Il fut le premier noir rd congolais à posséder … une quinzaine de voitures taxis et un dancing bar en pleine cité européenne avant l’indépendance. Par la suite, Augustin Dokolo, un natif de Mbanza-Ngungu dans l’actuel Kongo-Central sut habilement faire prospérer ses affaires, jusqu’à ce que la révolution mobutiste y mette brutalement fin dans les années ’80. Au motif qu’on ne pouvait permettre à un privé de posséder autant sinon plus que ses propres protégés…
Ce fut dur et sauvage, mais sûrement pas facile de mettre la main sur tout ce que possédait le tout premier rd congolais à créer une banque à capitaux privés, la Banque de Kinshasa, dont le siège se situait en face de l’actuel Auto Transport Company (ATC), à côté de l’Agence Congolaise de Presse et devant la Direction Générale des Contributions. Parce qu’entretemps, Augustin Dokolo dirigeait un réseau de magasins avec succursales et représentations à l’étranger, et une multitude d’autres activités commerciales dont les ramifications s’étendaient au fin fond du territoire rd congolais.
En 1971, véritable pionnier en affaires, Augustin Dokolo informatise les services de sa banque avec le concours d’IBM. Avant d’en porter le capital à la bagatelle somme de 4.900.000 Zaïres de l’époque entre 1971 et 1973. C’était le summum, dont le fera descendra le léopard de Gbadolite à partir de 1974, à la zaïrianisation de triste mémoire. Dokolo doit alors céder son immeuble, le Dungu, pour éponger de prétendues dettes contractées envers la BK. En 1986, l’Etat mobutiste place la banque privée sous gestion administrative de la Banque Centrale. La Banque de Kinshasa devient la Nouvelle Banque de Kinshasa et consacre une irrémédiable descente aux enfers. Qui finira par emporter Augustin Dokolo, décédé le 12 avril 2001 à Paris. L’homme ne s’était vraiment jamais remis de l’arnaque mobutiste.
Les Dokolo, 15 ans après le père
Plus de 15 ans après, on entend de nouveau parler des Dokolo, par un de ses enfants interposé. Jusqu’il y a peu, Sindika Dokolo était connu de ses compatriotes comme un homme d’affaires et un excellent collectionneur d’œuvres d’art établi en Angola voisin. Et aussi, que le fils Dokolo n’était rien d’autre que l’heureux époux d’Isabel Dos Santos, la fille du Chef de l’Etat Angolais que des magazines spécialisés présentent comme une des dames les plus riches du contient. Mais la romance s’arrête-là. Depuis quelques années, le nom de Sindika est de plus en plus évoqué dans les milieux politiques de son pays. Précisément, depuis qu’un transfuge de la rébellion du Mouvement de Libération du Congo (MLC) de Jean-Pierre Bemba Gombo, Olivier Kamitatu Etsu, a créé son propre parti politique en 2006. L’Alliance pour le Renouveau du Congo (ARC, 2 élus nationaux en 2006) se dote d’un siège très en vue au bord du Boulevard Triomphal à Kinshasa et fait courir les premières rumeurs sur Sindika. Ce siège acquis à un endroit aussi stratégique est l’œuvre du fils Dokolo, rapportent des sources. Qui donnent Olivier Kamitatu comme disposant d’entrées solides au sein du pouvoir angolais grâce à son ami.
Seulement, le fils Kamitatu Cléophas, un pionnier de l’indépendance décédé le 12 octobre 2008 en Afrique du Sud, quitte la Majorité Présidentielle à laquelle il avait adhéré pour convoler en noces intéressées avec un autre homme d’affaires, Moïse Katumbi et son G7. On entendra un peu moins parler de Sindika Dokolo depuis la création de la nouvelle plate-forme politique, jusqu’à ces dernières semaines. Le jeune homme d’affaire de quelque 45 ans semble suivre de très près l’évolution de la situation politique en RD Congo et y réagit avec de plus en plus d’insistance, sur son compte Twitter et dans les médias. Et presque toujours contre le pouvoir en place à Kinshasa. Même si l’homme se défend de verser dans la politique politicienne.
