En décidant de se jeter à l’eau et de lancer les travaux préparatoires du dialogue politique inclusif, le Togolais Edem Kodjo ne s’est sans doute pas trompé. La plus importante embûche à la rencontre des politiques rd congolais restait sans nul doute cette épineuse affaire de libération de ceux que l’opposition tient pour prisonniers d’opinion ou qu’elle considère comme poursuivis pour des raisons politiques et non pas pour des délits de droit commun. Parmi ces personnalités sur lesquelles le gouvernement s’est abstenu de se prononcer figurent en bonne place le DC Eugène Diomi Ndongala et l’ancien gouverneur de l’ex.province du Katanga, Moïse Katumbi Chapwe.
Candidat à la présidentielle 2006, avant que les scrutins de 2011 ne révèlent l’envergure politique réelle de son parti, celle d’un seul député élu dans la capitale (c’est-à-dire entre 1.000 et 45.000 voix émises en sa faveur), Eugène Diomi Ndongala avait quasiment été surpris en pleines orgies libidinales en compagnie de mineures, deux filles d’une même famille que le député s’offraient depuis plusieurs mois. Dans sa propriété de la Gombe non loin du building de l’Onatra fut découvert un véritable « abattoir », le sol d’une pièce attenante au bureau du président de la Démocratie Chrétienne (sic !) étant jonché de préservatifs et autres excitants. Une affaire qui eut tôt fait de se répandre dans la haute ville, sans beaucoup surprendre : selon tous ses proches, les ébats amoureux constituaient le sport favori Eugène Diomi Ndongala Nzomambu qui n’en était pas à son coup d’essai parce qu’il avait déjà été traîné en justice pour une affaire semblable, lorsque le parent d’une fille mineure de l’immeuble Royal sur le boulevard du 30 juin avait trouvé la mort dans des conditions mystérieuses alors qu’il était allé à la recherche de sa fille fugueuse signalée avec le député. « Diomi et les jeunes filles, c’est comme la rubrique des chiens écrasés », raconte en souriant un confrère qui prétend connaître l’homme comme sa poche.
Déchu par l’assemblée nationale
Promptement délesté de son immunité parlementaire par un vote à l’assemblée nationale en janvier 2013 à la suite d’une requête du Parquet général de la République, Eugène Diomi avait été par la suite jugé et condamné pour viols sur mineures par la Cour Suprême de Justice et purge une peine de 10 ans de prison au Centre Pénitentiaire et de Rééducation de Kinshasa (CPRK, ex. prison de Makala). Mais, c’est de coutume, de plus en plus en RD Congo : pour son parti et ses amis politiques, le procès Diomi est systématiquement présenté comme une sanction politique due au soutien qu’il apporte à Etienne Tshisekedi, leader de l’Udps depuis les lendemains de la présidentielle 2011. Aussitôt remis en selle par le Rassemblement des forces politiques et sociales acquises au changement, Etienne Tshisekedi, président du conseil des sages de cette plate-forme placera aussitôt la libération inconditionnelle de son ami politique Diomi Ndongala parmi les préalables de sa participation au dialogue politique national. Un préalable fort ennuyeux et lourd de conséquences, si le gouvernement osait y accéder : non seulement il serait question d’annuler une décision de la Cour Suprême de Justice, la plus haute instance judiciaire du pays à l’époque des faits ; mais en plus, une telle ingérence serait non seulement une fâcheuse entorse au sacro-saint principe de la séparation des pouvoirs qui confirmerait l’instrumentalisation de la justice dont on accuse rituellement Kinshasa, mais aussi, et peut-être une violation des engagements internationaux de la RDC en vertu desquels les crimes de violences sexuels ne peuvent faire l’objet, ni de transactions, ni de grâce, ni d’amnistie.
Crimes sexuels, affaire délicate
Délicate affaire donc. Vendredi 19 août 2016, le ministre de la justice, Alexis Thambwe Mwamba, a annoncé la libération d’une vingtaine de ces « prisonniers politiques et d’opinion » selon une liste transmise au gouvernement par la délégation de l’Union Européenne en RD Congo. Ni Diomi Ngondala, ni Me Muyambo, le président d’un petit parti politique de Lubumbashi dans l’ex. Katanga poursuivi pour escroquerie ne figuraient sur le parchemin. S’expliquant sur le sujet, le plénipotentiaire rd congolais a fait état de fâcheux précédents que constitueraient les libérations de Diomi Ndongala et de Jean-Claude Muyambo, compte tenu du nombre important des dossiers analogues instruits par les cours et tribunaux rd congolais et pour lesquels il aurait fallu appliquer la même mesure de clémence envers les autres coupbales de tels faits en raison du principe de l’égalité de tous les Congolais devant la loi et les institutions nationales.
