La publication des résultats définitifs pour la députation nationale étant prévue à la date du 13 septembre 2018 et des sénatoriales le 22 août de la même année, avec quelles chambres du Parlement le nouveau Président de la République, à élire le 28 décembre 2017, va-t-il collaborer conformément à la Constitution ?
Déjà, le Premier ministre honoraire semble même pas ne savoir que l’Assemblée nationale sans mandat selon la thèse du « Rassemblement » reste toujours en fonction près de 8 mois après la fin de sa législature et que le Sénat et les Assemblées provinciales ont entamé la sixième année après la forclusion de leurs mandats !
Petite insolite : au point 38, le chronogramme préconise la campagne électorale du 12 février au 13 mars 2018 pour les Elections provinciales, législatives nationales et encore présidentielle. Or, celle-ci est aussi prévue entre le 27 novembre et le 26 décembre 2017…
Avec pour seule référence évoquée le fait d’avoir été le représentant de l’Opposition parlementaire ayant collaboré avec l’OIF lors sa mission d’évaluation et d’audit du fichier électoral en 2015 conduite, naturellement, par le Général malien Siaka Sangaré, Samy Badibanga a usé de sa liberté d’expression en apportant sa contribution à la Céni. On sait qu’à la suite de la « tripartite » tenue fin août à Kananga, la Centrale électorale s’est fait doter d’éléments « susceptibles de lui permettre de procéder à l’élaboration du calendrier électoral. Sur cette base, elle s’engage à publier incessamment un calendrier réaliste »…
Ainsi, l’ex-locataire de l’hôtel du Conseil préconise-t-il le découplage de la présidentielle des deux autres élections prévues dans la première séquence électorale aux termes de l’article IV.2., à savoir «l’organisation des élections en une seule séquence présidentielle, législatives nationales et provinciales au plus tard en décembre 2017».
Dans son chronogramme, il fixe la présidentielle à la date du 28 décembre 2017, la campagne électorale entre le 27 novembre et le 26 décembre, la publication de la liste définitive des candidats à la présidentielle le 6 novembre, le traitement des données (2 Kasaï et Diaspora entre le 4 septembre et le 7 décembre).
Deux premières observations : Samy Badibanga, qui ignore les provinces du Kasaï et du Kasaï Central et les territoires de Kamiji et Luilu dans la province de Lomami, oublie d’indiquer la date d’investiture du nouveau Président élu (point 25) puisque l’étape suivante (point 26) prévoit pour le 21 octobre 2017 la convocation de l’électorat et l’ouverture de l’inscription des candidatures pour les élections combinées de la députation provinciale et des législatives nationales.
Ces omissions se justifient par l’empressement étant donné que son chronogramme indique l’installation des Assemblées provinciales qui prendra 35 jours, soit du 7 mai au 10 juin 2018, et de l’Assemblée nationale le 13 septembre. D’ailleurs, même l’investiture des Gouverneurs et Vice-Gouverneurs a une date : 28 juillet 2018 ; l’installation des Conseils de secteur et des Conseils communaux entre le 23 janvier et le 26 février 2019, celle des Conseils urbains entre le 8 mars et le 11 avril 2019 tandis que l’investiture des Maires et Maires adjoints le 6 mai 2019.
Probablement que dans l’esprit de M. Badibanga, l’investiture faisant l’objet de l’article 74 de la Constitution intervient «dans les dix jours qui suivent la proclamation des résultats définitifs de l’élection présidentielle». Soit au plus tard le 3 février 2018.
Continuellement tournés en dérision
Pour revenir à la présidentielle, ce « calendrier électoral» complique plutôt qu’il ne facilite sa tâche au Président élu.
En effet, entre le 24 janvier 2018 (date de publication du résultat définitif pour le Président de la République) et le 13 septembre 2018 (date de publication des résultats définitifs pour les Députés nationaux), il y a bons huit mois. Période au cours de laquelle le premier sera obligé de collaborer avec les députés soi-disant «illégitimes et illégaux», s’il vaut reprendre la terminologie politique de «Rassemblement» et Cie.
