Depuis le déclenchement du mouvement insurrectionnel Kamwina Nsapu dans la province du Kasai Central, au second semestre de l’année 2016, les victimes, en termes de morts et de déplacés internes, se comptent en dizaines de milliers. Près de 23.700 plus exactement, selon les estimations de l’agence onusienne datant de la semaine dernière. Le mouvement, que le gouvernement de la RD Congo qualifie de terroriste, non sans raison, a déjà a étendu ses tentacules jusque dans les provinces voisines du Kasai Central, de la Lomami, du Kasai et même au-delà. Le nombre de provinces touchées par la crise Centrale kasaïenne s’élevant déjà à 8 sur les 26 que compte la RD Congo (Ocha). C’est tout dire : les Kasaï vivent l’enfer, au propre comme au figuré, nonobstant les nombreux appels à la reddition, en ce compris ceux lancés par les héritiers du trône Kamwina Nsapu dans la périphérie de Tshimbulu au Kasai Central. Le dernier de ces appels date du 22 mai 2017 dans la journée, et il a été lancé par l’héritier du trône, désigné par l’entregent du vice-premier ministre et ministre de l’intérieur, le PPRD Ramazani Shadary. Au terme d’une audience au cabinet du vice-premier ministre à Kinshasa, Jacques Kabeya Ntumba, le successeur de Jean-Pierre Mpindi a appelé toutes les parties au calme et traité de « bandit » tout celui qui utilise le patronyme chefal Kamwina Nsapu pour commettre des crimes au Kasaï.
Rien n’indique, cependant, que la nouvelle autorité coutumière des environs de Tshimbulu sera entendue. Etant donné quelques heures avant son adresse à l’intention de ses co-régionnaires, de nouvelles exactions des milices dites Kamwina Nsapu étaient rapportées. Qui sont de nature à donner raison aux autorités en charge des questions sécuritaires et coutumières du gouvernement central, qui font état il y a plusieurs semaines de l’implication de leaders politiques locaux qui entretiennent l’insurrection à leurs comptes. Des révélations d’un quotidien étasunien, le New York Times, rendues publiques le week-end dernier, crèvent l’abcès là où les politiques rd congolais avaient préféré observer un mutisme prudent jusque-là. Elles pointent du doigt le député national MR Clément Kanku, que des enregistrements compromettant retrouvés dans l’ordinateur de la chercheuse onusienne assassinée le mois dernier dans la région de Kananga, Zaïda Catalan, accusent quasi formellement. Ces enregistrements attestent que Clément Kanku wa Tshibuabua coordonnait les opérations des insurgés Kamwina Nsapu à partir de Kinshasa.
Selon d’autres révélations, de Sonia Rolley de la RFI celles-là, les enregistrements accusateurs dateraient du mois d’août 2016, et coïncident avec le séjour dans la région du député Kanku, en compagnie du Procureur Général de la République et d’autres notables de la région, dans le cadre d’une tentative de règlement à l’amiable de ce qui n’était encore que le conflit Kamwina Nsapu. Ce qui reste, certes, à prouver, les propos de notre consoeur n’étant nullement paroles d’évangile.
Parce que le 21 octobre 2016, des informations de source crédible relatives à la complicité de l’élu de Dibaya dans l’insurrection centrale kasaïenne, avaient déjà été publiées par Le Maximum (Lire ci-contre). Nos sources faisaient état de preuves irréfutables obtenues par écoute, révélant notamment que le dirigeant MR fournissait, outre des moyens financiers, la de logistique aux insurgés. Interpellé par les services de sécurité, Clément Kanku se serait même réfugié en Europe avant de regagner le pays à la faveur de la formation du Gouvernement Samy Badibanga. L’ancien rebelle RCD-N n’était pas le seul acteur politique Central kasaïen cité dans cette affaire. Trésor Kapuku, l’ancien gouverneur de l’ex. Kasaï Occidental pour le compte de la rébellion RCD-Goma, était également de mèche avec les insurgés, assuraient nos sources. Les deux lascars auraient récupéré le mouvement insurrectionnel pour poursuivre la lutte du défunt Jean-Pierre Mpindi contre le pouvoir établi. Plus précisément, contre l’autorité provinciale MP de l’ex Kasaï Occidental, Alex Kande Mupompa, frappée depuis par une suspension qui tarde à dire son nom.
Les miliciens Kamwina Nsapu, tout au moins certains parmi ceux qui se réclament du mouvement insurrectionnel, opéreraient donc depuis plusieurs mois sous l’autorité d’acteurs politiques locaux ou originaire des provinces affectées par le phénomène. Ils recrutent dans les rangs de l’opposition à la majorité au pouvoir en RD Congo essentiellement, et n’ont jamais osé désavouer, même du bout des lèvres, les tueries qui endeuillent les leurs. Clément Kanku pourrait donc ne pas être le seul responsable de la poursuite d’atrocités qui se répandent à la vitesse d’une gangrène et mute en affrontements interethniques manifestement peu contrôlables dans les Kasai. Les Kamwina Nsapu sont devenues Kamwina Kanku, Kamwina Kapuku, etc. à n’en point douter. Même le nouveau chef Kamwina Nsapu, Jacques Kabeya Ntumba, était jusqu’à il y a quelques mois encore, membre du MR de Clément Kanku.
Et point n’est besoin, devant l’ampleur des atrocités et des crimes perpétrés contre des populations innocentes, de noyer les responsabilités derrière un flot de questionnements procédurales sur les moyens utilisés pour établir les accusations qui planent sur certains fils du Kasai Central. L’essentiel reste de savoir et de prouver si oui ou non Clément Kanku, ou quiconque d’autre, a récupéré l’insurrection Kamwina Nsapu à son compte. La vérité importe plus que les moyens utilisés pour l’établir.
J.N.MILICES KAMUENA NSAPU AU KASA1