On n’avait plus beaucoup entendu ces derniers temps les ONG occidentales en ‘’mission civilisatrice’’ et leurs caisses de résonnance locales qui ont essaimé en RDC pendant la mandature de Joseph Kabila. Après la cinglante leçon d’humilité leur infligée fin 2018 par le flegmatique 4ème chef d’Etat rd congolais en matière de respect de la constitution et des lois de la RDC, les revoilà à la manœuvre en marge d’une opération de maintien et de rétablissement de l’ordre public (MROP) en pleine période d’état d’urgence sanitaire au Kongo-Central et à Kinshasa.
Les faits : un illuminé, Zacharie Badiengila alias Ne Muanda Nsemi, auteur d’une sanglante ‘’prison break’’ à Makala où il avait été embastillé pour avoir empoisonné le fonctionnement des institutions publiques en donnant la chasse aux « non originaires» (Congolais en provenance d’autres provinces et vivant ou travaillant au Kongo-Central) avait récidivé. En lançant de nouveau sa milice armée à l’assaut des ‘‘étrangers’’ malgré une mesure de relaxe du nouveau pouvoir alors qu’il était recherché par la justice. Interpellé dans son bunker de Kinshasa Ngaliema après des affrontements avec les forces de l’ordre, Ne Muanda Nsemi a été déclaré mentalement déséquilibré et pris en charge par le Centre neuropsychopatologique (CNPP) pendant que des femmes et des enfants mineurs qui lui servaient de bouclier humain étaient ramenés vers leurs résidences habituelles.
Mais certains «humanitaires» pour lesquels le catastrophisme tient lieu de fonds de commerce ont estimé que le moment était venu pour sonner l’hallali.
15 mois seulement après l’avènement à la tête de l’Etat de Félix Tshisekedi et alors que la RDC se débat contre la Covid-19, « Human rights Watch » décrète ainsi la fin de l’état de grâce pour le successeur de Joseph Kabila. Dans un rapport pour le moins alarmiste distribué le 19 mai 2020 intitulé «Répression sanglante du mouvement Bundu Dia Kongo,il faut que justice soit rendue pour les 55 personnes tuées au Congo central et à Kinshasa», cette ONG n’y va pas de main morte. «La police a pris d’assaut la résidence de Ne Muanda Nsemi, où plus de 200 partisans du BDK s’étaient rassemblés, à Kinshasa, en République démocratique du Congo, le 24 avril 2020. La police a eu recours à plusieurs reprises à une force létale excessive contre un mouvement religieux (…) tuant au moins 55 personnes et en blessant de nombreuses autres. La répression par le gouvernement du mouvement Bundu dia Kongo (BDK) a eu lieu du 13 au 24 avril dans plusieurs villes de la province occidentale du Kongo Central, ainsi que dans la capitale du pays, Kinshasa. C’est un appel du chef spirituel du BDK, Zacharie Badiengila, communément appelé Ne Muanda Nsemi – ‘‘l’esprit créateur’’ en kikongo, la langue de l’ethnie Kongo – lancé à ses partisans pour qu’ils ‘‘chassent’’ de la province les personnes n’appartenant pas à cette ethnie, majoritaire au Kongo Central, qui a provoqué la réaction du gouvernement», lit-on dans le rapport de HRW qui avoue s’être documenté sur des vidéos et captures d’écran via WhatsApp.
La lecture du rapport indique que HRW a renoué avec sa propension à l’exagération, à la manipulation des chiffres macabres et à l’inclinaison à broder sur des comptabilités sanguinolantes et émouvantes de morts pour choquer les bonnes âmes et convaincre la communauté des dispensateurs de subsides sur son incontournable utilité. Dans le cas d’espèce, les « makesa » maniant armes à feu, coutelas et gourdins deviennent de pieux adeptes d’une secte religieuse revendiquant leur liberté religieuse face à des éléments des forces de l’ordre dont la réputation de brutalité a été d’ores et déjà certifiée par … HRW.
Le contexte de l’état d’urgence sanitaire proclamé par le gouvernement congolais pour couper la chaîne de propagation du Coronavirus que les insurgés de Ne Muanda Nsemi ont foulé aux pieds est tout simplement mis sous le boisseau.
