24 heures avant les manifestations (non autorisées par les autorités rd congolaises) organisées par des mouvements dits citoyens, dont Lucha et Filimbi, mercredi 15 novembre dernier, la Mission des Nations Unies pour la Stabilisation du Congo (MONUSCO) est bruyamment sortie de sa réserve. Pour menacer littéralement les autorités congolaises de rapporter d’éventuelles violations des droits de l’homme. « Conformément à son mandat, la Monusco se réserve le droit d’observer les événements et de rapporter d’éventuelles violations des droits de l’homme », lit-on dans un communiqué rendu public mardi dernier par Maman Sidikou. Le représentant spécial du secrétaire général des Nations-Unies chef de la mission onusienne « … exhorte ainsi les autorités congolaises à respecter les libertés fondamentales telles que stipulées dans la Constitution congolaise, dont la liberté de réunion et de manifestation », ajoute le communiqué. Qui glisse tout de même un petit passage à l’intention, non pas des organisateurs pour leur rappeler leurs responsabilités, mais aux « … aux citoyens que le droit de manifester implique de s’abstenir de recourir à la violence sous toutes ses formes ». « Le déséquilibre entre les deux avertissements est patent », estime un militant du PPRD, le parti politique phare de la majorité au pouvoir à Kinshasa. Et il y a de quoi lui donner raison. Surtout à en juger par la curieuse diatribe de Zeid Ra’ad Al Hussein, le Haut-Commissaire des Nations-Unies aux droits de l’homme contre les autorités rd congolaises. Auxquelles il reproche un « … discours incendiaire contre les manifestants … » qui exacerberaient les tensions, selon lui alors que rien de tel n’avait été enregistré par qui que ce soit.
Sourde oreille
« Ou les onusiens sont sourds, ou ils ont un réel intérêt à faire le jeu de l’opposition » commente pour sa part, plutôt courroucé, cet autre combattant de la Convention des Congolais Unis, un parti politique lumumbiste. Qui fait observer que des évêques de l’église catholique romaine rd congolaise aux principaux leaders de l’opposition, tous appellent « le peuple à se prendre en charge » à longueur de journées. « Discours et sermons existent ! », fulmine-t-il, rappelant « Le Pays va mal, Congolais lèves-toi », le titre de la déclaration incendiaire des prélats catholiques de mai dernier. « Il est impérieux de nous impliquer nous-mêmes, de prendre notre destin en main, sinon notre avenir sera hypothéqué pour longtemps », avaient conseillé les évêques, en effet. Sans essuyer le moindre reproche semblable à celui de Zeid Ra’Ad Al Hussein au général Sylvano Kasongo, le patron de la police de Kinshasa qui avaient menacé les manifestants de représailles s’ils contrevenaient à l’interdiction de manifester décidée par l’Hôtel de Ville de Kinshasa et perturbaient, ce faisant l’ordre public.
Rien contre les hors la loi
Pas de menaces contre les perturbateurs de l’ordre public ou presque, mais aussi contre ceux qui attentent à longueur de journées à la vie de paisibles citoyens dans les provinces tourmentées de l’est du pays. Contre les forces dites négatives, « tout ce qu’on entend des onusiens, ce sont des appels à dialoguer avec des coupeurs de tête », commente sous le sceau du secret cet activiste des droits de l’homme de Beni au Nord Kivu. « Comme si la mission de stabilisation du Congo s’était décidée désormais à stabiliser les pogroms et l’insécurité pour se donner de l’ouvrage », se plaignait-il après que quelques dizaines de civils eurent été massacrés par de présumés ADF à une quarantaine de km de Beni Ville le mois dernier.
En RD Congo, la mission de l’ONU donne de plus en plus l’impression d’être une mission contre l’Etat. Même le Congolais lambda s’en rend compte. De plus en plus.
J.N.