Ceux qui, en RD Congo et en Afrique entretenaient encore des doutes sur la propension de la communauté internationale par l’Organisation des Nations-Unies interposée à régenter la vie publique en RD Congo ont été servis le week-end dernier. En même temps qu’ils ont sûrement levé tout doute sur la mission onusienne au pays de Patrice Emery Lumumba, qui peut apparaître comme une mission d’occupation, ainsi qu’un certain nombre d’observateurs s’en inquiétaient tout bas il y a peu.
C’est, encore une fois, du fameux Bureau Conjoint des Nations-Unies aux Droits de l’Homme (BCNUDH) qu’est partie l’aveu traître. Dans un de ces communiqués comminatoires dont il a l’habitude, ce bureau, dirigé par un certain José Maria Aranaz, s’est déclaré rien moins que « préoccupé » par le taux élevé des condamnations à mort à l’Est de la RD Congo, dans les procès contre des présumés rebelles ougandais. Rien moins que cela. Le BCNUDH critique ainsi, vertement, les procès instruits par la cour opérationnelle militaire du Nord-Kivu contre les tueurs de plus d’un millier de civils innocents, dont des femmes et des enfants, dans ce qu’on appelle Beni rural. Notamment, parce que mercredi dernier, cette cour avait condamné à la peine de mort (qui est commuée en prison à perpétuité en RD Congo, comme chacun le sait) 3 rd congolais et 1 tanzanien. « Nous sommes préoccupés par le chiffre élevé de condamnations à mort » s’est permis de déclarer Sieur José-Maria Aranaz, crachant ainsi sur la mort de plus d’un millier d’habitants du territoire de Beni au Nord-Kivu. Sous prétexte que ces verdicts prononcés par une juridiction d’exception ne sont susceptibles d’aucun appel. Comme si le millier de civils tués à la machette à Beni et alentours, souvent surpris dans leur sommeil, avait bénéficié de quelque sursis que ce soit de la part de leurs bourreaux. Mais en RD Congo, on a déjà vu pire, explique un activiste des droits de l’homme de Beni joint au téléphone par Le Maximum lundi 15 mai 2017 dans la journée : « Les guerres imposées à notre pays à la fin des années ’90 ont déjà occasionné près de 5 millions de morts sans que nul dans la communauté internationale s’en émeuve outre mesure. Il n’y a donc rien d’étonnant ou presque dans la posture dédaigneuse des Nations-Unies sur les tueries qui endeuillent Beni », déclare-t-il.
Elle a de quoi faire perdre son latin au rd congolais lambda, dans la dernière sortie médiatisée de José-Maria Aranaz : c’est tout de même un fonctionnaire de la mission des Nations-Unies, qui en principe est chargée d’aider le pays hôte à guérir les maux qui le rongent, dont ces tueries sauvages de civils sans défense, qui prône des solutions complaisantes susceptibles d’entretenir le terrorisme. « Les Nations-Unies protestent contre toute condamnation de nature à dissuader ou à décourager l’activisme de tueurs de Beni », explique notre interlocuteur de Beni, plus que dépité. Qui estime qu’il s’agit de stratégies habituelles de ces fonctionnaires internationaux pour lesquels tout ce qui est nature à prolonger leur présence sur le territoire de la RD Congo est à prendre à leur compte. En ce compris l’entretien de poches de tueries comme celles qui sévissent au Nord-Kivu.
Mais il y a pire que cela. Parce qu’en critiquant des arrêts rendus par la justice du pays hôte, l’ONU fait plus que déborder de son mandat, ainsi que l’ont pertinemment relevé nos confrères de la radio-télévision publique rd congolaise (RTNC), dans un dossier de la rédaction samedi dernier. Dans tout autre pays que la RD Congo, Sieur Aranaz ne serait jamais hasardé à émettre un jugement de qualité sur la justice. Pour la bonne et simple raison que partout à travers le monde, c’est aux juges et à eux seuls que revient la tâche de dire le droit. Pas à un préposé des Nations-Unies. Et, dans l’exercice de cette noble mission sensée soigner et panser les plaies de la société, le juge, indépendant et souverain, n’a pour maître que son intime conviction. Il s’agit de principes élémentaires et universellement admis. « C’est le lieu de rappeler que le droit congolais punit chaque fait criminel d’une peine bien déterminée. Lorsqu’il est établi que plusieurs infractions graves ont été commises, il est parfaitement normal que les juges leur appliquent autant de condamnations conséquentes, fut-ce à la peine de mort, n’en déplaise au Bureau Conjoint des Nations Unies aux Droits de l’Homme. Ce partenaire du Gouvernement doit comprendre qu’il n’a pas à s’immiscer dans l’élaboration de la législation et encore moins dans l’intime conviction du juge. La RDC ne doit pas tolérer ce type d’ingérence méprisante et provocatrice », s’est insurgé notre confrère de la RTNC. Plus qu’à juste titre, du reste.
En RD Congo, les préposés onusiens se comportent comme en terre conquise, arbitrant en l’entretenant un conflit par-ci, critiquant vertement les décisions des plus hautes instances étatiques du pays hôte par-là, condamnant invariablement la disproportion des forces utilisées pour rétablir la paix et l’ordre dans un pays dit post-conflit comme la RD Congo … un véritable supra-pouvoir de fait. Qui révèle que dans ses rapports avec l’ONU, c’est la RD Congo qui est littéralement tournée en bourrique, malgré le fameux accord SOFA signé entre les deux parties. « Le comble dans ces comportements, c’est qu’ils ne sont stipulés nulle part », s’inquiète un diplomate rd congolais interrogé par Le Maximum. Qui ne comprend pas ce qui ressemble à une complaisance de la part du Gouvernement de la RD Congo qui n’ignore rien des clauses de l’accord signé avec les Nations-Unies. « Il se serait permis le commentaire de vendredi dernier à Kigali au Rwanda que Jose-Maria Aranaz serait déjà à bord d’un avion le ramenant dans son pays, pour toujours », estime-t-il. De fait, les autorités rd congolaises ont déjà déclaré un fonctionnaire onusien, également préposé aux fameux droits humains persona non grata. Ça n’a pas suffisamment dissuadé, manifestement.
J.N.