Le vice-premier ministre, ministre de l’Intérieur Gilbert Kankonde a donné le bilan officiel de l’opération qui a abouti à l’arrestation de Ne Muanda Nsemi : 12 morts en tout dans les échauffourées du Kongo-Central et de la capitale Kinshasa, 43 blessés graves (dont 35 adeptes de BDK et 8 policiers), 208 personnes interpellées par la police et transférées devant l’officier du ministère public. Des chiffres qui ne font manifestement pas l’affaire des rapporteurs de HRW qui se sont laissés aller à multiplier pratiquement par 4 le nombre de personnes « tuées par la police » selon les postings anonymes des réseaux sociaux qui leur servent de sources.
Human Rights Watch a aussi zappé les propos du commandant de la police de Kinshasa, le général Sylvano Kasongo, regrettant que des policiers se soient illustrés par des actes de pillages de biens dans le bunker de Ne Muanda Nsemi et faisant état de l’arrestation des intéressés ainsi que de la restitution desdits biens quelques jours plus tard. « On a l’impression que HRW vient délibérément à la rescousse des adeptes de Bundu dia Kongo qui se sont livrés à des actes d’incivilité et de rébellion armée à Kinshasa et au Kongo-Central et qui seraient à la base de l’explosion de la propagation de la maladie à Covid-19 dans certaines zones de la commune de Ngaliema à Kinshasa et au Kongo-Central qui en étaient préservés jusque-là grâce aux strictes mesures prises dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire (interdiction de rassemblement de plus de 20 personnes)», s’insurge une source proche du dossier contactée par nos rédactions. Sont passés aussi aux oubliettes, les campagnes xénophobes et sécessionnistes de BDK («il faut impérativement l’indépendance de la province ». Des revendications pour le moins capricieuses qui ne servaient qu’à appuyer les demandes illégitimes de rançons adressées par le gourou aux autorités nationales.
Pendant son examen psychiatrique au CNPP, Badiengila s’était exprimé à ce sujet devant le général Kasongo : « Mon général, si on me donne mon salaire (sic !) je rentre chez moi à Luozi, pour faire de l’agriculture et je laisse la politique. Tous ces jeunes gens (adeptes), sont des chômeurs, les autres sont pères des familles et ils ont besoin d’un boulot, si vous leur donnez du travail ils vont s’y concentrer pour nourrir leurs familles». Vérifications faites dans les livres comptables de l’Assemblée nationale où il avait brièvement siégé pendant la législature passée avant d’être arrêté pour un premier acte de rébellion sous le régime Kabila, il apparaît que les émoluments de l’ex-député national Badiengila avaient continué à être versées à son épouse pendant toute la législature et même après sa fuite rocambolesque de Makala.
« Les autorités devraient effectuer sans tarder une enquête impartiale sur les opérations policières meurtrières de Songololo, de Kinshasa et d’ailleurs », poursuit le rapport de HRW pour qui cette enquête devrait examiner le recours de la police à la force létale, dans le but de faire rendre des comptes aux personnes dont la responsabilité pour les abus serait établie, y compris celles ayant une responsabilité de commandement. Manifestement en mal de positionnement au Congo-Kinshasa depuis le départ du pouvoir de sa bête noire Joseph Kabila, HRW ne semble pas avoir entendu Gilbert Kankonde annoncer «l’ouverture de deux enquêtes, l’une au niveau de l’Inspection générale de la Police (la police des polices) et l’autre, judiciaire par l’auditorat supérieur du Kongo-Central et l’auditorat général des FARDC».
Comme pour marquer son peu de considération vis-à-vis des lois congolaises et des institutions chargées de les appliquer, HRW estime que « les principes de base de l’ONU sur le recours à la force et l’utilisation des armes à feu par les responsables de l’application des lois donnent des instructions importantes sur le recours à la force par la police et d’autres agents de l’Etat dans des situations de troubles civils. Ces principes stipulent que les fonctionnaires qui exercent des pouvoirs de police ‘’ne doivent pas faire usage d’armes à feu contre des personnes, sauf en cas de légitime défense ou pour défendre des tiers contre une menace imminente de mort ou de blessure grave … et seulement lorsque des mesures moins extrêmes sont insuffisantes pour atteindre ces objectifs’’».
