A Beni, dans la Grand Nord Kivu, l’horreur a grimpé d’un cran. Dans la région, principalement dans les villages difficiles à sécuriser de manière optimale de Beni rural, ces villages alentour de la Ville-Territoire de Beni, au moins 600 personnes ont déjà été tuées à l’arme blanche au cours des deux dernières années. Par les rebelles ougandais de l’ADF, selon la plupart d’observateurs, dont les Fardc et la Monusco. Depuis quelques semaines, une vaste offensive est engagée contre ces forces négatives, dans une opération conjointe Fardc-Monusco. Mais elle n’a pas empêché les présumés ADF de perpétrer de nouveaux massacres de civils. Dans la nuit du 13 au 14 août 2016, quelque 36 personnes ont été achevées à l’arme blanche comme d’habitude, dans un quartier périphérique de la ville de Beni, à Rwangoma. 22 hommes et 14 femmes ont succombé à ces agressions à l’arme blanche.
L’escalade de l’horreur à Beni n’a pas laissé indifférent. Bien au contraire. Dimanche dernier, la population de Beni est descendue dans la rue pour protester contre cette insécurité qui a atteint leur agglomération et exiger la démission de certaines autorités chargées de la sécurité des populations.
Côté autorités politiques, Julien Paluku Kahongya, le gouverneur du Nord-Kivu et originaire de la région a appelé la population à la vigilance et au soutien aux Forces armées de la République Démocratique du Congo pour qu’elles viennent à bout de ces terroristes islamistes qui sont traqués depuis plusieurs opérations … ». « Pour permettre une surveillance continue de l’ennemi, instruction est donnée à toutes les autorités à la base d’organiser un contrôle citoyen à partir de trois maisons et de rendre compte des personnes suspectes ou de mouvements suspects observés », poursuit le gouverneur qui n’est jamais aussi loin dans les messages publics relatifs à la sécurisation au Nord-Kivu.
Les dernières tueries de Beni ont ébranlé les autorités nationales au plus haut niveau. Joseph Kabila, le président de la République, a, selon le Ministre de la Communication et Médias, porte-Parole du Gouvernement Lambert Mende, décrété 3 jours de deuil national à dater du lundi 15 août 2016, tout en présentant ses condoléances aux populations éprouvées.
Maman Sidikou Sambo, le patron de la Monusco et représentant spécial du Secrétaire Général de l’ONU en RD Congo, a, lui aussi, réagi contre les tueries des civils à Beni. « La MONUSCO condamne cet acte barbare commis contre les populations civiles, et réitère son soutien aux FARDC et à la PNC pour protéger les populations civiles à Beni », affirme-t-il dans une déclaration datée du 14 août 2016. La MONUSCO en coopération avec les FARDC et la PNC s’est déployé sur tout le territoire de Beni pour apporter une protection aux populations. Des patrouilles conjointes sont en cours, et une délégation de la MONUSCO se rendra dans la ville de Beni demain pour apporter un soutien aux autorités du pays afin de continuer la traque contre les présumés ADF, assure le même communiqué. Il y avait de quoi.
Pour réussir l’exploit d’approcher d’aussi près Beni-ville et y perpétrer des tueries avant l’intervention des forces armées rd congolaises et onusiennes, les assaillants avaient arborés les mêmes tenues que celles des Fardc, a révélé le Général Marcel Mabangu, commandant des opérations Sokola 1. Preuve de plus que dans l’enfer de Beni, des complicités locales ne sont toujours pas à exclure.
Certes, nombre de spécialistes attribuent la cruauté des égorgeurs de la semaine dernière au dépit d’avoir perdu quelques jours auparavant un de leurs derniers QG, Mwalika, tombé aux mains des Fardc. Mais ces tueries de Beni sonnent, en effet, comme un défi injurieux adressé au Président Joseph Kabila Kabange. Les tueurs de Beni ont sévi sur les populations civiles 72 heures après que le Chef de l’Etat eût quitté la région. Joseph Kabila est arrivé le 10 août dernier à Butembo en provenance de Beni, de retour d’un voyage au Tchad. Une seconde visite à Beni donc, puisque le président de la République y avait déjà séjourné le 3 du même mois.
L’implication d’acteurs politiques nationaux est donc on ne peut plus évidente dans ces tueries. Tout se passe comme si quelqu’un ou quelques uns parmi eux avaient voulu sanctionner Joseph Kabila et les populations locales qui lui ont manifesté un attachement incontestable.
J.N.