Une date anniversaire de commémoration de l’anniversaire de la victoire des troupes de Laurent-Désiré Kabila particulière, même si la veille, le patron de la territoire rd congolaise avait décidé qu’elle serait consacrée à la méditation selon des programmes à arrêter par ses représentants provinciaux. A Kinshasa, où étaient prévues des manifestations, somme toute sobres, se sont tenues au Shark Club de la Gombe, une partie de la ville aura fêté dans la terreur. Celle située dans les parages immédiats du Centre Pénitentiaire et de Rééducation de Kinshasa (CPRK), l’ex prison centrale de Makala. Aux alentours de 3 heures du matin, les riverains de l’immense établissement peint en blanc ont été réveillés par des tirs nourris à l’arme automatique : la prison était attaquée, cela ne faisait aucun doute pour beaucoup ici, qui n’ignoraient pas que ce lieu carcéral avait déjà fait l’objet d’agression armée plus d’une fois par le passé. Aux petites heures, mercredi 17 mai 2017, la situation restait encore confuse mais on pouvait apprendre de bonne source que l’expédition contre la prison de Makala était l’œuvre des adeptes du Gourou de Bundu dia Kongo, Ne Mwanda Nsemi, formellement reconnus par le bourgmestre de la commune de Selembao. Avant que le ministre d’Etat en charge de la justice et Garde des sceaux, Alexis Thambwe Mwamba, ne confirme l’information et n’avance le nombre de quelque 50 détenus qui ont profité de l’occasion pour partir en cavale. Les prisonniers emblématiques, à l’exception de Ne Mwanda Nsemi, étaient tous restés dans leurs cellules, a également assuré le ministre.
Si la mise au point, très matinale du patron de la justice et des établissements pénitentiaires a eu le don de calmer les esprits de ceux qui avaient craint le pire, elle n’a pas suffi pour arrêter le flux les plus rocambolesques qui ont traversé la capitale rd congolaise. « Les nouvelles » étant rapportées selon que l’on est pour ou contre la majorité kabiliste au pouvoir en RD Congo. Les plus fantaisistes parmi elles ont aussitôt donné les Eddy Kapend, l’aide de camp du feu Mzee Laurent-Désiré Kabila condamné dans le cadre du procès des assassins du tombeur du défunt Maréchal Mobutu, ou encore le néo-katumbiste Frank Diongo comme ayant pris la tangente. De même que nombreux prisonniers, entre 8 et 9000, se seraient évadés de l’ex Makala, selon ces sources qui ont versé dans une espèce sorte de masturbation intellectuelle. Même des acteurs plus ou moins emblématiques de l’opposition politique rd congolaise ont plus que jubilé, mercredi 17 mai 2017. A l’exemple l’ARC/G7 Olivier Kamitatu Etsu, auteur d’un posting sur son adresse Twitter, qui a décrété que l’exploit des adeptes BDK attestait de la faiblesse de l’Etat rd congolais. « Comme si cela était nouveau. L’ancien rebelle MLC semble oublier que le mouvement rebelle bembiste dont il fut l’un des cadres les plus en vue avait déjà profité de la même faiblesse à la fin de l’ère Mobutu », lui a répliqué un kabiliste interrogé par Le Maximum au cours de la manifestation du Shark Club le même jour. Ou encore l’UNC Jean-Baudouin Mayo, qui a profité de l’évasion annoncée de Ne Mwanda Nsemi pour rappeler que le député et néanmoins Gourou d’une secte guerrière ethnico-tribale, poursuivi pour offense au Chef de l’Etat, incitation à la haine tribale, incitation à la désobéissance civile, organisation de groupes terroristes, détention illégale d’armes et de munitions de guerre, meurtre, incendie criminel, destruction méchante et incitation à la révolte, avait sa place dans une résidence surveillée et non pas à la prison, selon une décision de la cour suprême de justice rendue en mars dernier. Ce à quoi le ministre de la communication et médias et porte-parole du Gouvernement, Lambert Mende Omalanga, a répliqué en rappelant que « Juridiquement, la prison est aussi une résidence. Dans ce dossier, il ne faut pas exclure l’hypothèse d’une assignation à résidence en prison si le Procureur l’a jugée opportune avant d’avancer des telles affirmations », rapporte Politico.cd.