Puis, endossant carrément le manteau de juge dans ce pays qu’elle semble de nouveau regarder comme le royaume des ténèbres dans lequel personne ne connaît rien, l’ONG américaine assène que « quoi qu’il en soit, ils (les responsables de l’ordre public NDLR) ne recourront intentionnellement à l’usage meurtrier d’armes à feu que si cela est absolument inévitable pour protéger des vies humaines. Les gouvernements ont le devoir de mener des enquêtes et des poursuites en cas de violations graves de l’intégrité physique au regard du droit international. Le droit international des droits humains garantit aussi le droit à un recours utile. Le droit de la victime à un recours utile oblige non seulement l’Etat à empêcher les graves violations aux droits humains, à ouvrir des enquêtes et à prendre des sanctions, mais aussi à lui accorder réparation. Entre autres mécanismes divers de réparation, les gouvernements devraient rétablir le droit qui a été violé et fournir des indemnités compensatrices ». Ouf ! Réagissant à ce qui ressemble à une manifestation de pédanterie, le ministre Kankonde a, s’exprimant mardi devant la commission Défense et de sécurité de l’Assemblée nationale rappelé d’un ton ferme qu’«à aucun moment un ordre quelconque n’a été donné aux policiers de faire usage d’armes à feu contre les adeptes de BDK. Comme le témoignent d›ailleurs les images, plusieurs forces sont intervenues dans différentes opérations. En ce qui est de la police nationale, aucun policier n’a été instruit d’ouvrir le feu. Si par impossible, il est prouvé qu’un ou plusieurs d’entre eux ont ouvert le feu sans instructions de leur hiérarchie, l’enquête interne d’ores et déjà diligentée l’établira et des mesures appropriées seront prises. Il est regrettable que l’on dénombre autant de pertes en vies humaines. Toutefois, les enquêtes sont déjà en cours à plusieurs niveaux. Dans pareilles circonstances, la position des organisations de droits humains nationales et internationales dont Human rights watch est loin d’être responsable. Quel plaisir peut on trouver à minimiser des chiffres en avançant des morts imaginaires ? ».
‘‘Sympathie’’ de HRW pour les Congolais
Le silence de l’ONG américaine sur des nombreux meurtres de noirs américains par la police aux Etats-Unis, son pays et principal bailleur de fonds tranche bizarrement avec sa propension à défendre les noirs congolais. On connaît la chanson. Ses nombreux rapports sur les atteintes aux droits de l’homme ne servent que de moyens de pression pour infléchir les politiques publiques et l’action des dirigeants congolais au profit des groupes d’intérêts étrangers. L’opinion congolaise n’oublie pas les roulements de mécanique de la diplomatie américaine depuis l’avènement de Félix Tshisekedi à la tête de la RDC tendant à imploser la coalition FCC-CACH. Peindre un tableau noir des droits de l’homme dans le pays est peut-être un moyen de pression sur le nouveau chef de l’État congolais. Car personne ici n’est assez dupe pour s’imaginer que HRW aime plus les noirs congolais que les noirs américains tués chaque mois par des policiers blancs auxquels personne n’a entendu HRW reprocher la moindre pecadille.
En effet, depuis 2006, une centaine de jeunes noirs sont tués chaque année par des policiers blancs. Le plus souvent en toute impunité. La vague d’indignation suscitée aux États-Unis par les décisions judiciaires d’abandon des poursuites contre les policiers blancs responsables notamment de la mort de Michael Brown et d’Eric Garner, deux Africains-Américains non armés, ne retombe pas. Elle a culminé le 13 décembre dernier avec des manifestations contre la violence policière, en particulier à Washington DC, où le cortège était conduit par le révérend Al Sharpton, et à New York, où au moins 25.000 personnes ont défilé dans les rues de Manhattan. De tous âges et de toutes origines, les manifestants scandaient des slogans comme «Black lives matter» («les vies noires comptent»), «Hands up, don’t shoot» («mains en l’air, ne tirez pas») ou «I can’t breathe» («je ne peux plus respirer»), derniers mots d’Eric Garner pendant son étranglement par un policier new-yorkais. « Nous vivons un instant historique », a déclaré sa mère éplorée devant le Capitole. Des actions plus symboliques se sont également multipliées ci et là pour protester contre ces violences infligées aux hommes de couleur dans l’Amérique de HRW sans que cette ONG donneuse de leçons en RDC n’y participe peu ou prou, trop occupée qu’elle est sans doute à collecter des financements de lobbies occultes désireux d’imposer leur domination au pays de Lumumba.
