Initiative bien maladroite que celle du président de la République Française, Emmanuel Macron, qui a fait irruption de manière assez cavalière dans le dossier politique rd congolais sans y être invité le moins du monde, ces deux dernières semaines. En conviant à Paris les chefs d’Etat du Rwanda et d’Angola, le jeune chef de l’Etat Français n’a pas choisi les meilleures références en matière de démocratisation et d’alternance dans le continent, ses interlocuteurs ayant sérieusement malmené les valeurs universelles dont son pays se réclame porteur et défenseur devant Dieu et les hommes.
A la tête du Rwanda depuis le génocide des Tutsi au milieu des années ’70, Paul Kagame règne, plutôt sans partage, sur un pays quasiment monopartite où les libertés fondamentales ne sont nullement sa tasse de thé. Le chef de l’Etat du Rwanda vient de surcroît de se faire réélire au forceps, pour la énième fois avec plus de 90 % des voix au terme d’une révision constitutionnelle prétendument réclamée par le peuple rwandais. Et qui a la particularité de lui permettre de demeurer au pouvoir jusqu’au moins en 2022 encore. Pour discuter de la fin du second mandat constitutionnel du Président de la RD Congo, Joseph Kabila, Emmanuel Macron n’a manifestement pas trouvé l’interlocuteur exemplaire.
Et il y a plus cynique avec ce séjour parisien du chef de l’Etat du Rwanda. Pourfendeur notoire de la francophonie devant l’Eternel depuis son arrivée au pouvoir à Kigali, Paul Kagame n’est rien d’autre que ce président d’un Etat membre de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs (CIRGL) qui est allé jusqu’à décider un moment le retrait du Rwanda de l’organisation internationale qui tente laborieusement de faire contrepoids à l’influence grandissante de la langue de Shakespeare à travers le monde. C’est sous la férule de Paul Kagame que l’anglais a été imposé comme langue officielle du Rwanda. Mais cela n’a pas empêché le pays dit des Mille collines de postuler au poste de secrétaire général de l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF), y proposant la candidature de la bilingue Louise Mushikiwabo, son ministre des Affaires Etrangères et porte-parole du gouvernement. Et obtenant sans coup férir l’appui de la France d’Emmanuel Macron. Rien à faire : dans les pays francophones du contient, la pilule cale.
La cavalcade macronienne dans les problèmes politiques de la région centrale du continent africain ne diffère guère de celle d’un éléphant dans un magasin de porcelaine. C’est derrière le chef de l’Etat de la République d’Angola que se glisse le Président de la France pour « accompagner la résolution du problème rd congolais ». Le nouvel homme fort de Luanda a accédé au pouvoir il y a un an, en remplacement d’Edouardo Dos Santos qui l’avait purement et simplement adoubé et à qui il vient de succéder à la tête du MPLA au terme d’un vote qui remonte à il y a seulement quelques semaines. Et le MPLA, ce n’est rien d’autre que le parti politique au pouvoir de manière ininterrompue depuis l’accession de l’Angola à la souveraineté nationale et internationale en 1973. Le chef de l’Etat d’un pays qui vante tant les valeurs démocratiques, les droits de l’homme, les libertés, etc., aurait pu trouver mieux que ces deux interlocuteurs du continent pour l’accompagner, se disent certains observateurs. L’initiative de l’Hexagone prête donc à tout le moins le flanc au doute…
Ce qu’Emmanuel Macron appelle pudiquement « accompagnement » est en réalité une immixtion-agression dans laquelle la France tente d’entraîner ces deux Etats du continent pour faire bonne figure. Une stratégie qui s’inscrit dans le cadre d’un complot occidental qui vise à faire main basse sur les ressources stratégiques de la RD Congo, comme il y a quelques dizaines d’années à l’accession du pays à l’indépendance en 1960 ; mais aussi plus près de nous, à la fin des années ’90, avec la bien nommée « première guerre mondiale africaine » au cours de laquelle quelque 6 pays du continent s’affrontèrent militairement sur le territoire rd congolais. L’organisation des élections à la fin de l’année 2018, ou la candidature de Joseph Kabila à ces élections ne sont qu’un prétexte, selon les observateurs, qui estiment que les Occidentaux veulent placer un pion plus malléable à la tête de la RD Congo. « Les États-Unis et leurs médias unipolaires affiliés aux ordres ont été occupés à pré-conditionner le monde à la perspective d’un désastre en RDC si le président en exercice, Kabila, ne démissionnait pas à la fin de son deuxième mandat, constitutionnellement en cours, à la fin de l’année et s’il retardait indéfiniment le vote à venir et / ou modifiait la Constitution une nouvelle fois », révèle-t-on à ce sujet. Non sans raison. Toutes les dépêches d’agence occidentales sur la situation politique en RD Congo se terminent invariablement par qualifier Joseph Kabila de « Chef de l’Etat hors mandat », et justifient tout ce qui se passe dans ce pays par le fait que « Joseph Kabila refuse de quitter le pouvoir », ou encore « … de se prononcer sur son avenir politique », explique ce professeur de journalisme.
Dans le dossier rd congolais, ce n’est ni l’UA, ni la SADC que la France accompagne, mais bien une certaine communauté internationale avide des ressources stratégiques comme le cobalt dont regorge le pays de Lumumba. C’est un remake du scénario libyen.
J.N.
Macron