C’est fait depuis vendredi 30 mars 2018 tard dans la nuit. Félix Tshilombo Tshisekedi a été élu président de l’Union pour la Démocratie et le Progrès Social/Limete par 790 voix sur 803 votants au terme d’un scrutin rondement mené. Ainsi s’est officiellement bouclée la fulgurante ascension du fils d’Etienne Tshisekedi, le leader charismatique du parti décédé début février 2017 dans une clinique bruxelloise. Face au fils Tshisekedi se positionnaient trois concurrents, David Mukeba et Paul Tshilumbu et Guy Bao. Les deux premiers ayant désisté en faveur de Félix Tshilombo, Guy Bao n’a pu arracher que 8 pauvres votes de ces électeurs triés sur le volet parmi les combattants du parti acquis à la cause de l’élu.
Il n’y a donc pas vraiment eut compétition, vendredi dernier au siège de l’UDPS à Limete. Aucune grosse pointure du parti de celui que l’on surnommait « le sphinx de Limété » n’a concouru à sa succession. Ni Valentin Mubake Nombi, « auto-exclu » aux lendemains de la signature des Accords dits de la Saint Sylvestre, fin décembre 2016 ; ni Bruno Tshibala, le premier ministre du gouvernement d’union élu président d’une aile du parti il y a quelques mois ; ni, encore moins, Bruno Mavungu, l’avant-dernier secrétaire général de l’UDPS/Tshisekedi, qui trône désormais à la tête d’un parti de son cru. Sans compter Corneille Mulumba, un co-fondateur de « la fille aînée de l’opposition à Mobutu » qui dirige ce qu’on appelle l’aile des pionniers de l’UDPS. L’élection de Félix Tshilombo par 94 % des scrutins exprimés n’aura pas été le parfait exemple de démocratie à l’interne.
Immédiatement après l’élection, le millier de participants au congrès de Limété (en fait des applaudisseurs) ont « voté » une résolution pare-choc faisant de Félix Tshilombo Tshisekedi le candidat du parti à la magistrature suprême pour les élections de décembre 2018. L’heureux élu pouvait alors jouer au « bon prince » en appelant à l’unité de ce parti politique dont l’émiettement fut entamé du vivant d’Etienne Tshisekedi. « Aujourd’hui, je me sens comme le vrai successeur du grand baobab, père de la démocratie, notre président Etienne Tshisekedi ». « Etienne Tshisekedi a tracé la route, il appartient maintenant à vous et à moi de poursuivre l’œuvre ». « Cette victoire, je vous la dédie, vous peuple congolais. Soyez fiers d’avoir participé à cet exercice. Je compte m’appuyer sur tous les organes qui seront mis en place au sein du parti ». Tels sont quelques déclarations saillantes entendues de Félix Tshisekedi dans la nuit de vendredi à samedi dernier à Limete.
Mais rien n’indique que la tâche sera facile pour le nouveau patron de ce qui reste de l’aile messianique de l’UDPS, malgré le faible appel à l’unité lancé par le vainqueur de l’élection organisé au terme du congrès du week-end dernier. « Un appel franc et sincère à l’unité se serait traduit par la présence sur les lieux quelques grandes figures du parti. Il n’y en avait pas une seule », explique un sympathisant de l’UDPS au Maximum. On chemine donc certainement vers la création d’une nouvelle aile du parti d’Etienne Tshisekedi, en plus de celles qui existe. Dans les réseaux sociaux, un observateur agacé par tant de fumisterie a écrit qu’il était « difficile d’imaginer que celui qui a été jusque-là incapable de parler avec l’un quelconque de ses rivaux puisse réaliser l’unité de ce parti ».
Certes, quelques jours avant le congrès qui a porté Félix Tshilombo à la tête du parti paternel, le Conseil National de Suivi des Accords et du Processus Electoral (CNSA) que président Joseph Olenghankoy avait conseillé aux autres ailes du parti tshisekediste de renoncer à toute dénomination qui prêterait à confusion avec l’UDPS. Mais la décision du CNSA relève de la politique n’a à proprement parler pas d’incidence sur le judiciaire. « En cas de désaccord entre les dissidents de l’UDPS, c’est la justice qui tranchera », estiment les détracteurs de l’héritier qui rappellent l’existence légale de l’UDPS/Kibassa, par exemple. Et pensent qu’on s’en tirera avec la reconnaissance juridique d’une l’UDPS/Mubake, à côté de l’UDPS/Tshibala et de l’UDPS/Tshisekedi, ces deux dernières ailes du parti étant du reste en procès au tribunal de paix de Matete. Une façon pour Félix de tuer pratiquement une nouvelle fois son géniteur auquel il n’a pas pu offrir une sépulture à cause de ses tentatives brouillonnes d’instrumentaliser sa dépouille pour se voir offrir le strapontin de premier ministre de… Joseph Kabila avant les élections.
J.N.