’arrêter pour laisser lever le drapeau de l’UDPS à Lubumbashi. Face à l’incapacité du gouverneur, le ministre de l’Intérieur doit mettre un terme à la provocation pendant qu’il en est encore temps».
Pour le chroniqueur Papy Kazadi Shamwange qui a analysé les propos d’un certain Tshiswaka, présenté le 18 août 2020 comme le président local de l’UDPS Kasumbalesa au cours d’un entretien avec Radio Okapi, «personne ne devrait accepter qu’un parti politique ayant pignon sur rue se substitue aux services de l’Etat en favorisant une fraude à ciel ouvert à ce poste frontalier, le plus important du pays par l’érection des barrières et postes de péages en lieu et place desdits services de l’Etat. Comment le gouvernement central tolère-t-il qu’un parti politique se permette ainsi de défier aussi ouvertement l’autorité de l’Etat à Kasumbalesa?».
Il ajoute qu’en faisant preuve de complaisance vis-à-vis de Tshiswaka et sa milice, «le parti présidentiel prend le risque de se voir accoler une image de parti-Etat à l’instar du MPR de Mobutu qu’il a pourtant héroïquement combattu pendant des décennies. Les plus hautes autorités du gouvernement et de ce parti au pouvoir doivent mettre fin à cette dérive sous peine de se voir accusés de totalitarisme. Le président Tshisekedi a fait de l’Etat de droit son leitmotiv mais on va finir par croire qu’il ne s’agit que d’un slogan creux et que sous son mandat la RDC va se transformer en une sorte de République bananière».
Pour en finir avec le scandale de Kasumbalesa, les pouvoirs publics ont le devoir impérieux d’y rétablir sans atermoiements l’autorité de l’Etat. Il n’y a pas trente six façons pour ce faire. La clameur publique est fortement scandalisée notamment par les images largement relayées sur la toile de l’officier militaire négociant laborieusement la libération d’un de ses hommes ‘‘emprisonné’’ par la bande à Tshiswaka. Il est en effet étonnant que les principaux initiateurs de ladite bande restent impunis jusqu’à ce jour.
Qu’ils ne soient pas répertoriés parmi les membres encartés de l’UDPS comme l’a dit le n°2 de ce parti Augustin Kabuya ou non, dès lors qu’ils ont commis de telles activités délictueuses, sieur Tshiswaka et sa milice doivent répondre de leurs actions et du manque à gagner qu’elles ont occasionné au Trésor public devant la justice.
A.M. avec Le Maximum