Depuis que le parquet général près la Cour d’appel de Kinshasa Matete a diligenté des poursuites et une inculpation à charge du directeur de cabinet du président de la République Vital Kamerhe pour détournement de deniers publics en rapport avec sa supervision du programme des 100 jours, plusieurs officiels du gouvernement et de divers services publics sont indexés par des chicaniers pour des raisons égocentriques pas toujours avouables.
C’est manifestement le cas des accusations portées contre un autre proche collaborateur du chef de l’Etat, le conseiller spécial en matière de sécurité François Beya Kasonga par des avocats désireux d’obtenir une relaxe de leur client, l’octogénaire libanais Jammal Samih. En effet, dans une correspondance adressée au… président de la République ( !) ces avocats ont laissé entendre que Jammal Samih qui avait soumissionné et gagné auprès de Vital Kamerhe un marché de construction de maisons préfabriquées, aurait «agi» également sur instruction du conseiller spécial Beya. De sources autorisées à la présidence de la République, on attribue cette « boule puante » lancée contre le sécurocrate en chef de Fatshi à une tentative désespérée de faire pression sur le président pour le pousser à interférer dans le dossier judiciaire ouvert contre Kamerhe et consorts dans le sens d’un traitement plus complaisant du cas de Jammal Samih.
Appelé à la tête du Conseil national de sécurité dès l’avènement de Félix Tshisekedi, l’ancien DG de la Direction générale de migration (DGM) traîne derrière lui une réputation de spécialiste du renseignement dont la compétence et l’intégrité dépassent les frontières. Raison pour laquelle il a «survécu» à plusieurs régimes qui se sont succédés au pouvoir. «C’est un des rares responsables à ce niveau de la communauté des renseignements suffisamment respectés pour avoir été maintenu en poste, voire promu, pour ses bons et loyaux services de Mobutu à Tshisekedi en passant par les Kabila père et fils», signale à ce propos un spécialiste de l’Institut de recherches et d’études géopolitiques et stratégiques (IRGES) de Kinshasa approché par nos rédactions. Notre source ajoute que, contrairement aux allégations contenues dans la correspondance des avocats de Samih, rien n’indique à la lecture des pièces rendues publiques à l’appui de cette requête que Beya et les services sous son autorité aient donné au patron de Samibo une instruction autre que celle consistant à l’inviter à exécuter les termes du contrat liant cette dernière à la présidence de la République. « Le conseiller spécial du chef de l’Etat en matière de sécurité, me charge de vous demander de mettre à la disposition de la Présidence de la République, un premier lot de 300 villas dont 200 de 2 chambres et 100 duplex de 3 chambres, destinés au camp Tshatshi», renseigne la correspondance adressée à Jammal Samih, signée par un collaborateur du conseiller spécial. «Cela peut être assimilé à tout sauf à une tentative de détournement de fonds ou de biens publics dans la mesure où Jammal Samih se trouvait effectivement lié par un contrat conclu avec la présidence de la République de livrer lesdites villas dans un délai qui était forclos. D’autre part, il appert assez clairement que les termes de ladite correspondance s’inscrivent dans le cadre de l’enquête préliminaire qui a permis au président Tshisekedi de mettre certains de ses collaborateurs dont Vital Kamerhe, en charge dudit projet, à la disposition de la justice pour justifier la non exécution du contrat », estime le spécialiste. Qui souligne que ce faisant, le conseiller spécial en matière de sécurité qui chapeaute le conseil national de sécurité n’a fait qu’accomplir les devoirs de sa charge.
Un ancien collègue de François Beya observe que ce dernier a gagné ses galons « aussi bien par ses aptitudes professionnelles que par sa capacité à s’effacer et à disparaître quand cela est nécessaire afin d’éviter d’outrepasser les limites de ses compétences ». Cela lui a valu dans les services le surnom de ‘’Fantômas’’, rôle d’un mystérieux protagoniste joué par Jean Marais dans le film français éponyme d’André Hunebelle et Louis de Funès dans les années soixante.
Pour plusieurs observateurs de la vie politique congolaise, en essayant d’indexer Beya dans l’affaire du détournement présumé des fonds du projet de 100 jours, la défense de Samih relaie la ligne d’attaque de certains nouveaux pensionnaires du Centre pénitentiaire et de rééducation de Kinshasa (CPRK) qui n’hésitent pas à recourir à toutes sortes d’arguties pour exercer une sorte de chantage sur le président Félix Tshisekedi et son entourage pour les amener à interférer en leur faveur en violation des dispositions constitutionnelles consacrant la séparation des pouvoirs et l’indépendance du pouvoir judiciaire. On rappelle qu’un certain Masaro, proche du chef de l’administration présidentielle, qui aurait joué l’intermédiaire entre ce dernier et l’homme d’affaires libanais est en cavale après s’être abstenu de répondre à un mandat de comparution du parquet près la cour d’appel de Kinshasa-Matete. Vital Kamerhe et Jammal Samih sont d’ores et déjà inculpés pour enrichissement illicite et blanchiment des capitaux, détournement de deniers publics et corruption. Le procureur général de Kinshasa-Gombe a rendu à leur sujet une ordonnance de fixation de l’audience publique et une citation à prévenu fixant la comparution de Kamerhe à l’audience publique du lundi 11 mai.
Compte tenu de la gravité des charges qui lui sont imputées, M. Kamerhe comparaîtra tout en étant en détention provisoire à Makala. « L’hypothèse d’un dossier vide que propage ses avocats et certains sociétaires de son parti, l’UNC, est d’office écartée par le ministère public qui vient ainsi de valider les conclusions de l’instruction du parquet général près la Cour d’appel de Kinshasa/Matete », estime notre chroniqueur judiciaire qui a été informé du fait que les charges de détournement des fonds publics destinés au financement du programme d’urgence des 100 jours du chef de l’État s’appuyaient notamment sur les preuves matérielles remises par le banquier belge Thierry Taeymans, ancien DG de Rawbank versées à charge de l’inculpé. Il s’agit de bordereaux financiers indiquant des mouvements de fonds publics destinés au financement du programme d’urgence des 100 jours des comptes du Trésor vers des comptes privés appartenant à VK ou à ses proches. Le parquet s’appuierait également sur des éléments versés au dossier par l’Américain David Blattner et le Libanais Jammal Samih, patrons de Safricas et de Samibo, révélant une surfacturation des prestations de ces entreprises des BTP soumissionnaires des travaux d’érection d’infrastructures routières et de maisons préfabriquées. « Une partie des fonds ainsi détournés dans le budget de construction des maisons préfabriquées aurait du reste été reversée au compte du Trésor public par les soins du patron de Samibo pour prouver sa bonne foi, ce qui n’enlève rien au caractère délictueux du détournement», selon une source proche du dossier.
Plusieurs tentatives de Vital Kamerhe, ses avocats-conseils et ses amis de politiser cette affaire de prévarication au détriment de l’Etat congolais en invoquant tantôt des ‘’secrets d’Etat’’ dont il serait détenteur et qui lui permettrait d’ouvrir ‘’la boîte de Pandore’’ (sic !), tantôt un acharnement politique contre lui ou en citant des ministres en fonction comme responsables des malversations portées à sa charge se sont terminées en queue de poisson tout comme les demandes de libération provisoire introduites devant le tribunal de paix puis le tribunal de grande instance de Kinshasa-Matete.
La procédure a poursuivi son bonhomme de chemin jusqu’à la fixation de l’affaire devant les juges compétents.
JBD avec Le Maximum