Sur les lieux des exploits BDK, les tirs à l’arme automatique étaient encore audibles jusque 7 h du matin environ. Mais les sources du Maximum assurent que des unités de la Garde Républicaine appelées en renfort aux policiers débordés par l’ampleur de l’attaque avaient déjà pris le contrôle de la prison et maîtrisaient la situation depuis au moins deux heures. Les mêmes sources rapportent que ce sont les éléments de la police commis à la surveillance de l’ex prison de Makala qui auront payé le plus grand tribut de l’attaque BDK. La quasi-totalité des policiers postés à l’entrée principale de l’établissement carcéral auraient été tués par les assaillants qui ont fait usage d’armes de guerre sans la moindre hésitation. De l’attaque elle-même, qui a complètement désorienté les forces de l’ordre, on rapporte qu’elle a visé plusieurs points de l’immense prison éparpillant ainsi la réplique policière. Seule l’arrière de l’établissement, par laquelle se sont enfouis Ne Mwanda Nsemi et une vingtaine de ses libérateurs, a été épargnée jusqu’au moment de la fuite. Mais un affrontement s’y est produit entre les adeptes du Gourou et les policiers, faisant une dizaine de mort parmi les assaillants, selon nos sources. Ne Mwanda Nsemi, qui était dans le groupe, l’aura donc échappé belle.
Des sources indépendantes qui se sont confiées à nos rédactions sous le sceau de l’anonymat rapportent que l’attaque imminente de l’ex prison de Makala était subodorée et connue des services. Des discussions sur l’opportunité de garder le Gourou du BDK à Makala ont eu lieu, certaines autorités suggérant que l’homme soit déplacé. Mais aucune décision n’avait pu être arrêtée avant les incidents de mercredi dernier.
Evasions en masses
Les BDK n’ont pas seulement tué à Makala. Ils ont aussi pillé, incendié véhicules et bureaux, occasionnant la fuite de nombreux prisonniers parmi lesquels des dangereux criminels généralement enfermés au Pavillon II. Un communiqué officiel de la Police Nationale Congolaise, rendu public par son porte-parole, le Colonel Mwanamputu, en fait état et sollicite la collaboration des kinois pour les dénoncer aux forces de sécurité afin d’éviter la recrudescence de la criminalité dans les prochains jours.
Mais les chiffres avancés par certaines sources semblent exagérés, parce qu’en principe, le CPRK a une capacité d’hébergement de 1.500 pensionnaires. Un nombre généralement et allègrement porté à quelque 5.000 pensionnaires en raison du surpeuplement, peut-être même à 6.000 pensionnaires. Pas plus. Avancer le nombre de 8.000 évadés paraît donc exagéré, à l’évidence.
Une chose semblait certaine, au moment où Le Maximum mettait sous presse, jeudi 18 mai 2017 dans la soirée : aucun prisonnier politique « sérieux » n’a mordu au rocambolesque hameçon tendu par les BDK. Ni le Colonel Eddy Kapend, dont la chambre carcérale a été littéralement pillée, ni Frank Diongo. L’avocat Firmin Yangambi et son co-listier, Eric Kikunda, ont gardé leurs cellules. De même que le Général Jérôme Kakwavu, Germain Katanga et Leta Mangasa, l’ancien patron des services de sécurité condamné dans le cadre du procès des assassins de Mzee Laurent-Désiré Kabila, lui aussi.
Certains officiers du MLC de Jean-Pierre ont pris le large, près d’une dizaine selon des sources, en même temps qu’un grand nombre de « petits criminels » habituellement hébergés aux Pavillons 10 et 11. Le Pavillon 9, réservé aux dames, se serait quasiment vidé de son monde. Les représentants du sexe faible ont préféré les risques de la cavale à la vie carcérale. Près de 200 dames ont disparu dans la nature.
Une véritable chasse aux évadés a été lancée dès le mercredi 17 mai et un certain nombre parmi eux a été arrêté selon un communiqué rendu public dans l’après-midi : « « Nos forces sont en alerte partout dans la ville de Kinshasa dans les différentes communes. A l’heure actuelle, plusieurs prisonniers qui étaient en fuite ont été récupérés et les opérations sont toujours en cours », a déclaré le Colonel Mwanamputu à Politico.cd.
J.N.ENCADRE