Le 30 avril dernier, Sindika est passé résolument des tweets à l’acte en volant au secours des réfugiés rd congolais qui fuyaient les affres du terrorisme Kamwina Nsapu dans les provinces kasaïennes voisines. Le don à ces victimes de la barbarie de leurs propres frères, très médiatisé, comprend 200 tonnes de riz. Sindika Dokolo ne compte pas s’arrêter là et devrait envoyer dans les tous prochains jours des produits pharmaceutiques. « Je suis choqué et meurtri de voir la barbarie que certains des réfugiés en provenance du Cogo ont subie », poste-t-il sur ses comptes Facebook et Twitter, attirant immédiatement la répartie sympathique et enflammée de son cher ami Olivier Kamitatu qui l’en félicite publiquement sur Twitter également. Pour l’instant, nul ne songe à rappeler au gendre Dos Santos qu’il y a quelques années, ses compatriotes se faisaient virer dans des conditions plus inhumaines du territoire de sa belle famille. Sans qu’il ne songe à expédier le moindre don aux frontières où ils étaient refoulés comme du bétail, sans le moindre ménagement. Les postings de Sindika sont illustrées d’images d’impressionnants containers estampillés du nom du donateur débarqués devant les camps des réfugies rd congolais en Angola. Pour que nul n’en ignore et n’oublie, en quelque sorte. De même que la presse internationale est plus que tenue au courant l’œuvre aux allures philanthropique du gendre Dos Santos. Dans une interview accordée au quotidien bruxellois La Libre Belgique, mardi 30 mai 2017, le fils Dokolo se montre plutôt clément vis-à-vis du pouvoir mobutiste qui a conduit son défunt géniteur de vie à trépas. « Je ne supporte plus la barbarie quotidienne qui sévit en RDC. Cette région, je la connais. J’ai grandi au Zaïre. Il y avait parfois de la violence, tout n’était pas toujours rose, mais quand quelque chose n’allait pas, il y avait une réaction. Aujourd’hui, des milliers de cadavres s’entassent. Les viols et les exactions de tout type sont devenus de simples statistiques macabres. Il n’y a plus la moindre dimension humaine. C’est absolument inacceptable. Nos actuels responsables politiques, ceux qui sont aux affaires, devraient donner une réponse à cette crise. Or, ils semblent jouer un rôle soit neutre et donc irresponsable, soit, et c’est bien pire, ils instrumentalisent ces catastrophes, ces tragédies humaines. Les présomptions sont lourdes lorsqu’on met en parallèle ll y a juste un constat entre l’enchaînement des tragédies et le calendrier politique de la RDC », accuse-t-il carrément. Comme le ferait n’importe quel acteur politique de l’opposition pressé d’accuser l’adversaire politique de tous les maux d’Israël, comme on dit.
Opposant ?
Principale preuve de la culpabilité des hommes au pouvoir dans son pays : « … à chaque fois qu’on commet des meurtres ou des exactions ou qu’on découvre des fosses communes, le gouvernement trouve une réponse rapide qui doit éteindre l’incendie. La dernière trouvaille concerne ce douloureux dossier de l’assassinat des deux jeunes experts de l’Onu. A en croire le gouvernement, plus besoin d’enquête tout est arrangé, ils ont trouvé le coupable. Il en est de mêmes des images filmées, des crimes de masse, des femmes violées. Inutile d’enquêter la justice congolaise gère le dossier. C’est insupportable de constater à quel point, au Congo, la vie humaine ne représente plus grand-chose ». Le moins qu’on puisse affirmer à ce stade, c’est que le rejeton d’Augustin Dokolo qui ment effrontément, puisque le Parquet congolais est occupé à poursuivre les auteurs présumés de ces atrocités, n’est par ailleurs pas un champion de la souveraineté nationale, puisqu’il la subordonne à la « bienveillante » communauté internationale. Comme ses aïeux avant lui ?
En attendant d’en savoir plus, c’est un nouveau « Moïse » qui semble être en train de voir le jour à partir des terres angolaises.
J.N.