Le représentant spécial du secrétaire général des Nations-Unies et patron de la Mission des Nations-Unies pour la Stabilisation de la RD Congo (Monusco), le Nigérien Maman Sambo Sidikou, a appelé, le 1er juillet dernier, la CENI (Commission Electorale Nationale Indépendante) à publier sans tarder le calendrier électoral pour la tenue des élections prévues en décembre 2017 par l’Accord de la Saint Sylvestre. «C’est à la CENI que revient la responsabilité principale d’organiser les élections conformément à la Constitution et à l’accord du 31 décembre 2016. J’appelle donc la CENI à publier sans plus tarder un calendrier officiel et consensuel pour l’organisation de ces élections », écrit le diplomate Nigérien dans un communiqué daté du 1er juillet. Le même communiqué exhorte le gouvernement « … à poursuivre et assurer la mise en œuvre intégrale et rapide des mesures de décrispation prévues par l’Accord du 31 décembre 2016, afin de créer l’environnement politique et les autres conditions nécessaires pour l’organisation des élections ». Une sortie politique étonnante de la part de ce diplomate d’origine africaine dont la nomination en remplacement de l’Allemand Martin Köbler arrivé fin mandat en septembre 2015 avait paru rassurante à plus d’un panafricaniste. « Un africain est à même de mieux comprendre et mieux les subtilités culturelles et les réalités politiques locales », estimaient-on dans certains milieux politiques à Kinshasa. Qui craignent désormais de devoir déchanter.
Interrogé par Le Maximum lundi 3 juillet 2017, un député de la Majorité Présidentielle explique qu’« on peut comprendre que le patron de la Monusco, qui tente laborieusement de relancer des négociations entre les parties prenantes au dialogue du Centre interdiocésain de Kinshasa, en appelle à la mise en œuvre des mesures de décrispation politique, mais à la condition qu’il ne fasse pas le jeu de l’opposition extrémiste à l’instar des néocolonialistes belges et européens qui ruent parfois de manière irrationnelles sur les brancards ». Allusion aux récentes évolutions du dossier Moïse Katumbi, le candidat déclaré du G7 à la prochaine présidentielle à qui le Procureur Général de la République, le flegmatique Flory Kabange Numbi a retiré l’autorisation de sortie pour soins médicaux accordée il y a quelques mois, quelques semaines après qu’il eût annoncé son retour au pays. « Tout se passe comme si ce Représentant du Secrétaire général des Nations-Unies dans notre pays entendait interférer dans ce dossier sans tenir compte d’importants aspects légaux et pratiques », selon l’interlocuteur des rédactions du Maximum.
Désappointement chez les politiques
L’appel à publier « sans tarder » un calendrier électoral qui reprend ‘verbatim’ les propos des jusqu’auboutistes de l’opposition pro-belge a été le plus mal perçu, à la CENI particulièrement. Des sources à la Centrale électorale assurent au Maximum qu’elles ne s’expliquent pas cette sortie du patron de la Monusco qui semble accuser la CENI de vouloir « retarder » la publication de ce calendrier. Parce que la Monusco fait partie intégrante du dispositif d’expertise mis en place par l’administration électorale au sein duquel elle a l’avantage de pouvoir suivre jour après jour l’évolution des opérations préélectorales qu’elle soutient largement, du reste.
Pas plus tard que le 22 mai 2017, le Vice-président de la CENI, Norbert Basengezi Katintima, recevait Kacou Assoupke, le nouveau Directeur de la Division Électorale de la Monusco affecté en remplacement de Simon Pierre Nanitelamio, appelé à d’autres fonctions aux Nations-Unies. En cette circonstance, le N° 2 de la centrale électorale congolaise avait brossé à l’intention du nouveau directeur de la Division électorale de la Monusco les avancées enregistrées dans l’opération d’identification et d’enrôlement des électeurs dans les différentes aires opérationnelles. Après ce large tour d’horizon, Kacou Assoupke s’était déclaré heureux d’être en République Démocratique du Congo pour assurer la coordination de l’assistance électorale des Nations-Unies au processus électoral en cours, ce conformément à la Résolution 2348 du Conseil de sécurité des Nations Unies. Que son chef, le patron de la Monusco, appelle ainsi la CENI à publier sans tarder un calendrier électoral a paru comme une incongruité car portant en filigrane une accusation de retardement. « Parce que Maman Sidikou compte parmi les personnes les mieux placées pour savoir que cette publication du calendrier électoral qui attend aussi bien la fin des opérations d’enrôlement en cours que l’appréciation de ce travail par le CNSA (Comité National de Suivi de l’Accord et du Processus électoral) ne peut en aucune manière intervenir sans délai », expliquent les sources du Maximum.
Soutien à une posture de provocation
La sortie médiatique du RSSG des Nations-Unies en République Démocratique du Congo intervenait 72 heures après que des voix se furent élevées des rangs de l’opposition radicale pro-belge, qui menaçaient d’appeler à manifester si la CENI ne publiait pas de calendrier électoral à la fin du mois juillet en cours. Une posture de provocation délibérée dans une perspective rendue impossible par la situation sécuritaire dans certains espaces du Grand Kasaï où la paix et la sécurité sont toujours en bute à de sérieuses perturbations par des actions terroristes qui ont déjà coûté la vie à plusieurs centaines de Congolais dont plusieurs préposés de la CENI. Le diplomate onusien semble à cet égard avoir prêté le flanc aux pressions intéressées des extrémistes de l’opposition.
J.N.