Des sources du Maximum révèlent que sur le dossier Diomi Ndongala par exemple, poursuivi pour abus sexuels, organisations internationales de défense des droits de l’homme et représentations diplomatiques en RD Congo demeurent sur la brèche : il n’est pas question de gracier ce type de criminel, estime-t-on dans les principales chancelleries occidentales. L’air du temps, excessivement grincheux sur tout ce qui touche aux violences faites aux femmes en RD Congo, ne s’y prête nullement.
Katumbi connexion
L’autre affaire à la fois délicate et ennuyeuse est relative aux poursuites judiciaires engagées contre Moïse Katumbi Chapwe, l’ancien gouverneur de l’ex. province du Katanga. Pour atteinte à la sécurité intérieure de l’Etat et pour escroquerie, dans la première, le milliardaire katangais d’origine juive est poursuivi par le Procureur Général près la cour d’appel de Lubumbashi. Il a en outre été condamné par le tribunal de paix de Kamalondo (Lubumbashi) où l’avait attrait un sujet grec du nom de Stoupis Alexandros . Egalement président-sponsor du TP Mazembe de Lubumbashi, un des plus grands clubs de football de la RD Congo, Katumbi jouit d’une réelle popularité dans l’ex. province du Katanga et à travers le pays, et n’hésite à s’en servir pour conduire ses affaires et pour essayer de se soustraire des griffes de la justice.
Lorsque le chairman Katangais annonce sa candidature à la présidentielle fin avril dernier, il se sait poursuivi par la justice de son pays pour recrutement de mercenaires. Parce que le 24 avril 2016, alors qu’il tentait de tenir un meeting non autorisé au Stade Kamalondo de la capitale cuprifère, les forces de l’ordre avaient mis la main sur des éléments de sa garde rapprochée, des sujets américains admis sur le territoire national en qualité de fermiers, qui se sont avérés d’anciens Marines US. Un dossier est ouvert à charge du milliardaire Katangais, suivi d’un procès popularisé à souhait. Pour se rendre à la cour d’appel de Lubumbashi chargée de l’instruction de l’affaire, le président du TP Mazembe effectue un tour de la ville, pour rameuter les supporters de son équipe qui viennent en masses suivre des audiences à huit-clos. L’instruction de l’affaire Katumbi, c’est comme un match de football : elle se déroule sous la huée de centaines de fanatiques déchaînés contre les juges. Encore que Moïse Katumbi lui-même ne tient pas le coup dans les affrontements entre forces de police et fanatiques de Mazembe qui l’escortent. Après la seconde séance d’audition à la cour d’appel de Lubumbashi, l’homme se fait porter malade et est évacué en Afrique du Sud pour y suivre des soins médicaux.
Séjour politico-médical
Durant ce séjour médical, que Moïse Katumbi a prolongé à travers les capitales occidentales d’où il distille de diatribes d’opposant à Joseph Kabila, éclate une autre affaire Katumbi au mois de juin : celle qui l’oppose au sujet grec Alexandros Toupis dans une affaire de spoliation d’immeuble. Jugé par défaut, le chairman est dûment condamné par le tribunal de paix de Kamalondo à 3 ans de prison le 22 juin 2016. Mais l’affaire fait encore débats dans les milieux politiques lorsqu’il apparaît, mi-août 2016, que le milliardaire a acheté la quasi-totalité de la composition qui a rendu le jugement. Il y a même pire : le greffe aussi, dont un des agents a disparu avec tout le dossier physique sans laisser traces.
Si cette politisation à outrance de dossiers judiciaires peut paraître profitable au chairman Katangais, dans les chancelleries occidentales, on s’offusque de plus en plus de ce type d’exploits qui consiste à s’offrir tout ce qu’on veut moyennant espèces sonnantes et trébuchantes. Dans le dossier du tribunal de paix de Lubumbashi – Kamalondo, une juge s’est subitement retrouvé à l’étranger (aux USA, selon des sources) nantie d’un confortable pactole après avoir dénoncé sa signature apposée au bas d’un document contresigné par deux de ses collègues. Un huissier a dans le même temps, commis le parjure parfait en disparaissant, de son côté, en emportant par devers lui le dossier physique de l’affaire Katumbi-Stoupis. Cela ne s’était jamais vu, même aux pires heures de la dictature mobutiste de la deuxième République. Nombre de diplomates occidentaux, en place en République Démocratique du Congo, se méfient désormais de cet homme sulfureux qui a la caractéristique de désacraliser et corrompre tout sur son passage. Arrêter les poursuites judiciaires contre Moïse Katumbi relève de la gageure.
J.N.