Fait inévitable : dans ce schéma, la Majorité Présidentielle (MP) gardera sa représentativité dans les deux chambres, surtout à la Chambre basse. Et le Président élu devra, aux termes de l’article 78 de la Constitution, nommer « le Premier ministre au sein de la majorité parlementaire après consultation de celle-ci ».
En d’autres termes, la MP conservera pendant cette période le droit de désignation du Premier ministre et une cohabitation s’installera au niveau de l’Exécutif national si, d’aventure, l’alternance politique se produisait au profit de l’Opposition.
Par ailleurs, si l’heureux élu provenait de l’Opposition, le Chef de l’Etat se pliera aux prescrits de l’alinéa 1 de l’article 91, à savoir : « Le Gouvernement définit, en concertation avec le Président de la République, la politique de la nation et en assume la responsabilité. Le Gouvernement conduit la politique de la nation ».
En d’autres termes, le nouveau Chef d’Etat issu de l’Opposition ne tarderait pas à réaliser à ses dépens que ce n’est pas à lui, personnellement, que reviendrait la mission de définir la politique de la nation pouvant émaner de son programme électoral. Aussi longtemps que la MP gardera sa majorité à la chambre basse, ce sera le Gouvernement animé par son Premier ministre qui aura la charge de conduire la politique émanant, elle, de la politique à définir en concertation avec le Chef de l’Etat. Bonjour les dégâts ! Le Président de la République élu sera contraint de faire contresigner par le Premier ministre MP les ordonnances « autres que celles prévues aux articles 78 alinéa premier, 80, 84 et 143 ». Parmi lesquelles celles relatives à la nomination, et le cas échéant, à la révocation des ambassadeurs et des envoyés extraordinaires, des officiers généraux et supérieurs des forces armées et de la police nationale (le Conseil supérieur de la défense entendu) ; du chef d’état-major général, des chefs d’état-major et des commandants des grandes unités des forces armées (le Conseil supérieur de la défense entendu) ; des hauts fonctionnaires de l’administration publique, des responsables des services et établissements publics, des mandataires de l’Etat dans les entreprises et organismes publics, à l’exception des commissaires aux comptes. Des ordonnances à prendre « sur proposition du Gouvernement délibéré en Conseil des Ministres » et, encore, avec le contreseing du Premier ministre MP !
Juste un rappel, le Président nouvellement élu va, dans l’éventualité proposée par Samy Badibanga, devoir travailler presqu’une une année avec une Assemblée nationale et un Sénat continuellement tournés en dérision par l’Opposition radicale et la Société civile alliée. Il se souviendra que dans le Rapport final du conclave de « Rassop/Limete » tenu les 21 et 22 juillet 2017, cette plateforme se vante de relever qu’« en attendant la tenue de ces élections, l’Accord de la Saint Sylvestre a le mérite de résoudre consensuellement la question de l’illégitimité généralisée de tous les membres des institutions à mandats électifs causée par l’expiration de ces mandats et le blocage du processus électoral par Joseph Kabila ».
Ces références ne sont évoquées qu’à titre illustratif.
Laisser aux techniciens les questions techniques
Bref, Samy Badibanga ne peut nullement s’estimer fier d’avoir opéré à découvert.
Au contraire, sa sortie médiatique jette le doute sur la rationalité de son initiative, visiblement entreprise pour la consommation plutôt politicienne que pour des impératifs politiquement utiles.
S’il l’a faite pour se rapprocher, par exemple, de Félix Tshisekedi qui ne « carbure » plus que pour une « Transition Sans Kabila » sans cependant fixer l’opinion sur la Constitution devant régir cette période, il a raté son affaire. Il aurait été mieux inspiré de laisser en l’espèce ces questions hautement techniques aux techniciens.
Omer Nsongo die Lema avec Le Maximum