On ne compte plus les Africains-Américains tués par la police. Le quotidien USA Today en a recensé 96 par an, en moyenne, entre 2006 et 2012. Une autre statistique fait froid dans le dos : un jeune noir risque vingt et une fois plus qu’un jeune Blanc d’être victime d’une bavure. Leurs auteurs sont assurés d’une quasi-impunité. Les exemples, hélas, ne manquent pas. En février 1999, quatre policiers blancs tuent de 41 balles Amadou Diallo, un immigrant guinéen, dans le vestibule de son appartement du Bronx. Verdict ? Acquittement dans le silence assourdissant de HRW.
Le 16 mars 2000, un vigile non armé, Patrick Dorismond, est abattu lors d’une bagarre à l’extérieur d’un bar de Manhattan par Anthony Vasquez, un policier en civil de la brigade des stups. Verdict ? Acquittement. Et silence de HRW. Le 25 novembre 2006, Sean Bell est tué par balle la veille de son mariage sur le parking d’une discothèque du Queens. Trois policiers furent contraints de quitter la police, mais à l’issue de leur procès, en 2008, le verdict sera toujours le même ainsi que l’attitude de HRW…
Seuls deux policiers new-yorkais ont fait de la prison pour des faits de ce type : Justin Volpe, qui, en 1997, avait été reconnu coupable de tortures sur l’immigrant haïtien Abner Louima et l’officier Francis Livoti, qui, le 22 décembre 1994, étrangla de ses mains un certain Anthony Baez – pour avoir malencontreusement lancé un ballon sur le capot de sa voiture… Ils furent respectivement condamnés à trente et sept ans et demi de prison. Quant à Louima, il a même obtenu de la municipalité de New York une indemnisation record de 8,75 millions USD.
Silence de HRW sur l’usage excessif de la force contre les noirs US
Le problème est partout le même mais lorsqu’il s’agit de la RDC, HRW crie haro sur le baudet. Il doit bien y avoir une raison à cette émotion trop sélective. Au terme d’une enquête de deux ans, le ministère US de la Justice a estimé que la police de Cleveland, dans l’Ohio, avait tendance à faire un usage excessif de la force contre les jeunes noirs. C’est dans cette ville que Tamir Rice, 12 ans, qui tenait dans les mains un pistolet factice, a été tué, en novembre, par le policier Tim Loehmann sans sommation.
Deux ans auparavant, dans une autre ville, il avait été jugé inapte au service en raison d’un fâcheux manque de sang-froid. En 2010 et 2011, à Miami, en Floride, sept noirs ont été tués en huit mois. Le ministère fédéral de la Justice évoque aussi un usage excessif de la force. Même chose à Albuquerque, au Nouveau-Mexique, où 23 noirs ont été flingués sans raison depuis quatre ans.
Depuis qu’un Africain-Américain, Eric Holder en l’occurrence, a été nommé procureur général des États-Unis, il y a cinq ans, une vingtaine de procédures ont été engagées contre des polices locales. Deux fois plus qu’au cours des cinq années précédentes. Ce même Holder n’hésite pas à poursuivre des policiers relaxés au niveau local. C’est ainsi que Darren Wilson fait l’objet d’une enquête fédérale afin qu’il soit établi s’il a violé les droits de Michael Brown.
Ce qui précède démontre que HRW reste à la solde des impérialistes qui n’ont en réalité aucune empathie pour les victimes congolaises tombées des suites des bavures policières ou des atrocités commises par les groupes armés à l’Est de la RDC.
AM avec le maximum