Le patron de l’Engagement Citoyen pour le Développement (Ecidé), le député national élu de Kinshasa (2006 et 2011), Martin Fayulu Madidi est monté au front contre les élections, carrément. Jeudi 7 septembre 2017, l’acteur politique membre du Rassemblement des forces politiques et sociales acquises au changement/aile Limete (Rassop/Limete), qui préside aux destinées d’un petit parti politique représenté par deux élus à l’Assemblée nationale, dont lui-même, a tenu un point de presse, pour appeler les populations à adhérer au Manifeste du citoyen congolais et à l’application de l’article 64 de constitution, plutôt qu’à se préparer à aller aux urnes. Ce en quoi, à la suite de Félix Tshilombo Tshisekedi, le président du Rassop/Limete, Martin Fayulu se lance dans une véritable course contre la montre : rattraper la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) qui, après avoir réussi à inscrire quelques 42 millions d’électeurs sur ses listes, livre ce mardi 12 ses premières cartes d’électeurs dans les dernières provinces encore à enrôler(Kasai Central, Kasai, et 2 territoires dans deux territoires laissés pour compte de la province de la Lomami), et en est à la recherche de pistes de solution en vue de raccourcir et rendre moins onéreuse la suite du processus électoral.
Machine à voter
La dernière trouvaille de la CENI est sur toutes les bouches depuis quelques semaines, et le week-end dernier, après les patrons de presse qui en avaient été émerveillés quelques jours plus tôt, le Président de la République se l’est faite présenter : la machine à voter pour un dépouillement plus rapide des résultats. L’engin qui devrait réduire les dépenses inhérentes à l’impression de plus de 40 millions de bulletins de vote kilométriques (à la dimension du nombre des candidats et des scrutins à tenir) et la durée des opérations entre le vote et la proclamation des résultats (400 millions USD d’économie, selon la CENI), provoque de véritables insomnies, si pas pire, dans les rangs des radicaux de l’opposition en RD Congo. Au Rassop/Limete, aussi surprenant et incompréhensible que cela paraisse, ce sont ceux qui se sont agités pour dénoncer les dépassements des délais des votes qui montent au créneau dès qu’il s’agit de les réduire de manière drastique.
Machine à planter
Jeudi dernier, Martin Fayulu avait justifié son appel à adhérer au Manifeste signé le mois dernier à Chantilly, près de Paris (France) à l’initiative d’un groupe d’organisations dites de la société civiles notoirement proches des radicaux par la nécessité de rétablir l’ordre constitutionnel … au plus tard le 31 décembre prochain. Un appel au soulèvement donc, et non plus, comme il y a quelques mois encore, mais un appel à organiser les élections avant cette échéance, parce qu’elles s’avèrent de plus en plus tenables. « Qu’il y ait élections ou pas, Monsieur Kabila doit quitter le pouvoir de fait qu’il exerce au plus tard le 31 décembre de cette année. Nous en appelons ainsi à tous les Congolais partout où ils se trouvent, à se mobiliser pour cet objectif qui ouvrira la voie au retour à l’ordre constitutionnel », a prétendu contre toute évidence ce président d’un parti politique prétendument « engagé pour le développement », alors qu’il a investi ses centaines de milliers de dollars US dans la construction d’hôtels, restaurants de luxe et entreprises de vente de carburant !
Mensonges, procès d’intention
« Martin Fayulu, son problème, c’est son poids électoral réel : il vaut un député, lui-même, mais il est gourmand et veut peser plus que ça. Alors, pour lui, mieux vaut ne pas aller aux élections qui le réduirons à sa dimension réelle », expliquait dimanche dernier au Maximum un de ses anciens collègues à l’assemblée provinciale de Kinshasa. A l’évidence, les urnes hantent véritablement cet élu de Kinshasa originaire de l’ex province du Bandundu où il avait tenté, du reste, quelques incursions peu fructueuses jusque-là. Martin Fayulu s’est aussi prononcé contre ce qu’il a appelé « le vote électronique », qui est en réalité un vote semi électronique parce que le bulletin de vote n’est pas éliminé mais plutôt remplacé par un bulletin électronique qui préserve le principe d’une comptabilité manuelle. « Nous disons non, car ça favorise la tricherie », a maladroitement bluffé le coordonnateur de la Dynamique de l’opposition, un regroupement de petits partis politiques créé pour conférer plus de poids politique à Fayulu. Parce qu’il apparaît que ce qu’abhorre l’Ecidé, ce sont les élections elles-mêmes : après ce qu’il avait présenté à la presse comme une tournée d’inspection des centres d’enrôlement de la capitale, jeudi 8 juin dernier, Martin Fayulu avait décrété que « La CENI n’est pas en train de bien organiser l’opération d’enrôlement à Kinshasa » quelques jours auparavant, l’homme avait déjà fustigé les autres machines électorales, celles qui servent à l’enrôlement des électeurs, critiquant leur lenteur et reprochant à la CENI le démarrage tardif de ces opérations dans la capitale. Les machines à enrôler étaient donc mauvaises, à moins que ce ne soit, pêle-mêle, les engins, les préposés et les kinois dont l’engouement pour ces opérations était plus que manifeste, se dit-on. C’est le même Fayulu qui dénonce des fraudes présumées dans les chiffres sur l’enrôlement annoncés par la CENI, occultant, sans doute volontairement, le fait que les listes électorales doivent encore être consolidées (nettoyées de doublons et autres).
Sur les machines électorales, Fayulu se plante. Sur les quelque 42 millions d’enrôlés aussi. D’autant plus que personne n’a vu jusque-là qui que ce soit brûler sa carte d’électeur pour répondre à l’appel de l’Ecidé à mettre le feu à la maison.
J.N.